Affaires
Don d’organes : un projet de loi pour lever l’interdiction des prélèvements sur les mineurs
Le ministère de la santé prévoit 250 transplantations de reins et 1 000 greffes de cornée d’ici 2020. Une soixantaine de personnes sont inscrites sur le registre national des donneurs d’organes n Depuis 1999, 256 greffes du rein et 2 600 de la cornée ont été effectuées au Maroc.

Un projet de loi vient d’être adopté au Conseil du gouvernement pour compléter l’article 11 de la loi 16-98 du 25 août 1999 réglementant le don d’organes et de tissus humains. Cet article, faut-il le préciser, interdit tout prélèvement sur une personne mineure vivante ou sur une personne majeure faisant l’objet d’une protection légale en vue d’une transplantation. Le projet lève cette interdiction et stipule qu’«en l’absence d’alternative thérapeutique, l’autorité gouvernementale compétente peut, après avis du Conseil consultatif de transplantation d’organes humains, autoriser le prélèvement de cellules souches hématopoïétiques sur une personne vivante mineure au profit de son frère ou de sa sœur, sous réserve de la réunion de conditions précises». Les conditions portent sur le consentement de chacun des parents, l’absence de tout risque réel ou éventuel, l’inexistence dans la famille d’un donneur majeur et l’information du donneur mineur sur le prélèvement.
Cet amendement répond à une doléance du Conseil consultatif de transplantation d’organes humains qui estime que «les prélèvements sur les mineurs permettront d’élargir les greffes de moelles osseuses d’une façon générale et en particulier dans le secteur médical privé». Il importe de souligner que le privé est habilité seulement à pratiquer la greffe des tissus contrairement au secteur public qui peut prélever et greffer l’organe et le tissu humain comme il est également autorisé à importer des greffons de tissus.
Dans le milieu médical, on pense que ce projet de loi est une «bonne initiative car elle permettra au Maroc de se développer sur ce registre». En effet, le Royaume est jugé mauvais élève dans le domaine de la transplantation des dons d’organes et de tissus humains dans la région du Maghreb. D’après les chiffres du ministère de la santé, on comptait 0,4 donneur par million d’habitants. En Tunisie, ce taux est quatre fois plus important, soit 1,6 donneur par million d’habitants. L’Europe est à un niveau encore plus élevé. A titre d’exemple, en France, il y a 40 donneurs par million d’habitants. La transplantation d’organes et de tissus reste donc bien en dessous des besoins épidémiologiques du Maroc et des résultats espérés par les médecins : 25 greffes par an par million d’habitants. Maintenant, il semble qu’il y a une plus grande prise de conscience. Aujourd’hui, une soixantaine de personnes sont inscrites sur le registre national des donneurs d’organes mais au regard de la loi, il n’est pas sûr qu’on puisse un jour se servir de leurs organes pour sauver des vies (voir encadré).
Absence d’une culture du don d’organes
Expliquant la faiblesse de ces chiffres, le ministère de la santé avance «l’absence d’une culture du don d’organes» bien que, selon le ministère des habous et des affaires islamiques, «l’Islam autorise le don d’organes quand il s’agit de sauver une vie humaine».
Légalisé en 1999, le don d’organes et la transplantation ont été au centre d’un plan d’action 2011-2013 mis en place par les pouvoirs publics en vue de promouvoir la greffe d’organes qui porte essentiellement sur le rein et la cornée ainsi que la moelle épinière. L’objectif du ministère de la santé est de réaliser 250 transplantations de reins et 1 000 greffes de la cornée par an d’ici 2020.
Pour l’heure, on comptabilise 256 greffes du rein, dont 156 effectuées à Casablanca, et 2 600 greffes de la cornée, dont 1 500 à Rabat. Il est à noter que ce type de greffe se fait à partir de cornées importées dans le cadre de conventions signées avec la banque de Besançon ou encore la banque américaine de cornées. Cependant, il faut souligner que huit greffes ont été faites à partir de donneurs cadavériques à Marrakech. Et la création en 2011 de la Banque des yeux à Marrakech devrait permettre l’augmentation du nombre de greffes. D’après les données ministérielles, près de 3000 personnes sont actuellement en attente d’une cornée. Par ailleurs, les greffes de la moelle osseuse sont de l’ordre de 175, toutes réalisées à Casablanca.
