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Engins BTP : les importateurs du neuf préparent la riposte contre l’occasion
Les distributeurs de matériel neuf ont commandé une étude pour mieux peser dans les négociations avec les pouvoirs publics sur la régulation des importations de matériel d’occasion. Une nouvelle procédure des Douanes impose l’homologation du matériel importé à¢gé de plus de 5 ans, mais elle ne concerne que les engins roulants qui pèsent peu dans le parc national.
Les importateurs de matériel neuf de BTP ont-ils des raisons d’espérer ? Une récente note interne de l’administration des Douanes impose que les engins de travaux publics âgés de plus de cinq ans soient désormais homologués. Pour les distributeurs de machines neuves, dont l’activité est malmenée par le matériel d’occasion depuis des années, cette mesure est la bienvenue.
En effet, les ventes de matériel au niveau domestique ont totalisé 500 unités en 2013 contre plus du double il y a 5 ans, selon l’Aim BTP, association qui rassemble l’essentiel des grands importateurs de matériel neuf, une vingtaine à l’échelle nationale. Parallèlement, les produits d’occasion ont fait une montée fulgurante pour atteindre actuellement 1 500 machines cédées annuellement, soit les trois-quarts de la demande du marché.
La raison en est que «toutes les entreprises européennes en difficulté ou en faillite déversent depuis quelques années leur matériel d’occasion sur le marché marocain, devenu leur principal débouché en Afrique du Nord. L’Algérie et la Tunisie ayant déjà interdit ou fortement régulé leurs importations d’occasion», assure Jaafar Tahiri, président de l’Aim BTP.
Cependant, les professionnels n’espèrent pas beaucoup de cette nouvelle procédure de la Douane. S’appuyant sur le décret d’application du Code de la route, celle-ci ne concerne que les engins roulants appelés à circuler sur la voie publique. Or, ceux-ci ne constituent que 5% du parc d’engins utilisés au niveau national, selon les estimations de l’Aim BTP. Tout le reste qui consiste en machines de chantiers (pelleteuses, chargeuses, bulldozers…) continue donc à n’être soumis à aucune obligation d’homologation.
Ils veulent faire adopterdes normes pour l’importation de matériels d’occasion
Cette portée limitée de la nouvelle procédure décide l’Aim BTP à poursuivre son action, entamée il y a quelques mois, en vue d’une meilleure réglementation des importations de matériel de BTP. A ce propos, l’association vient de mandater un cabinet de conseil pour la réalisation d’une étude stratégique et prospective du secteur des engins de BTP.
L’idée est de démontrer l’intérêt de la régulation de l’importation de matériels de travaux publics au Maroc afin de convaincre les pouvoirs publics d’adopter des mesures dans ce sens.
En attendant d’y venir, l’Aim BTP a déjà eu l’occasion de roder son argumentaire lors de récents contacts avec les ministères de l’équipement et de l’industrie. «Les importateurs de matériel d’occasion sont soit des entreprises individuelles, soit des personnes physiques qui évoluent dans l’informel», assure le président de l’association.
Cela a son corollaire de problèmes tels que l’absence de garantie et de service après-vente sur les produits importés, leur manque de productivité et l’impact sur l’environnement du fait de la vétusté du matériel… La parade proposée à cet effet consiste à réglementer les importations du matériel d’occasion sur la base de normes sur le plan technologique, environnemental, de fiabilité de maintenance…
Plus que le simple contrôle des importations, l’Aim BTP défend l’idée d’organiser le marché intérieur de l’occasion par l’implication des concessionnaires et des entreprises structurées qui peuvent offrir les garanties nécessaires de maintenance, d’entretien… Sur un autre plan, les professionnels souhaitent rallier les sociétés de financement à leur cause afin qu’elles ne couvrent plus que l’achat de matériel neuf ou le matériel d’occasion garanti par le fournisseur agréé.
Accessoirement, toutes ces conditions sont de nature à accroître la taille critique du marché national des engins de BTP, ce qui devrait raviver l’intérêt des multinationales du secteur. Pour l’heure, «avec 500 machines neuves vendues par an, le marché domestique reste très peu attractif avec des volumes de vente comparables à ceux de l’Ethiopie», informe M. Tahiri. Si la demande s’accroît, les constructeurs investiront et pourront faire du Maroc un hub logistique et régional pour l’Afrique, avance le président. Il évoque même l’implantation de chaînes de montage locales dans une seconde phase de développement.