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Huiles usagées : enfin une réglementation pour les 80 000 tonnes déversées dans la nature chaque année

Le secteur n’est soumis à  aucune réglementation ; sur les 90 000 tonnes produites chaque année, seulement 10 000 sont recyclées. 85% de l’activité de collecte, de stockage et de transport sont réalisés de manière informelle.

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HUILES USAGEES MAROC REGLEMENTATION 2011 08 02

En cette fin de mandat, plusieurs départements ministériels mènent une course contre la montre pour faire passer des textes de loi concernant des secteurs en mal de réglementation. Il en est ainsi du ministère de l’énergie et des mines dont le projet de loi sur les huiles usagées a été examiné par le conseil de gouvernement lors de sa réunion du 14 juillet. Et il était temps, car, comme le reconnaissent les responsables de ce ministère, cette activité souffre d’un manque de «réglementation spécifique à même de permettre à l’administration de contrôler effectivement le traitement des huiles en vue de leur élimination ou de leur valorisation». Jusque-là, c’est l’informel qui prévaut dans un secteur aussi sensible et dangereux, car pouvant avoir des répercussions sur la santé des citoyens. Un chiffre qui fait peur : sur les 90 000 tonnes d’huiles usagées qui sont générées par l’activité économique chaque année, à peine 10 000 sont recyclées (raffinées à nouveau). Autrement dit, 80 000 tonnes sont déversées dans la nature et près de 85% de l’activité de stockage, de collecte et de transport sont effectués par des entités non agréées. C’est dire que le vide réglementaire est énorme dans une activité très dangereuse.

Les huiles moteurs et industrielles sont les plus dangereuses

Deux grandes catégories d’huiles usagées sont répertoriées. Il y a les huiles dites noires qui comprennent les huiles moteurs et certaines huiles industrielles comme celles de trempe, de laminage, de tréfilage et celles destinées à l’usinage des métaux. La seconde est constituée des huiles claires qui proviennent des transformateurs, des circuits hydrauliques et des turbines, mais également des huiles alimentaires qui ont servi à la friture. Contrairement aux premières, celles-ci sont peu contaminées, mais n’en restent pas moins dangereuses.
Mais, l’enjeu n’est pas seulement sanitaire. De fait, les huiles usagées ont «un potentiel énergétique important qui en fait des adjuvants de combustion auquel recourent plusieurs secteurs», signale-t-on au ministère de l’énergie et des mines. Ils sont utilisés, entre autres, par les cimenteries, les services, les bains maures et les fours traditionnels.
Selon le ministère de l’énergie, ces huiles usagées constituent un danger pour l’environnement parce qu’elles sont très peu biodégradables et leur rejet dans un milieu naturel provoque des dommages aux écosystèmes et peuvent, par contact, provoquer des maladies chez l’homme. Elles contiennent des substances très toxiques que seule une très haute température peut détruire. C’est pourquoi le projet de loi veut instaurer un contrôle régulier et rigoureux de ces déchets.
Désormais, comme le propose le texte, toute entreprise qui veut effectuer l’activité de collecte des huiles doit être soumise à un enregistrement et à un contrôle au niveau national et éventuellement à un système d’autorisation pour l’installation de traitement à des fins d’élimination ou de valorisation des huiles usagées. Il en va de même pour la collecte, le transport et l’élimination de ces matières nocives.

L’autorisation est délivrée pour 5 ans

Cette autorisation est délivrée par l’autorité gouvernementale chargée de l’environnement. En outre, la collecte et le stockage seront soumis à des conditions réglementaires strictes. Les aires de stockage doivent répondre à des exigences techniques. Les conteneurs et les fûts doivent être rigides, étanches, solides, résistant au claquage et à l’écrasement dans des conditions normales d’utilisation et avoir été fabriqués selon la réglementation et les normes en vigueur en la matière. Ces outils de transport doivent porter la mention «huiles usagées des codes 13-02 et 13-03 du catalogue marocain des déchets» et présenter le sigle international de danger chimique, ainsi que la mention «Produit inflammable». La date de stockage et le lieu d’expédition doivent aussi être mentionnés.
Pour obtenir l’autorisation, l’opérateur doit disposer des installations et équipements adéquats d’une capacité financière suffisante pour l’exercice de cette activité et d’un personnel qualifié et formé à l’exercice des opérations de traitement des huiles usagées.
Il doit en outre se conformer aux nouvelles procédures de contrôle interne visant la gestion écologiquement rationnelle des huiles usagées. L’autorisation pour le traitement des huiles usagées, en vue de leur élimination ou de leur valorisation, est délivrée pour une durée de cinq ans renouvelables dans les mêmes conditions de son octroi. Et les autorités peuvent la retirer si lors d’un contrôle périodique les agents détectent un manquement aux conditions exigées par la loi.
Le projet de loi fixe par ailleurs les modes de traitement autorisés, à savoir la régénération, c’est-à-dire le raffinage, ou l’utilisation industrielle en tant que combustible.