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Le nouveau statut de Bank Al-Maghrib en plénière au Parlement début juillet

Sur les 59 amendements déposés, 28 ont été adoptés. Les nouveaux statuts visent essentiellement à octroyer à l’institut d’émission une autonomie totale en lui conférant des prérogatives en matière de stabilité des prix.

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BANK AL MAGHRIB

La réforme du statut de Bank Al-Maghrib avance dans le circuit d’adoption. En préparation depuis 2015, le projet de loi n°04-15 portant statut de Bank Al-Maghrib – approuvé en conseil de gouvernement en juillet 2017- sera discuté en plénière chez les représentants lundi 2 juillet. «Nous avons validé à notre niveau le projet en adoptant 28 sur les 59 amendements formulés par les groupes de la majorité gouvernementale», informe Abdellah Bouanou, président de la commission des finances joint par La Vie éco. Le nouveau projet, qui comprend 97 articles déclinés en 11 chapitres, est une réforme de fond du statut actuel de Bank Al-Maghrib datant de 2006 (voir encadré). Il va de pair avec l’évolution qu’a connue l’environnement aussi bien juridique qu’institutionnel de la Banque centrale, notamment après l’adoption de la constitution en 2011 et la récente réforme des établissements de crédit de 2015. En gros, les nouveaux statuts visent essentiellement à octroyer à l’institut d’émission une autonomie totale en lui conférant des prérogatives en matière de stabilité des prix. De même, ce dispositif consiste à élargir le champ d’intervention de la banque pour inclure notamment la contribution à la protection contre les risques, et la proposition au gouvernement des mesures nécessaires afin de garantir la stabilité financière et d’assurer la liquidité nécessaire aux établissements de crédit.

Débats houleux à la commission des finances

Sensible, central et structurant pour le secteur financier, les banques commerciales, et les instruments de politique monétaire, le texte a naturellement suscité des débats houleux à la commission des finances. Parmi les amendements les plus commentés figure celui apporté à l’article 13 sur la question de l’autonomie et du contrôle. En effet, le concept d’«autonomie totale» a donné lieu à de vifs débats. La première mouture du texte stipule que «dans l’exercice de ses missions, la banque, en la personne du wali de Bank Al-Maghrib, du DG et des membres de son conseil ne peuvent solliciter ou accepter des instructions du gouvernement ou de tiers». L’objectif est à la fois de renforcer la crédibilité de la politique monétaire et d’immuniser la banque centrale contre toute influence d’organismes ou de corporations ou des conflits d’intérêts lors de la prise de décision. Selon les officiels, l’autonomie n’est toutefois pas absolue. A ce titre, l’amendement prévoit le contre-poids à cette autonomie. En effet, elle est assortie d’une exigence de rendre des comptes: le texte dans son article 45 a institué l’obligation faite au gouverneur de rendre compte devant les commissions des finances des deux Chambres du Parlement. Il sera à cet effet entendu par les parlementaires sur la politique monétaire et les autres missions de supervision confiées à BAM.

Ce même article 45 a également suscité plusieurs interrogations. Le projet de loi dispose que le gouverneur de Bank Al-Maghrib est entendu par la ou les commissions permanentes chargées des finances du Parlement, à l’initiative de celles-ci. L’article a été finalement amendé. Il est stipulé dorénavant que le wali présente un exposé sur son rapport annuel, après l’avoir présenté au Roi, devant le comité permanent chargé des finances dans chacune des deux Chambres du Parlement, et peut être appelé à faire une présentation sur la politique monétaire à tout moment. En vertu de cette modification, l’audition du gouverneur ne se limitera plus aux commissions des finances, mais peut aussi s’étendre aux commissions d’enquête.
Par ailleurs, la banque centrale peut, à la demande du gouvernement, participer aux négociations sur les emprunts et les emprunts extérieurs conclus pour l’État après l’amendement de l’article 16.

