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Le groupe Mundiapolis en cessation de paiement ?

Fondateur et actionnaires le confirment : le groupe traverse une crise financière. A la base un problème de sous-capitalisation pour un projet nécessitant un fonds de roulement important. Abderrahmane Lahlou présenté tantôt comme révoqué, tantôt comme démissionnaire.

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Lahlou MUNDIAPOLIS 2011 05 31

Que se passe-t-il chez le groupe d’enseignement supérieur privé Mundiapolis ? Depuis une semaine les rumeurs circulent au sein de la profession à propos d’une supposée faillite de l’entreprise et du renvoi, par le Conseil d’administration, de son DG et président, Abderrahmane Lahlou, fondateur du groupe, autrefois connu sous le nom de Segepec.
Des informations sans fondement, selon Rajae Bennani, un des principaux actionnaires du groupe, au côté de la famille El Aalj – majoritaire. Selon ce dernier, «Mundiapolis n’est pas en faillite, il traverse effectivement des difficultés financières qui se traduisent par un retard de règlement des factures de certains fournisseurs». Le seul problème résiderait en fait dans une petite crise de trésorerie due à la situation particulière que traverse le groupe qui a consenti un important effort d’investissement au cours des années 2009 et 2010. Il faut en effet rappeler que l’ex-groupe Segepec avait ouvert en septembre dernier un campus à Nouasseur -30 km de Casablanca- au sein duquel il ambitionnait de bâtir la première université privée à Casablanca, offrant 20 filières de formation (voir encadré). Pour la première tranche, l’investissement a été évalué à 90 MDH et c’est ce qui, selon M. Bennani, explique que l’entreprise se sente «financièrement à l’étroit». «Mais, rassure-t-il, les banques ont examiné le plan de redressement et la situation devrait se rétablir sous peu. Quant à M. Lahlou, il a présenté sa démission et c’est son choix personnel».

100 MDH investis dont à peine 10% apportés en fonds propres

Une version contredite par l’intéressé lui-même qui affirme qu’il n’a aucunement présenté une quelconque démission mais confirme que le groupe Mundiapolis se porte effectivement mal. Joint au téléphone par La Vie éco, dans la soirée du mardi 24 mai, M. Lahlou, qui détient 2% du groupe, paraît quelque peu amer par rapport au projet qu’il a fondé. «Mundiapolis traverse une grave crise financière due à la sous-capitalisation du projet. La taille de l’enveloppe investie est très raisonnable par rapport aux projets d’université concurrents, à savoir 100 millions de DH, mais le problème est que la part de financement externe est excessive, à savoir 90 MDH, et qui ont été contractés en leasing. Au démarrage de l’activité, le capital social était encore à 1 MDH au lieu des 25 MDH auxquels la société s’était engagée auprès de l’organisme de crédit-bail. Aujourd’hui, nous sommes au défi de recapitaliser le projet progressivement pour pouvoir contracter le crédit de restructuration nécessaire auprès de la banque. On n’a pas le choix, avant de rentabiliser un projet, il faut mettre la main à la poche».
Rentabilité du projet, c’est peut-être là le nœud du problème qui oppose le fondateur du groupe aux détenteurs de l’essentiel du capital. Selon M. Lahlou, il faudrait au moins 30 MDH d’injection en fonds propres pour que l’entreprise tourne sans difficultés financières. «Or, sur les apports convenus, nous en sommes à peine à un capital de 13 MDH aujourd’hui», précise-t-il. Pour le président, l’équation se résume à un postulat simple. Dans un tel projet, il faut investir et avoir la patience d’attendre, ce qui n’a visiblement pas été le cas des actionnaires à qui M. Lahlou affirme avoir présenté un business plan extrêmement précis, réalisé par une banque d’affaires de la place et présentant un taux de rendement interne de 12%. «Il ne faut pas céder aux tentations court-termistes qui risquent de dégrader la vocation d’excellence qui est l’essence même du Mundiapolis».

Des pressions pour faire baisser les coûts

De fait, devant le resserrement des finances du Mundiapolis, M. Lahlou affirme avoir été l’objet de pressions visant à réduire les coûts par tous les moyens. Réduction de l’effectif des enseignants permanents, suppression de la recherche scientifique ou encore suppression de la double diplomation. «Ce sont les axes sur lesquels j’ai fondé Mundiapolis et je suis fier du bilan accompli en termes de notoriété, de partenariats et d’accréditations. Tout retour sur ces acquis est une menace à la vocation du projet», s’indigne M. Lahlou. Tout porte à croire que deux visions antagonistes s’opposent. Celle du capital, qui voudrait rentabiliser rapidement son investissement et celle du facteur humain qui veut d’abord que l’entreprise serve une vision.
M. Lahlou quittera-t-il le groupe d’ici le 30 juin, comme il se dit au sein de la profession ? «Je n’ai ni été révoqué, ni démissionné, répète l’intéressé. Pour l’heure, je m’emploie à garantir que la vision que nous avons convenue dès le premier jour soit respectée. Sur le plan de la conduite des activités, il n’y a pas d’inquiétude : l’organigramme de l’Université est solide et l’engagement des directeurs et doyens permettent de surmonter la crise sans incidents, de terminer l’année dans de bonnes conditions et surtout d’entamer la campagne dans d’excellentes dispositions»
Mais quid de la suite ? Dans la profession on affirme que c’est le business plan ayant servi de base au projet qui a été réalisé sur la base de prévisions de recettes surestimées. On en veut pour preuve le fait que le groupe ayant déménagé ses activités de Casablanca à Nouasseur, les effectifs d’étudiants prévus n’ont pas été au rendez-vous, notamment en raison d’un coût d’études plus élevé et de frais supplémentaires pour les parents. «Des contraintes qui donnent à réfléchir quand on sait que la concurrence est pléthorique dans le secteur», analyse le patron d’une école supérieure privée. Aux dernières nouvelles, il se dit que les actionnaires chercheraient des repreneurs pour l’affaire. Une information non confirmée, bien entendu.