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La dette financière des entreprises dépasse 70% du PIB !

La dette financière des entreprises non financières se monte à 716 milliards de DH à fin 2016. Pour les deux tiers, elle est contractée auprès des banques. La composante extérieure représente 19% du PIB.

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Il n’y a pas que les ménages qui ploient sous le poids de l’endettement. La situation des entreprises non financières (ENF), de ce point de vue, est relativement plus préoccupante. Si la dette financière des ménages représente un peu plus de 30% du PIB, soit près de 310 milliards de DH, celle des entreprises dépasse 70% du même dénominateur, soit 716 milliards de DH, selon le dernier rapport sur la stabilité financière de BAM. A eux d’eux, ces deux agents non financiers ont un taux d’endettement supérieur à 100% du PIB, sachant par ailleurs que le taux d’endettement public avoisine les 84% du PIB.

Mais le Maroc ne constitue pas, sur ce point, un cas isolé. C’est le «sort» de pratiquement l’ensemble des économies avancées ; et, depuis une dizaine d’années, de nombreux pays émergents également. Selon le Bulletin du FMI de septembre 2015, la dette des entreprises non financières dans les principaux pays émergents est montée en flèche ces dix dernières années, passant de 4 000 milliards de dollars à…18 000 milliards de dollars entre 2004 et 2014. Cette hausse spectaculaire, précise le FMI, a surtout concerné la Chine, la Turquie, et, à un degré moindre, le Chili, le Brésil, le Mexique, le Pérou, etc.

Cela dit, la structure de la dette des agents non financiers au Maroc est très largement différente de celle que l’on peut observer dans les pays développés. Au Maroc, les ENF sont de loin plus endettées que les ménages, alors que dans de nombreuses économies avancées, les taux d’endettement des ménages et des entreprises sont souvent proches. En Espagne, par exemple, le taux d’endettement des ménages en pourcentage du PIB s’établit à 64,4%, et celui des ENF à 73,8% en 2016, selon un comparatif publié par la Banque de France. Au Royaume-Uni, les ENF ont un taux d’endettement de 60,4%, et les ménage de 86,7%. Aux Etats-Unis, c’est le contraire : 45% pour les ménages et 105% pour les ENF.

Très faible recours au marché financier

Mais à la différence des pays avancés où le marché financier est assez développé, permettant ainsi aux entreprises de se financer par émissions de titres, le Maroc, lui, reste principalement une économie d’endettement ; et à ce titre, c’est le financement intermédié, c’est-à-dire par crédit bancaire, qui y prédomine. En dehors des frais financiers et, éventuellement, d’une allocation peu optimale de l’épargne qui le sous-tendent, le financement bancaire a malgré tout cet avantage qu’il s’opère sous le contrôle de la banque centrale, laquelle, en fonction de la situation économique du pays, peut orienter le crédit, le freiner au besoin ou, au contraire, le promouvoir.

Selon le rapport de BAM, la dette bancaire des ENF représente 67% de leur endettement total, soit 467 milliards de DH, en hausse de 3,7% par rapport à 2015. Et cet endettement est le fait principalement des ENF privées.

La dette obligataire, par contre, totalise un encours ne dépassant pas 30 milliards de DH, en baisse de 11% par rapport à 2015. Et celle-ci est émise à plus de 93% (soit 28 milliards de DH) par les ENF publiques. Le reste de la dette financière des ENF est constitué des emprunts extérieurs, dont le montant n’est pas loin de 200 milliards de DH, l’équivalent de 19% du PIB. Ces emprunts, comme on sait, sont contractés dans leur quasi-totalité (près de 90%) par les entreprises publiques. Et dans le cadre de la réforme du régime de change qui instaure plus de flexibilité, les entreprises de manière générale, celles du secteur public de manière particulière, se trouvent ainsi exposées au risque de change, et le régulateur s’est d’ailleurs fait un devoir de leur rappeler la nécessité de souscrire aux instruments de couverture afin de s’en prémunir.

Enfin, pour compléter le tableau, on ne peut faire l’impasse sur un autre type de dette, celui de la dette commerciale. Il est vrai que celle-ci est aussi un moyen de financement gratuit la plupart du temps (voire tout le temps) pour le débiteur. BAM, dans son rapport sur la stabilité financière, a abordé cette question dans une étude sur un échantillon d’entreprises (voir encadré), et visiblement, il n’y a pas intégré la composante extérieure. Selon les données du ministère des finances, la dette extérieure du secteur privé non garanti par l’Etat, sous forme de crédits commerciaux, s’élève à 72,1 milliards de DH au premier trimestre 2017. Mais on ignore si celle-ci est réglée dans les mêmes conditions que la dette commerciale domestique…

[tabs][tab title = »Délais de paiement : les entreprises ont aussi leur part de responsabilité« ]Les entreprises ne supportent pas que des dettes financières, elles traînent aussi des dettes commerciales, dont, probablement à tort, l’on parle peu. Selon une étude de BAM sur un échantillon de 13 954 entreprises non financières cumulant un chiffre d’affaires de 511 milliards de DH, la dette commerciale de ces ENF en 2015 se chiffrait à 146 milliards de DH, et leur dette financière à 282 milliards de DH. Cette dette commerciale, comme le précise l’étude de BAM, représente 136 jours d’achats en 2015 contre 125 jours en 2012 ! Par segment d’entreprise, la grande entreprise (GE), en raison de son immense pouvoir de négociation, est celle qui maintient des délais de règlement fournisseurs les plus longs : 143 jours d’achats, contre 122 pour la PME et 98 jours pour la TPE. A contrario, les GE ont obtenu les plus courts délais de paiement par leurs clients, avoisinant les 77 jours de chiffres d’affaires en 2015, contre 129 jours pour le PME et 158 jours pour la TPE. Comme quoi, en matière de retards de paiement, tout le monde a sa petite part de responsabilité… [/tab][/tabs]