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Indemnité pour perte d’emploi : à  peine 10 000 personnes réellement éligibles

Plus de la moitié des salariés potentiellement bénéficiaires ne pourront pas prétendre à  des indemnisations. Les droits sont ouverts uniquement à  ceux qui ont cotisé 10 mois sur les douze derniers mois civils. Le nombre moyen de mois déclarés en 2012 est de 9.1 par salarié.

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CNSS Perte emploi 2013 12 24

A la veille de son entrée en vigueur prévue pour janvier 2014, l’Indemnité pour perte d’emploi (IPE) ne fait toujours pas l’unanimité. Dans le milieu syndical, on s’interroge encore sur le bien-fondé des conditions d’éligibilité, en particulier sur la période d’activité donnant droit aux indemnités. En effet, selon le texte réglementant l’IPE, l’assuré concerné doit justifier d’une période d’assurance au régime de sécurité sociale d’au moins 780 jours pendant les trois années précédant l’arrêt du travail, dont 260 jours durant les douze derniers mois civils. Et c’est justement ces 260 jours qui, selon une source proche du dossier, font défaut à plus de 50% de la population éligible, laquelle est estimée à 30 000 personnes par la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) sur la base des états déclaratifs annuels.

Cette défaillance s’explique, selon une source syndicale, par la nature des systèmes déclaratifs adoptés par plusieurs secteurs d’activité. D’après les statistiques 2012 de la CNSS, le nombre moyen des mois déclarés est de 9,1, soit 211 jours déclarés par salarié. Ce qui reste en deçà du nombre de jours, 260 jours ou 10 mois, retenu par le texte. La lecture des statistiques 2012 de la CNSS relatives à la durée déclarée par salarié et par secteur laisse apparaître que sur les dix-sept secteurs d’activité considérés, le salarié n’est régulièrement déclaré pour une période de 10 mois que dans 6 secteurs (les activités extra-territoriales, les activités financières, l’administration publique, les industries extractives, la production et distribution d’électricité, de gaz et d’eau et la santé et l’action sociale)  

La moyenne des mois déclarés varie de 7,2 à 9,7 mois pour la plupart des salariés

Pour les autres secteurs comme le bâtiment et travaux publics, l’éducation, le commerce, l’immobilier, les services domestiques, les industries manufacturières, les hôtels et restaurants, l’agriculture, chasse et sylviculture et les transports et télécommunications, la moyenne des mois déclarés varie de 7,2 à 9,7 mois par salarié. Et dans la confection et le bâtiment, la moyenne est même de 6 mois. Ce qui permet de constater qu’avec un tel système déclaratif, il est impossible pour la population éligible de bénéficier de cette indemnité. Quel que soit le scénario retenu (une année pleine ou cumul de deux ans), il est difficile de voir un grand nombre de salariés aligner les 260 jours requis dans ces secteurs caractérisés par la saisonnalité de l’activité ou les contrats précaires.

Pourquoi donc avoir retenu cette condition qui, données de la CNSS à l’appui, s’avère restrictive ? Répondant à cette question, des sources proches du dossier estiment qu’il a fallu faire un arbitrage -malheureux pour les salariés de certains secteurs- pour ne pas imposer un taux de cotisation élevé qui aurait été rejeté par le patronat. La CNSS qui gère l’indemnité pour perte d’emploi prélèvera des cotisations salariales et patronales respectives de 0,19% et 0,38% sur le salaire plafonné à 6 000 DH. Ces cotisations devraient rapporter environ 400 MDH par an. Ce qui couvrirait largement le financement de l’IPE pour la population concernée. Car en raison du caractère restrictif de la condition retenue, le nombre de demandes ne dépassera pas, selon des sources très bien informées, les 10000 dossiers. Pour élargir la population bénéficiaire de l’IPE, des syndicalistes recommandent de s’aligner sur le dispositif de l’indemnité journalière de maladie (IJM). Celui-ci exige une durée de 54 jours déclarés sur les six mois précédant le sinistre. Ce qui risque quand même d’être trop lourd pour le système.