Les membres du conseil d’administration de l’institut d’émission devront déclarer leur patrimoine

S’agissant de la clarification des attributions de BAM en matière de politique de change, l’article 11 du texte a été également amendé. Il stipule dans sa nouvelle version que l’institut d’émission mène une politique de change dans le cadre du système de changes du pays – arrêté, lui, par décret – et des orientations fixées par le gouvernement après une enquête menée sous la houlette de BAM. Objectif selon les membres de la commission des finances : lier la mise en œuvre de la politique de changes au jeu du marché des changes, tout en protégeant les prérogatives du gouvernement dans la préparation de la politique monétaire (dont la politique de changes) conformément aux dispositions de la Constitution. Plusieurs amendements ont-ils été formulés dans l’objectif de permettre à BAM de contribuer à la prévention du risque systémique et d’adapter les instruments d’intervention à cette mission stratégique, notamment dans des contextes de crises.

Sur un autre registre, l’article 67 a été ajouté et dispose que BAM ne peut pas être garante de la dette bancaire interne ou externe, ni acheter directement ses propres titres de créance ou accorder une aide financière directe. Selon les annotations au texte faites par la commission, il est vital d’éviter toute tendance à remplacer les banques ou à acheter leurs dettes en se servant d’un tel vide juridique.
Enfin, pour garantir la bonne gouvernance de la banque et l’indépendance institutionnelle et personnelle, un article a été ajouté. Il énonce que les membres du conseil d’administration de l’institut d’émission déclarent leurs biens à la date de leur nomination et à la fin de leurs fonctions, conformément à la législation applicable en matière de déclaration de propriété. Sur ce point, les parlementaires invoquent la volonté de soumettre les membres du conseil d’administration au principe constitutionnel de reddition des comptes.

[tabs][tab title = »Les changements apportés par le nouveau statut »]La réforme du statut de BAM est déployée autour de cinq axes. y Renforcement de l’indépendance de la banque/ Le projet de loi prévoit d’attribuer à la banque centrale une autonomie totale en lui conférant le pouvoir de définir l’objectif de stabilité des prix, qui devient son objectif principal, et de conduire la politique monétaire en toute indépendance. y Elargissement de sa mission à la stabilité financière. Le projet de loi propose d’élargir les missions de BAM à la contribution, à la prévention du risque systémique et au renforcement de la stabilité financière et d’adapter ses instruments d’intervention à cette mission. y Clarification des attributions de BAM en matière de politique de change. Compte tenu de l’interaction entre la politique monétaire et la politique de change et afin de se conformer aux meilleures pratiques internationales, le projet de loi précise que BAM met en œuvre la politique du taux de change dans le cadre du régime de change et des orientations fixées par le ministre chargé des finances, après avis de la banque. Dans ce cadre, BAM a été également autorisée à utiliser les réserves de changes dans un objectif de défense ou de préservation de la valeur du dirham en cas de régime de changes flexible. y Renforcement de la bonne gouvernance. Les principales nouveautés du projet de loi visant la consolidation de la bonne gouvernance de la banque concernent l’indépendance institutionnelle et personnelle; l’interdiction pour la banque de solliciter ou d’accepter toutes instructions émanant du gouvernement ou de toute personne; la précision des critères de nomination du wali et du vice-wali et des conditions de leur révocation, ainsi que la limitation de la durée de leur mandat; l’élargissement des incompatibilités relatives aux fonctions des six membres du conseil désignés par le chef du gouvernement aux responsabilités dans des entreprises publiques ou privées et l’élargissement des prérogatives du conseil de la banque. y Contrôle de la banque et répartition des bénéfices. Le projet de loi limite la portée du contrôle du commissaire du gouvernement aux opérations financières et à subordonner la répartition du bénéfice net disponible, après les prélèvements nécessaires, à un accord entre la banque et l’autorité gouvernementale chargée des finances.[/tab][/tabs]