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Affaires

Casablanca peine à  récupérer son patrimoine immobilier !

Sur une longue liste de biens, la commission chargée du patrimoine a ciblé 5 établissements mais n’a pas encore réussi à  les vider. Le groupe Chaabi, locataire de l’ancien marché de gros, a obtenu en référé l’arrêt de la procédure d’expulsion. Les occupants de la Sqala, du Paradise, du complexe sportif de Zenata et du complexe de tennis Moulay Rachid refusent de quitter les lieux.

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patrimoine casablanca 2014 09 29

Le dossier de la revalorisation du patrimoine de Casablanca est loin d’être classé. Et comme dans plusieurs cas, les divergences politiques prennent très rapidement le dessus sur la concertation. Sur ce dossier, certains élus imputent carrément le blocage au maire Mohamed Sajid. «Le président du Conseil de la ville refuse depuis des mois de signer les convocations relatives à la réunion de la commission chargée du patrimoine de la capitale économique», avance Aziz Moumen, conseiller communal. En réponse à cette accusation, Ahmed Brija, premier vice-président du Conseil de la ville, assure que «pour le moment la réunion de la commission ne servira à rien parce que le département qui assure le suivi du dossier a déjà entamé les procédures administratives et judiciaires pour récupérer une partie des biens de la ville». En effet, d’après les documents du Conseil de la ville que La Vie éco a pu consulter, le département a entamé toutes les procédures légales nécessaires. Actuellement, il ne reste que la décision de Khalid Safir, wali du Grand Casablanca, pour l’expulsion des concessionnaires.

Le manque à gagner pour la ville est estimé à un milliard de DH par an

C’est en 2013 qu’une commission créée par le Conseil de la ville de Casablanca afin d’évaluer le patrimoine de la métropole a publié son rapport. Sur ce qu’elle a pu analyser, elle évalue le manque à gagner pour la ville à un milliard de DH par an. Dans l’objectif de revaloriser ce patrimoine, la commission a décidé de commencer par les dossiers les plus emblématiques. Elle a choisi donc la Sqala, le complexe Lido (le Paradise), l’ancien marché de gros, le complexe sportif de Zenata et ses annexes, et le complexe de tennis Moulay Rachid et ses annexes.

Lors de l’assemblée générale ordinaire d’octobre 2013, le conseil a examiné ces dossiers et voté la décision de résiliation desdits contrats de concession. Ainsi, «après approbation du wali, nous avons déposé une demande auprès du tribunal administratif afin d’avoir cinq ordres de consultation et d’entretien», explique une source autorisée au sein du Conseil de la ville. Après la réception des PV relatifs à ces consultations, le Conseil de la ville a enclenché le processus d’envoi de mises en demeure par voie extrajudiciaire. «Ces notifications ont été envoyées en février et mars 2014. Nous avons attendu 60 jours pour recevoir les réponses des parties concernées avant de passer à l’acte», ajoute notre source. Suite à cela une délégation composée de représentants de la commission patrimoine de Casablanca, de représentants du service contentieux ainsi que d’un huissier de justice, a effectué en juin une visite desdits établissements dans l’objectif de les récupérer à l’amiable. «Or, les représentants des cinq établissements ont refusé d’appliquer la décision d’expulsion», confirme le porte-parole du Conseil de la ville. Et d’ajouter : «Lors de notre visite à l’ancien marché de gros, nous étions même surpris par le responsable juridique de la société Dimco (Développeur immobilier commercial), filiale du groupe Chaabi, qui nous présente une décision du tribunal administratif de Casablanca qui suspend l’arrêté municipal. Décision qui n’a pas été envoyée au Conseil de la ville».
Selon notre source, l’avocat de Dimco, qui est par ailleurs membre du bureau politique de l’USFP et ancien élu de la préfecture de Ain Sebaâ-Hay Mohammadi, a entamé une procédure en référé pour arrêter la décision du Conseil de la ville et a eu gain de cause. De son côté, le conseil a fait appel auprès du tribunal et attend le verdict final.

La solution serait entre les mains du wali

Le problème de l’ancien marché de gros dure depuis longtemps. D’une superficie de 5 000 m2, ce marché situé dans le quartier Belvédère a été concédé en 1997 à la société Dimco. Cette location a été consentie pour une durée de 9 ans renouvelable par tacite reconduction, pour un loyer annuel de 1 million de DH. Les travaux de réhabilitation et d’aménagement des locaux pour l’exercice d’activités commerciales devaient commencer en mars 1998. Cependant, rien n’a été initié. En mars 2002, soit quatre ans avant l’expiration de ce premier contrat de location, Dimco signe un nouveau contrat sous forme de bail commercial pour réaliser un centre commercial dans ce bâtiment. Cette fois-ci, la société lorgnait le parking du marché donnant sur l’avenue Abdallah Ben Yacine, pour un loyer annuel de 90 000 DH, en plus, bien sûr, de la halle et du sous-sol. Le nouveau bail est consenti pour une durée de 18 années entières et consécutives à compter de l’ouverture du centre commercial à la clientèle. Le loyer annuel passe à 1,2 MDH pour la première année, à 1,3 million pour la deuxième et à 1,4 million pour la troisième. Et à partir de la quatrième année, le loyer sera révisable tous les trois ans et le taux  d’augmentation plafonné à 10%. En 2005, la société s’est retirée de cette affaire.

Elle a vendu toutes ses parts au groupe Chaabi. Ce dernier s’est engagé à installer dans l’enceinte de l’ancien marché, à partir de 2006, un hypermarché de sa chaîne Aswak Assalam, à condition de garder le même contrat signé avec les anciens propriétaires de Dimco. «Or, le groupe n’a pas tenu ses engagements. A aujourd’hui, aucun investissement n’a été fait, et la ville n’a jamais perçu le moindre sou depuis 1997», regrette notre source. Contacté à ce sujet, Omar Chaabi affirme qu’«[il] n’est pas au courant de cette affaire».
Du côté de la Sqala, «le groupe Resto Pro a également entamé une procédure en référé qui a été rejetée par le tribunal administratif», confie notre source. Sur ce sujet, le conseil de la ville s’interroge: «Comment le tribunal administratif a accepté la demande de Dimco dont les locaux sont vides et a refusé celle déposée par le groupe Resto Pro ?». Il fait remarquer que «la Sqala est un cas social, vu que près de 60 personnes vont perdre leur emploi suite à la résiliation du contrat». De plus, souligne-t-il, «le restaurateur a réhabilité et revalorisé ce site moyennant un investissement de 15 MDH».
Enfin, concernant les trois autres complexes, à savoir le Paradise, le complexe sportif de Zenata et le complexe de tennis Moulay Rachid, «les concessionnaires n’ont pas entamé de procédures judiciaires mais refusent tout de même de quitter les lieux», confie le représentant du conseil. Selon lui, le problème se pose uniquement pour le marché de gros. Pour les autres, «il nous faut juste le feu vert du wali pour l’exécution forcée de la décision», conclu-t-il.