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Affaires

Des cessions de parts publiques pour renflouer les caisses mais pas de privatisations

Le gouvernement prévoit pour 2010 une recette de 4 milliards de DH au titre des cessions de participations de l’Etat.
La liste des privatisables est devenue rachitique, mais de nouvelles entreprises pourraient y figurer.

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Cela fait deux ans (2008 et 2009) qu’aucune privatisation, au sens de la loi 38-89, consistant pour l’Etat à céder la majorité, le contrôle d’une de ses entreprises publiques n’a eu lieu. Pour autant, le portefeuille public n’est pas resté inamovible : celui-ci a enregistré à la fois des entrées (au nombre de 42) et des sorties (21).  Comment ses sorties sont-elles réalisées ? Par la cession des participations publiques. C’est ce mode opératoire qui a été retenu dans le projet de Loi de finances 2010 et qui devrait générer, au titre des recettes du Budget général, 4 milliards de DH.
Quelle est la différence, dira-t-on, entre privatisation et cession des participations publiques ? Dans le premier cas, il existe toute une procédure, souvent longue (d’audit, d’évaluation, d’appel à manifestation d’intérêt, d’appel d’offres, de réunion de la commission des transferts, etc.), alors que dans le second cas, l’opération peut être bouclée rapidement puisqu’il n’y a pas obligation d’appel d’offres, la cession de parts étant généralement octroyée à un actionnaire ayant déjà la majorité ou par voie du marché des actions (Bourse).
Mais si les pouvoirs publics ont choisi désormais, pour renflouer le Budget de l’Etat, la formule de cession plutôt que celle des privatisations, c’est aussi parce que sur la liste des privatisables il ne reste pas grand-chose de particulièrement significatif. En effet, la liste des privatisables comporte notamment Biopharma (Société de productions biologiques et pharmaceutiques vétérinaires), Sonacos (Société nationale de commercialisation des semences), Sococharbo (Société commerciale de charbon et bois), BTNA (Briqueterie, tuilerie nord-africaine), SCS (Société chérifienne des sels), SSM (Société des sels de Mohammédia), Marsa Maroc… Les responsables du dossier pourraient d’ailleurs ajouter à la liste de nouvelles entités à privatiser ; elles en sont actuellement au stade de prospection.

Bientôt une banque d’affaires pour la privatisation de Marsa Maroc
Est-ce que ces sociétés seront privatisées en 2010 ? Rien n’est moins sûr. Certes, pour Marsa Maroc, le choix de la banque d’affaires qui s’occupera de l’auditer et de l’évaluer, est attendu dans les prochaines semaines, tandis que pour les six autres, les dossiers sont déjà pratiquement ficelés, comme l’indique un responsable à la direction des entreprises publiques et de  la privatisation (DEPP).
Pour autant, cela dépendra du marché. Et compte tenu de la morosité de la conjoncture, dont l’une des conséquences est le peu d’empressement des investisseurs à placer leur argent, ici ou ailleurs du reste, le passage de ces entités dans le giron du privé n’est pas acquis. Une fois de plus, c’est bien pour cette raison que le gouvernement a tablé sur la cession des participations publiques plutôt que sur les privatisations.
En réalité, même si le processus de transfert au privé n’est pas le même dans les deux cas, cela ne constitue pas, dans le contexte d’aujourd’hui et même dans celui de 2010, un gage que les cessions seront plus faciles que les privatisations.
Le ministère des finances sait naturellement tout cela, mieux, il a une solution de rechange qui lui permettrait, en cas de besoin, d’obtenir plus que les 4 milliards budgétisés : céder une partie ou l’ensemble de ces participations dans une ou des entreprises dont la valeur est liquide. C’est le cas par exemple de Maroc Telecom où l’Etat détient encore 30%, ou encore de la BCP où la participation est de 43,29%. Le gouvernement pourrait aussi choisir de céder les participations minoritaires qu’il détient encore dans les quatre sucreries acquises par Cosumar. C’est dire que, s’il s’agit simplement de faire rentrer dans les caisses la recette inscrite dans le projet de Budget 2010, la marge de manœuvre est tout de même assez grande. Et néanmoins, il semble bien que le choix de céder tout ou partie des participations publiques dans Maroc Telecom soit le plus probable. Pour au moins deux raisons : d’une part, l’opération, comme déjà indiquée, est rapidement réalisable, et, d’autre part, le titre est très recommandé à l’achat. Avec une cession de seulement 10% des 264 millions d’actions qu’il détient dans l’opérateur historique de téléphonie, le Trésor a déjà les 4 milliards de DH prévus à ce titre – sur la base de la cotation actuelle évidemment. S’il devait vendre la totalité de ses parts, l’Etat empocherait 37 milliards de DH.
Ce scénario, ils sont nombreux à lui donner crédit, eu égard au déficit budgétaire prévisible qui est déjà relativement important (4 %) et qu’il ne faudrait surtout pas creuser davantage par une recette moindre provenant de ce type d’opération ; le FMI, dont une équipe est en tournée au Maroc, ayant recommandé au gouvernement, comme il en a l’habitude, d’essayer de comprimer un peu plus ce déficit.
Mais à vrai dire, il ne s’agit là que d’un déficit prévisible et surtout découlant de la hausse des investissements budgétaires au moment où les recettes fiscales, elles, reculent. Rien ne garantit que l’ensemble des investissements seront réalisés, et cela arrive d’ailleurs plus souvent qu’on le croit.