SUIVEZ-NOUS

Affaires

Entretiens de fin d’année : Les critères changent

Les campagnes d’évaluation ont commencé pour certaines entreprises, alors que d’autres ont préféré les reporter pour le début d’année suivante. Le timing des entretiens n’a pas été perturbé.

Publié le

Pendant ces deux dernières années, les entretiens de fin d’année ont été difficiles à organiser pour bon nombre d’entreprises en raison de la crise sanitaire. Face à ce contexte inédit, certaines d’entre elles ont fait l’effort de s’adapter à la réalité en choisissant de repenser leur processus d’évaluation antérieur. D’autres ont envisagé d’adapter le processus de gestion des performances aux fluctuations propres à leur environnement ou encore réévaluer certaines de leurs méthodes de calcul des primes et de fixation des augmentations salariales.
En somme, la priorité était, avant toute chose, de maintenir une cohésion d’entreprise, un climat social serein, de donner du sens au travail quotidien réalisé par les collaborateurs.
Qu’en est-il pour cette année ? Omar Benaini, directeur général du cabinet LMS ORH, souligne à cet effet qu’«en cette période de fin d’année, les DRH ne se précipitent pas pour programmer leur campagne d’évaluation de décembre. Une certaine prudence semble s’installer en attendant d’avoir plus de visibilité sur la situation macroéconomique du pays mais aussi sectorielle propre à chaque entreprise. Sans être remises en cause, les campagnes d’évaluation des performances vont, comme pour l’exercice 2021, glisser de plus en plus vers la fin du premier trimestre de l’année prochaine».
Ceci dit, la demande ne fléchit pas, M. Benaini rajoute également que «le cabinet reçoit des demandes d’accompagnement pour repenser le système d’appréciation annuelle des performances et aider les entreprises à éviter son essoufflement. Nous sommes également sollicités pour dispenser des formations au profit des appréciateurs et des appréciés».
Pour lui, les entretiens annuels, même en période de crise, permettent aux managers de distinguer entre les collaborateurs qui atteignent leurs objectifs et ceux qui peinent à le faire et qui ont besoin d’accompagnement. Les échanges qui en découlent aident à valoriser les salariés, en stimulant leur motivation et leur engagement, ce qui impacte directement la performance globale de l’entreprise.

Trouver de nouvelles façons d’évaluer les collaborateurs
Pour Karima Assili, responsable RH dans une SSII, «si le timing des entretiens n’a pas été perturbé, nous avons opté pour davantage de souplesse dans le contenu, notamment en raison du contexte qui a bousculé l’activité économique et empêché l’atteinte des objectifs fixés des années précédentes». Et d’ajouter : «Les collaborateurs ont comme chaque année un entretien avec leur manager sur les objectifs, ainsi qu’un entretien professionnel. Cela ne change pas, même si on sait que certaines choses n’ont pas pu être complètement réalisées, donc que certains objectifs ne pourront pas être atteints». Même préoccupation pour Amine Zakir, DRH dans une entreprise industrielle : «Nous insistons d’ailleurs chaque année pour que les deux parties prennent le temps de préparer comme il se doit cette rencontre importante. Les supports dédiés sont à la disposition des salariés sur notre portail intranet et les nouveaux managers sont formés à l’organisation et à la gestion de l’entretien annuel», dit-il tout en ajoutant que «notre système d’appréciation a connu une évolution depuis la pandémie. Il consiste aujourd’hui à séparer l’évaluation des performances de l’évolution professionnelle. Ainsi, l’entretien annuel est consacré à l’évaluation des performances et à la tenue du poste, alors que l’entretien de carrière organisé tous les deux ans est dédié aux opportunités de développement professionnel du collaborateur».
Nombreux estiment que la pratique de l’entretien d’évaluation «classique» et dirigée performance n’est plus pertinente. Elle devra davantage être orientée vers une relation plutôt fondée sur l’entraîde, le collaboratif et l’éveil du potentiel en intégrant des composantes de l’environnement du travail en entreprise telles que la qualité de vie au travail, les envies professionnelles à court et moyen terme, la quête de sens au travail et la projection individuelle dans l’organisation.
Il s’agira d’amener plus de fluidité et de proximité entre le manager et son collaborateur, de déceler le potentiel plus que la performance et de privilégier la motivation et l’accompagnement.
D’ailleurs, au-delà de l’entretien annuel, la démocratisation de la culture du feed-back dans les entreprises marocaines pourra également traduire de manière concrète la véritable volonté de l’employeur et du manager de prêter une attention continue et grandissante aux collaborateurs. Le feed-back est un outil intéressant de développement individuel et collectif et aussi un levier pour améliorer la performance et l’engagement des collaborateurs.
Comme il y a eu de nouvelles façons de travailler, il y a et il y aura de nouvelles façons d’évaluer et de valoriser ses troupes.

Les DRH ont du pain sur la planche

Augmentations, primes, bonus…, les deux dernières années ont été frileuses sur les questions financières. Cette année encore, l’inflation frôle les 8%, un niveau inégalé depuis plusieurs décennies, la question du pouvoir d’achat des salariés s’invite désormais au sein des entreprises et devient un incontournable des politiques RH. La question du coût de la vie se transporte ainsi dans le monde du travail et les entreprises sont acculées à intégrer la variable inflation dans leurs prévisions d’augmentation salariales et des primes pour 2023. Les DRH doivent penser à d’autres formules pour atténuer les tensions liées aux questions salariales.

 

Evaluation annuelle : mode opératoire

Si l’entretien d’évaluation est un moment privilégié entre un manager et son collaborateur, il doit aussi être un temps fort pour alimenter la fonction RH en éléments nécessaires à la gestion.

A l’évidence, l’évaluation du personnel ne se réduit pas au simple entretien ou à la fiche d’évaluation annuelle. Le processus d’évaluation, pour être crédible, doit être connecté aux autres processus RH, notamment à la gestion des compétences (évaluation de l’impact des formations suivies et anticipation des besoins en formation, à la gestion de carrière, à la rémunération variable et à l’évolution de la rémunération fixe…).

L’approche peut être réalisable selon différents modèles mais les principes de base sont les mêmes : fixation des objectifs (en déclinaison des objectifs stratégiques et opérationnels de l’entreprise), partage des objectifs et des indicateurs clés de performance avec les collaborateurs individuellement, revue des performances (à fréquence différente), entretien d’évaluation final en fin d’année, revue par le comité d’étalonnage (vérification des écarts, objections, respect ou non des courbes de distribution forcée, etc.), communication de feed-back sur l’évaluation et mise en place des plans de développement individuels.

Certaines entreprises ne suivent pas le processus de A à Z mais ceci reste à la discrétion de la direction générale. En général, le modèle anglo-saxon reste très sensible à la notion de performance et met en place les dispositifs pour à la fois les bonus (pay for performance) et les malus. Là, il faut souligner que le management out (remerciement) à la fin des périodes d’évaluation des performances reste une pratique courante et fréquente en comparaison avec le modèle français.

C’est du sur-mesure

L’évaluation annuelle des performances des salariés se déroule via des entretiens individuels.
C’est du sur-mesure, car les enjeux ne sont pas les mêmes, les sensibilités sont différentes. Les entretiens d’évaluation doivent s’inscrire dans une logique andragogique et pragmatique à la fois. Un traitement de masse (entretiens collectifs) est vivement déconseillé.
En fin de compte on peut déduire qu’une préparation individualisée est nécessaire pour chaque membre de l’équipe tenant compte de sa personnalité.