Affaires
Encore une hausse des prix des boissons alcoolisées !
Les augmentations vont de 3 à 10% selon les produits. Producteurs et importateurs invoquent une décision unilatérale des grandes surfaces d’augmenter leurs marges. Sur certains produits, ces marges seraient passées de 14% à 25%. Des fournisseurs disent subir des pressions pour réduire leurs prix.

L’alcool est devenu encore une fois plus cher. Depuis quelques semaines, les prix des boissons alcoolisées, qu’elles soient importées ou fabriquées localement, ont enregistré des hausses conséquentes allant de quelques dirhams pour la bière (entre 1 et 2 DH, selon la marque) à quelques dizaines de dirhams pour les spiritueux et les vins haut de gamme, soit de 3% à 10%. Cette situation en a surpris plus d’un, vu que, généralement, les hausses de prix font très souvent suite à des décisions gouvernementales, relatives à la Taxe intérieure sur la consommation (TIC) par exemple.
Interpellés sur les raisons de cette décision, les importateurs et producteurs dégagent toute responsabilité. Certains d’entre eux expliquent que «les prix facturés aux distributeurs n’ont pas changé» et accusent ces derniers d’avoir décidé «unilatéralement de relever leurs prix». En fait, bien qu’aucune des sources contactées n’ait accepté de témoigner à visage découvert, le sujet de l’alcool étant vraisemblablement toujours aussi tabou que par le passé, toutes s’accordent à dire que ce sont les grandes surfaces qui ont pris l’initiative à partir du mois de septembre. «Moi-même je fus surpris qu’un chef de rayon alcool me contacte pour demander des explications sur la nouvelle grille tarifaire qui lui a été remise par sa hiérarchie», témoigne un importateur. Les directions des magasins semblent donc avoir arrêté les prix sans même en informer les chefs de rayons. C’est d’ailleurs ce qui explique que plusieurs clients des grandes surfaces ont eu comme explication que «ce sont les producteurs et importateurs qui en avaient pris la décision» de faire mousser les prix.
En fait, d’après notre enquête auprès de plusieurs distributeurs, il s’avère que le processus a été entamé depuis que Marjane (et Acima) a décidé de relever ses prix au début du mois de septembre. La généralisation de la décision a néanmoins pris du temps, parce qu’il fallait écouler les stocks.
La hausse des prix permet de compenser la baisse de la demande
D’autres grandes surfaces ont suivi, notamment Carrefour et Atacadao. A l’heure où nous mettions sous presse, Marjane Holding n’avait pas encore répondu à nos questions. Mais selon un spécialiste de la grande distribution, la démarche du leader de la distribution moderne -s’il s’avère qu’il est réellement à l’origine de la hausse- est une bouffée d’oxygène pour la concurrence. «Quand un opérateur qui réalise la plus grande part de marché revoit ses prix à la hausse, cela soulage ses challengers qui peuvent revoir également leur prix à la hausse sans pour autant perdre en compétitivité», explique-t-il.
Ce qui est sûr, c’est que la décision ne plaît pas forcément aux fournisseurs des grandes surfaces. «Ceci tombe mal dans le contexte actuel du secteur», s’indigne un importateur. L’année 2013 est particulièrement difficile; la baisse de la demande enregistrée en 2012 semble se poursuivre, entre autres, du fait de la coïncidence de Ramadan avec la période estivale. D’ailleurs, certains fournisseurs rapportent que sur certains produits, la baisse des ventes frôle les 40%. Bien entendu, tous ne sont pas logés à la même enseigne, mais il y en a beaucoup qui souffrent. «Nous avons à maintes reprises été sollicités pour réduire nos prix ou rallonger les périodes de promotion afin de compenser la baisse de la demande», explique un autre opérateur, qui avoue son désarroi face aux grandes surfaces qui ont augmenté leurs marges (passées de 14% à 25%, selon des producteurs et importateurs) alors qu’en parallèle il lui est demandé de baisser les siennes.
En tout cas, un effet boule de neige n’est pas exclu. En effet, les petits commerces, principalement ceux qui s’approvisionnent dans les grandes surfaces, devraient suivre le mouvement. Certains fournisseurs peuvent aussi en faire autant pour compenser la baisse d’activité, d’où un risque de fuite en avant. «Tout dépend de la stratégie marketing de l’opérateur. Avec une part de marché confortable, un opérateur peut se contenter de maintenir les prix à leur niveau. C’est par exemple notre cas», tempère le responsable marketing d’un producteur d’alcool.
