SUIVEZ-NOUS

Affaires

La CDG perd potentiellement 850 MDH à  cause des subprimes

Les actions cotées sur des Bourses étrangères ont subi le contrecoup de la
crise américaine
La valeur des 10% de Club Med et 5% de TUI acquis par la CDG
à  3,7 milliards de DH ne valaient plus que 2,8 milliards au 29 janvier.

Publié le


Mis à jour le

La crise du subprime (crédit immobilier à  risque), cette tornade venue des Etats-Unis et qui a causé des ravages financiers considérables sur les marchés internationaux, notamment dans le secteur bancaire occidental, a-t-elle fini par toucher le système financier marocain ?

Difficile de répondre avec précision à  cette question qui préoccupe bon nombre d’observateurs économiques, d’autant plus que, depuis le 1er août 2007, les banques marocaines ont été autorisées (circulaires n° 1721 et n° 1722) à  effectuer des placements en devises à  l’étranger. Mais, à  priori, hormis les incidences indirectes, notamment les conséquences d’une récession ou, à  tout le moins, d’un ralentissement économique de certains des partenaires économiques du Maroc (Etats-Unis, France, Allemagne…), rien ne laisse imaginer que nos établissements bancaires ou financiers se seraient aventurés dans des placements financiers aussi audacieux que ceux adossés, par le mécanisme de la titrisation, à  des crédits immobiliers sur les ménages américains les moins solvables.

Au 23 janvier, la perte était de 1,2 milliard de DH
Toutefois, malgré cette prudence supposée ou avérée, cette fameuse crise a quand même causé, dans l’une des plus grandes institutions financières du pays, la CDG (Caisse de dépôt et de gestion), une dépréciation d’actifs qui a atteint 1,2 milliard au 23 janvier, ramenée à  850 MDH à  l’issue de la journée boursière du 29, six jours après ! Cette mésaventure trouve son origine dans les retombées de la crise du subprime sur les Bourses occidentales et asiatiques de la semaine dernière qui ont sombré l’une après l’autre sur fond de spectre de récession. Si les subprimes n’ont pas affecté directement la CDG, elles ont du moins impacté ses placements hors frontières.

En effet, parmi les valeurs touchées figurent le premier groupe européen de tourisme, l’allemand TUI et l’opérateur hôtelier français Club Med. Deux groupes qui comptent la CDG parmi leurs principaux actionnaires. Celle-ci avait ainsi acquis, en juin 2006, une participation de 10% du capital du spécialiste des clubs de vacances haut de gamme en y misant près d’un milliard de DH. Acquise au prix unitaire de 44,9 euros, l’action du Club Med a déçu en 2007 à  cause de résultats en-deçà  des attentes, avant de sombrer en ce début d’année pour atteindre 32,75 euros le 29 janvier 2008, ce qui occasionne une moins-value potentielle pour la CDG de 227 MDH. Idem pour les 5% de TUI, achetés entre mai et juin 2007 au prix global de 2,7 milliards de DH (coût moyen unitaire de 19,5 euros), et dont la valeur de marché a perdu à  la même date plus de 620 MDH.

Certes, les 850 MDH, entre l’une et l’autre des participations, ne sont pas encore une perte consommée (la CDG a fait savoir au moment des prises de participations que son horizon est à  long terme). Ils restent toujours sans commune mesure avec le coût de la crise chez Citigroup (21,2 milliards de dollars), UBS (13,2 milliards de dollars) ou Société Générale (3,34 milliards de dollars). Mais la somme n’en représente pas moins le tiers du dernier bénéfice publié de l’honorable institution marocaine !

Quant aux placements à  l’étranger des banques et autres compagnies d’assurances, on n’en sait rien pour l’instant. Devant le mutisme qui règne sur ce sujet, on ne peut que supputer que tout va bien.
Rappelons que la CDG avait investi 3,7 milliards de DH dans TUI et Club Med dans l’optique de générer «des externalités positives sur l’économie nationale», sachant que, d’une part, le groupe allemand est présent au Maroc dans l’hôtellerie et le réceptif en partenariat avec le groupe Tikida ou, encore plus récemment, dans l’aérien, via Jet4You et, d’autre part, Club Med exploite et gère, aux quatre coins du Royaume, sous sa propre marque, plus de 3 500 lits hôteliers. En clair, la CDG ne visait pas à  faire des plus-values ni même un dividende alléchant à  travers de tels placements à  long terme, mais cherchait plutôt à  stabiliser l’actionnariat de TUI et de Club Med qui pâtissaient d’une structure de capital éclaté, ce qui les rendaient «opéables». Une stabilité dont la contrepartie est naturellement la pérennité des investissements au Maroc.
De telles initiatives justifient-elles de courir le risque de détruire d’importantes réserves de changes pour le pays au cas o๠le placement en actions tournerait au vinaigre ? Cela se discute.