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Electricité propre : le marché libre arrive

La production électrique basse tension est libéralisée après l’amendement apporté à  la loi sur les énergies renouvelables. Le décret sur l’accès de la moyenne tension au réseau électrique sera adopté dans quelques jours.

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Electricite propre 2015 09 29

Le secteur de l’électricité a franchi ces dernières semaines des étapes importantes sur la voie de la libéralisation. Coup sur coup, il y eut d’abord, fin août, l’amendement de la loi 13-09 sur les énergies renouvelables, qui consacre désormais l’ouverture de la basse tension au réseau électrique, à l’instar de la haute, très haute et moyenne tension ; puis, le 17 septembre courant, l’adoption en conseil de gouvernement du projet de loi (n° 48 15) portant création d’une autorité nationale de régulation de l’électricité (ANRE). 

Ce dernier point en particulier vient couronner le processus d’ouverture au privé de la production et de la distribution d’électricité, entamé voici plus d’une quinzaine d’années. Dans un premier temps, il faut le rappeler, cette ouverture était limitée à la production concessionnelle (Jorf Lasfar, par exemple) dont l’acheteur exclusif était l’ONEE, ainsi qu’à la gestion déléguée en matière de distribution (Lydec, entre autres). Puis, avec la loi sur les énergies renouvelables de 2010, les investisseurs privés avaient été autorisés à construire des centrales (de source renouvelable) et à vendre directement aux consommateurs, via le réseau électrique national ou le réseau de distribution. Et cependant cette autorisation n’était effective que pour la haute et très haute tension ; l’accès de la moyenne tension au réseau ayant été subordonné à la promulgation d’un décret d’application de la loi 13-09, tandis que la basse tension n’était guère concernée par ce dispositif.

Le texte réglementaire sur la basse tension devrait être promulgué vers fin 2015

Les choses ont donc évolué depuis quelques semaines : le privé intéressé par la production d’électricité basse tension à partir des sources renouvelables a désormais la possibilité d’utiliser le réseau de distribution existant pour écouler sa production. Comme pour la moyenne tension, il faudra là encore un texte d’application pour la mise en œuvre de cette nouvelle disposition de la loi 13-09. Selon les dernières informations obtenues par La Vie éco, le décret, tant attendu, sur l’accès de la moyenne tension au réseau est fin prêt, il sera soumis au prochain conseil de gouvernement (probablement le jeudi d’après l’Aid). Le texte réglementaire sur la basse tension, lui, devrait être promulgué vers la fin de l’année 2015 ou début 2016.

Notre source précise toutefois que l’accès de la moyenne tension au réseau se fera «de manière progressive» ; c’est-à-dire en fonction de la capacité du réseau à supporter l’énergie supplémentaire produite. En termes plus clairs, la nécessité de maintenir et de garantir la stabilité du réseau impose d’adapter les capacités de production à celles du transport et de la distribution. Pour cela, les pouvoirs publics, principalement le régulateur et les gestionnaires de réseaux, auront à définir les capacités additionnelles en moyenne tension (et en basse tension, le moment venu) à injecter dans le réseau, sur la base des évolutions que connaîtra celui-ci. Soit dit en passant, l’ONEE a lancé depuis quelque temps déjà un important programme d’investissement pour le développement et le renforcement de son réseau de transport, précisément en lien avec l’arrivée de nouveaux producteurs, en particulier dans les énergies renouvelables.

A partir de là, on peut dire qu’il existe désormais un marché libre de l’électricité. Et comme pour tous les marchés (financiers ou des télécoms, par exemple), il faut un régulateur. Car c’est l’existence de ce dernier qui, moyennant des règles et des procédures à respecter par tous, devrait permettre aux acteurs du marché d’évoluer dans un environnement concurrentiel sain. 

Avec la finalisation puis l’adoption en conseil de gouvernement de la loi 48-15, ce régulateur a pris forme (voir encadré). Il est, selon le ministère de l’énergie et des mines, le fruit de concertations avec les parties prenantes du marché de l’électricité, et répond par ailleurs aux orientations de la Constitution de 2011 et aux prescriptions du schéma national de régulation du secteur électrique adopté en 2012 par les opérateurs et les départements ministériels concernés.  

De ce point de vue, le marché de l’électricité de source renouvelable devrait connaître des développements significatifs ; l’avènement d’une autorité de régulation étant censé rassurer les investisseurs de la non-discrimination à la fois dans l’accès au réseau et dans les tarifs qui seront fixés pour cet accès. Sur le plan macroéconomique, l’impact n’en sera que bénéfique. La dépendance énergétique du Maroc, qui se situe à hauteur de 95% (en 2014), avec ses conséquences sur la balance des paiements et les équilibres extérieurs, devrait en effet être réduite sensiblement après la mise en œuvre de l’ensemble du dispositif et son démarrage effectif.

Objectif : ramener le taux de dépendance à 85,4% à l’horizon 2025

L’objectif fixé dans la stratégie énergétique nationale de ramener le taux de dépendance à 85,4% à l’horizon 2025, aussi ambitieux qu’il est, paraît en tout cas tout à fait réalisable. C’est le lieu de rappeler ici que la capacité électrique installée de source renouvelable représente aujourd’hui 33% (soit 2670 MW) de la puissance totale installée dans le pays. Il est vrai que plus des deux tiers (66,3%) de cette capacité de source renouvelable sont constitués d’unités hydroélectriques. Par conséquent, les aléas liés à la pluviométrie, dans un pays classé semi-aride, font que le niveau de la production ne reflète pas toujours celui de la capacité installée. Le tiers restant de la puissance installée de source renouvelable, c’est bien sûr l’éolien : 900 MW (soit 33,7%), selon les dernières indications obtenues auprès du ministère de l’énergie et des mines. 

On note tout de même que si la production de source hydraulique connaît des variations en lien notamment avec la pluviométrie (en 2012 par exemple elle a baissé de 15% par rapport à 2011), celle de l’éolien progresse année après année : +41,8% à 1924 GWh en 2014. 

Bien entendu, l’éolien est également soumis aux aléas du vent, mais c’est une technologie qui a fait ses preuves ; l’illustration en est qu’en 2014 le parc éolien mondial a enregistré une croissance record : +44% à 369,5 GW (369 500 MW). 38,5% de cette capacité totale se trouve en Asie, soit 142 GW (142 000 MW), dont 115 GW (115 000 MW) en Chine. L’éolien est la deuxième plus importante source d’énergie renouvelable dans le monde, en termes de capacité installée, après l’hydraulique. On peut dire autant pour le solaire, notamment photovoltaïque. Selon les objectifs fixés dans la stratégie énergétique nationale, 42% des besoins d’électricité seront satisfaits par des unités de production de source renouvelable. La mise en concurrence des acteurs, qui s’installe désormais, pourra y contribuer efficacement.