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«La dynamique positive du PAI se ressent dans une majorité de secteurs industriels» (1er partie)
• Le directeur général de l’industrie au ministère de l’industrie, du commerce et de l’économie verte et numérique revient dans la première partie de ce grand entretien sur le bilan du Plan d’accélération industrielle dès son déploiement jusqu’à ce jour.
• A fin 2019, selon les chiffres de la CNSS, le PAI a permis la création de 504 954 emplois industriels.
• Le responsable du ministère informe que 4 secteurs représentent 75% de l’emploi industriel : l’automobile, le textile, l’agroalimentaire et l’offshoring.

• Quel bilan faites-vous du PAI à ce jour ?
Le bilan est positif, l’industrie nationale a enregistré des progrès substantiels depuis le lancement du PAI. Celui-ci a été pensé en complémentarité des précédents plans nationaux de développement de l’industrie nationale. Il s’inscrit dans la Vision royale d’un Maroc industriel et créateur de valeur.
Lancé en 2014 sous l’égide de S.M. le Roi, que Dieu l’assiste, le PAI ambitionnait de densifier et d’accélérer la production industrielle nationale. Trois objectifs ont été fixés pour 2020 : la création d’emplois, la valeur ajoutée et l’augmentation de nos exportations industrielles.
La création de 500 000 emplois industriels entre 2014 et 2020 était l’objectif principal du PAI. A fin 2019, selon les chiffres de la CNSS, le PAI a permis la création de 504 954 emplois industriels.
La structuration, en partenariat avec les fédérations professionnelles, de plus de 50 écosystèmes au sein de 14 secteurs industriels a permis de renforcer les chaînes de valeur de l’industrie nationale en ciblant en priorité les métiers manquants. Dans le secteur automobile, cette démarche, aux côtés des constructeurs, a permis d’atteindre un taux d’intégration locale des véhicules fabriqués au Maroc de 60%. Les exportations industrielles ont quant à elles augmenté de près de 7% par an entre 2014 et 2019, selon l’Office des changes.
• La dynamique des écosystèmes est le point central de ce plan. Elle a donné des résultats probants dans des secteurs, notamment l’automobile et l’aéronautique dans une moindre mesure, mais pas dans le reste des filières industrielles. Pourquoi ?
Le bilan du PAI montre au contraire que l’industrie dans son ensemble a progressé. Le secteur automobile est certes devenu notre 1er secteur exportateur en 2014, et nous avons pratiquement doublé nos exportations depuis. Celles-ci atteignent plus de 80 milliards de dirhams en 2019. Le secteur a permis de créer 147 712 emplois dans le cadre du PAI, sur un objectif de 90 000 initialement. Si l’automobile a connu une accélération majeure dans le cadre du PAI, cela ne traduit pas le fait que les écosystèmes des autres secteurs n’ont pas donné de très bons résultats.
Le secteur aéronautique a plus que doublé ses exportations depuis le lancement du PAI. Nous sommes passés de 7,5 milliards de dirhams en 2014 à plus de 15,5 milliards à fin 2019, soit une croissance annuelle de 15,7% par an. Le taux d’intégration locale a plus que doublé, et est passé de 17% à 35% entre 2014 et 2019 !
Le lancement des écosystèmes du secteur textile a permis aux opérateurs de résister à la pression concurrentielle des pays à bas coûts et de maintenir un taux de croissance de 2% par an. Le secteur a permis de créer plus de 100 000 emplois sur la période.
Rappelons que 4 secteurs représentent 75% de l’emploi industriel : l’automobile, le textile, l’agroalimentaire et l’offshoring. Ces secteurs ont tous enregistré de très bonnes performances.
En ce qui concernent les autres secteurs, nous relevons aussi de très bons résultats, notamment les IMM où l’emploi a plus que doublé sur la période, ou encore la plasturgie et l’industrie pharmaceutique dont le chiffre d’affaires à l’export a crû respectivement de 77% et 29% entre 2014 et 2019.
• Les contrats de performance ont été conclus pour suivre les objectifs sur lesquels se sont engagés les différents secteurs en terme de chiffre d’affaires, d’export, de valeur ajoutée et d’emplois créés. Quelles conclusions avez-vous fait à ce titre ?
Les contrats de performance signés avec les fédérations professionnelles sont les engagements mutuels pris par le ministère et les industriels pour réaliser les objectifs du PAI. Ils ont permis de préciser les plans d’actions par secteur et par écosystème pour atteindre nos objectifs. La ligne de mire étant la création d’emplois pérennes. Le bilan du PAI montre que la majorité des engagements pris dans le cadre des contrats de performance sont tenus.
• Dans quelle mesure l’industrie marocaine arrive-t-elle, à travers les différentes mesures du PAI, à densifier le tissu industriel, monter dans les chaînes de valeur, et améliorer les taux d’intégration ?
Le principe qui anime les écosystèmes est précisément la densification des chaînes de valeur et donc du tissu industriel. La première phase de structuration de l’écosystème est l’identification des chaînons manquants, des métiers et activités à attirer pour améliorer la performance globale du secteur ou de la filière. C’est ce qui permet de créer davantage de valeur ajoutée et d’améliorer les taux d’intégration. Nous allons chercher ce qui manque en amont, en aval ou comme métier connexe au sein d’un écosystème donné, pour le compléter et le rendre plus compétitif.
• Quelle place occupent les ressources humaines dans le développement de la création de valeur industrielle ?
S.M. Mohammed VI a placé le développement du capital humain en priorité nationale. Le PAI est en droite ligne des instructions royales, le développement des ressources humaines est la pierre angulaire de la construction de nos écosystèmes. Sans nos instituts de formation et nos écoles d’ingénieurs nous n’aurions pas pu développer l’industrie nationale, ni développer des secteurs technologiques à forte valeur ajoutée.
Les industriels internationaux parlent du Maroc comme une zone best cost, et non low cost, précisément parce que le mix compétitif que nous pouvons offrir grâce au niveau de formation des ouvriers spécialisés, des techniciens et des ingénieurs, permet une production à plus forte valeur ajoutée que dans certains pays où les salaires sont plus faibles, mais qui disposent de moins de talents, et d’un système de formation moins adapté.
L’impératif de capitaliser sur les ressources humaines a été identifié dès le démarrage du PAI. Nous avons travaillé avec les opérateurs économiques, et en collaboration avec la formation professionnelle, pour mettre en adéquation emplois et profils, et impliquer les industriels dans les programmes de formation.
• Si les nouveaux métiers sont en pleine dynamique de développement et de consolidation, les industries classiques ne cartonnent pas. Quelle lecture faites-vous à cette dichotomie ?
Le mot dichotomie donne l’impression d’une rupture nette entre les dynamiques sectorielles des écosystèmes, ce qui n’est pas le cas. Nos indicateurs de suivi à fin 2019 sont au vert, et ce pour la majorité des secteurs accompagnés dans le cadre du PAI.
L’industrie agroalimentaire, qui pourrait être considérée comme une industrie «classique» a permis de créer près de 83 000 emplois depuis 2014 et son chiffre d’affaires à l’export a augmenté de 38% entre 2014 et 2019. Nous l’avons vu, la plasturgie et l’industrie pharmaceutique ont fortement progressé. L’industrie électrique-électronique n’est pas en reste, et a vu ses exportations augmenter de 41% sur la période. La dynamique positive se ressent dans une majorité de secteurs industriels.
