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Ils se sont lancés en plein boom immobilier… que sont devenus les néo-promoteurs ?

Confrontés au ralentissement du marché, ils ont gelé leurs projets ou revu leurs ambitions à  la baisse.

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IMMOBILIER MAROC Invest 2011 09 29

La réussite a beaucoup de pères et l’échec est orphelin. Cette maxime illustre parfaitement la situation qui prévaut dans l’immobilier. En 2007, dans la fièvre d’un marché grisé par la hausse, où tous les excès étaient permis, où la demande semblait ne pas se tarir, nombre d’hommes d’affaires, jusqu’alors actifs dans d’autres secteurs, avaient décidé d’investir dans la pierre en accompagnant leur décision d’une communication publique. Quatre ans plus tard, on est beaucoup moins volontaire pour évoquer des investissements loin d’avoir tenues leurs promesses.
Parmi ceux qui ont accepté de relater leur expérience, le groupe Laraki, dont Univers Motors est l’une des sociétés les plus connues. Au faîte du boom du marché de l’habitat, ce groupe avait carrément décidé d’ériger la promotion immobilière en pôle d’activité à part entière, et un nom avait même été choisi pour la filiale : Univers Stone. Finalement, au lieu de faire cavalier seul, le groupe a préféré aller prudemment en besogne et s’est associé à des spécialistes pour investir dans le balnéaire et le résidentiel moyen standing. Bien lui en a pris car «c’était sans compter avec la complexité du métier et l’atonie de la demande qui s’est fait sentir par la suite», relate Abdelhak Laraki, président d’Univers Motors. Aujourd’hui, il est en train de prospecter pour investir dans le logement social.

Certaines décisions d’investissement n’étaient pas inscrites dans une stratégie à long terme

Plus radicale, la famille Amhal a, elle, décidé de geler ses investissements dans l’immobilier, alors qu’elle nourrissait de grandes ambitions pour le segment professionnel. Mais cette décision n’est pas dictée par la conjoncture, «elle relève plutôt d’un choix personnel», tient à préciser Mustapha Amhal.
Plus par contrainte que par choix, les projets de My Hafid Elalamy, président du groupe Saham, sont également au point mort. L’ex-patron des patrons s’était lancé en 2007 dans la promotion immobilière à travers une filiale de son groupe baptisée «Madinate Zaynab». Celle-ci devait réaliser à Marrakech un complexe constitué de logements et de zones d’activité commerciale. L’investissement prévisionnel était de plus de 200 MDH. Mais le projet est bloqué en raison de «problèmes d’expropriation», fait savoir M. Elalamy. Au tout début de l’aventure, le patron de Saham avait déclaré à La Vie Eco que cet investissement était le premier de son groupe dans l’immobilier «et certainement pas le dernier».

Retour à des marges plus raisonnables

Mais, depuis, son avis sur l’investissement dans la pierre semble bien avoir changé. «L’immobilier n’est pas le seul secteur dans lequel je souhaite investir», affirme-t-il, et conclut qu’il ne faut pas prendre au pied de la lettre l’adage «quand l’immobilier va, tout va». Idem pour Saïd Alj, patron de Sanam Holding (Unimer, VCR…), pour qui l’expérience dans l’immobilier semble avoir contribué à réaffirmer les vocations de base. «L’immobilier ne m’attire pas autant que l’industrie», insiste-t-il. Plus encore, le patron de Sanam amoindrit l’importance des opérations réalisées par son groupe dans le moyen standing et l’immobilier commercial. «Il ne s’agissait que d’investissements d’opportunité, d’une portée insignifiante, pour revaloriser des terrains passés en périmètre urbain», relativise-t-il.
Qu’en est-il maintenant des avocats, médecins et autres hauts cadres du privé qui se sont lancés dans un secteur qu’ils jugeaient prometteur ? «Ils ont déchanté et se sont retrouvés devant des difficultés inattendues», constate Youssef Ibn Mansour, président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (Fnpi). Certains ont fait machine arrière, mais d’autres n’ont pas eu d’autre choix que de s’adapter. Tel est le cas de Yassine Lahlou, qui a créé le «Comptoir des promoteurs» en 2007 avec des investisseurs étrangers. Cet ex-haut cadre  de l’Ona s’est fort opportunément positionné dès le début sur le marché très porteur du logement pour la classe moyenne. Mais le ralentissement intervenu à la mi-2008 a eu des conséquences immédiates. «Les ventes avait diminué et il fallait surveiller la trésorerie parce que les banques sont devenues plus attentives aux risques», confie-t-il. Cela a poussé l’entreprise à être davantage à l’écoute de la demande.
«Au lieu de réduire l’effort d’investissement durant la crise, nous avons misé encore plus sur la qualité des produits, ce qui nous a permis de tenir les objectifs commerciaux dans les moments les plus difficiles», explique M. Lahlou. Il a aussi compris que pour survivre sur un marché plus difficile, il fallait être plus agressif. «Nous avons été les premiers à annoncer à la radio et à la télévision que nous ne prenions pas de noir», soutient-il.
Adaptation à la demande a également été le maître mot pour Omar Naciri qui a fondé et revendu la première entreprise spécialisée dans la viande d’autruches au Maroc. M. Naciri a fait le pari risqué de se lancer dans l’immobilier en pleine crise, en 2009, de surcroît dans le segment du haut standing, avec l’ensemble de villas CasaDiaa, à Bouskoura. Ce promoteur a misé sur l’originalité tout en faisant d’importants efforts sur le rapport qualité/prix. Néanmoins, quelques rééquilibrages se sont imposés. «Nous avons compris qu’il fallait mieux commercialiser le projet par tranche et non pas livrer toutes les villas en une seule fois», indique le patron de CasaDiaa. Il pense qu’il y a toujours matière à investir dans l’immobilier, mais en étant plus raisonnable sur les marges pratiquées et les prestations offertes. C’est la seule manière de survivre dans «un marché où le pouvoir est passé du vendeur à l’acheteur», ajoute M. Lahlou.
Malgré tous les risques, une nouvelle vague d’investisseurs fait ses premiers pas dans l’immobilier avec pour cible le logement social, note le président de la Fnpi. Seulement et, beaucoup l’auront compris, l’immobilier n’est plus ce métier occasionnel où l’on se fait de l’argent très rapidement.