Affaires
Comment le CIH est arrivé au terme de sa période d’assainissement
2010 a été l’année du grand nettoyage pour la banque. Au premier semestre 2011, le coût du risque a fondu de 80% contre une hausse de 37% pour le marché. Quelques chantiers résiduels devraient être dénoués avant fin 2011. Un des objectifs du management est d’alléger le poids de l’immobilier dans son activité.

A l’occasion de la publication des résultats semestriels, la communauté financière a accueilli avec surprise la baisse sensible du coût du risque du Crédit immobilier et hôtelier (CIH). Il faut dire que ce coût, inhérent principalement au provisionnement des créances en souffrance, a fondu de 80% par rapport à juin 2010 (sur une base consolidée), alors qu’il a connu en même temps une croissance de plus de 37% au niveau du secteur. Pour une banque grevée par un lourd héritage depuis plus d’une décennie, cela a effectivement de quoi étonner. «Nous avions bien insisté sur le fait que 2010 serait une année de grand assainissement, nous en récoltons naturellement les fruits à présent», répond simplement Lotfi Sekkat, directeur général délégué du CIH. «Avec seulement 57 millions de DH de provisions pour créances en souffrance actuellement, nous affichons enfin le coût du risque qui correspond à notre activité récurrente», ajoute-t-il. Tout un chemin parcouru, donc, depuis les années 2000 où les créances en souffrance du CIH culminaient à plusieurs milliards de DH !
L’ajournement de certains investissements et des départs négociés ont permis de réaliser des économies
Il faut dire qu’à sa nomination à la tête du CIH, en octobre 2009, Ahmed Rahhou a fait de l’accélération de l’assainissement de la banque une priorité. Dans ce sillage, en 2010, 270 MDH sont d’abord déployés pour régler un dossier fiscal portant sur la période 2000-2007 et pour provisionner le contentieux historique. Mais aussi pour couvrir les charges de la cession, la même année, de sept actifs hôteliers à la CDG (Lido, Paradise, Tichka Ouarzazate…). Cette dernière transaction a, en soi, marqué un changement de cap pour le CIH. En effet, «jusqu’à il y a quelques années, il arrivait à la banque d’attendre la liquidation judiciaire d’actifs hôteliers sur lesquels des créances sont détenues», rappelle Kamal Agzenai, DGA en charge du capital humain. «En plus de son caractère laborieux, cette démarche ne donnait lieu qu’à des remboursements minimes de créances», justifie-t-il. C’est ainsi que le levier de la cession est aujourd’hui exploité, surtout qu’il peut s’avérer avantageux, à l’exemple des hôtels cédés à la CDG qui ont abouti au final à un gain économique de plus de 26 MDH.
Pour la suite, le top management de la banque étudie plusieurs scénarios pour assainir sa situation dans d’autres établissements hôteliers qu’il détient toujours. «Ces actifs pourront autant faire l’objet de cession que de prise de participation, mais en aucun cas ils ne sont voués à être liquidés», affirme M. Agzenai. En plus de l’effort consenti pour nettoyer les comptes, l’assainissement a aussi consisté en des actions opérationnelles. Entre autres décisions majeures, M. Rahhou a, trois mois après sa nomination, stoppé un investissement de 450 MDH dans un système informatique, et préféré passer en pertes les frais d’étude engagés jusqu’alors. «Ce système était surdimensionné par rapport aux besoins de la banque», explique M. Sekkat. Sur le même registre, le management de la banque a facilité les départs de personnel que l’on cherchait jusqu’à il y a quelques années à contenir par souci d’économies. «L’effet sur la productivité s’en ressent nettement», note M. Agzenai.
La part des crédits aux entreprises dans l’encours global a crû de 12%
Pour autant, la page de l’assainissement est-elle définitivement tournée? On y est presque. Dans sa communication officielle pour ce premier semestre, le CIH fait en effet état de «quelques chantiers résiduels avec un dénouement probable fin 2011». Il s’agit, entre autres, de créances dues à l’Etat remontant à plusieurs années ou encore les quelques hôtels en redressement judiciaire dans le périmètre de la banque évoqués précédemment. Mais ces chantiers sont «maîtrisés et seront sans impact sur le compte du résultat de l’exercice 2011», assure M. Sekkat. Il se peut même que ces dossiers génèrent des retours positifs plutôt que des coûts pour l’exercice 2012.
N’empêche que certains analystes restent prudents, en attendant les résultats définitifs de l’exercice 2011, le CIH étant assez engagé sur le secteur de la promotion immobilière qui connaît un ralentissement persistant. Réduire la dépendance du secteur immobilier figure justement dans l’autre volet majeur de la stratégie de la banque, qui mise sur le développement de la «banque universelle». A ce titre, il est espéré que le rachat de Sofac soit entériné avant la fin de l’année pour développer le segment du crédit à la consommation.
En outre, ce nouveau positionnement a connu plusieurs avancées récentes, notamment à travers des actions pour l’amélioration de la qualité de service (mise en portefeuille et segmentation de la clientèle, reengineering des process agences…) et la maîtrise des risques (finalisation du système de notation interne…). Mais surtout, le CIH amorce une phase plus offensive de son plan pour réussir son incursion sur le marché du corporate. Et même si elle en est encore à ses toutes premières étapes, la démarche commence déjà à porter ses fruits.
Au cours du premier semestre 2011, la part des crédits aux entreprises dans l’encours global des crédits a augmenté de 12%, quand celle des crédits immobiliers a reculé 0,7%.
