Affaires
Casablanca : menaces sur le projet de transfert des périmètres de l’ONEE à la Lydec
La Commission technique d’expertise doit remettre sont rapport le 31 décembre. Les 350 salariés de la direction distribution de l’ONEE refusent de collaborer avec la commission. Ils contestent l’intervention des experts de la Lydec dans le processus d’évaluation du patrimoine et annoncent qu’aucune proposition ne leur a été faite au sujet de leur transfert.
Le projet d’harmonisation des périmètres de distribution d’électricité et d’eau et du service d’assainissement dans la région du Grand Casablanca peine à avancer. De nombreux facteurs entravent le bon déroulement des travaux de la Commission technique d’expertise (CTE) chargée de l’inventaire, du diagnostic et de l’évaluation des installations dans l’objectif du transfert des actifs et avoirs de l’ONEE. Cette commission, composée des représentants du ministère de l’intérieur, du ministère de l’économie et des finances, du ministère de l’énergie, des mines, de l’eau et de l’environnement, de la wilaya du Grand Casablanca, de l’ONEE et de la Lydec doit rendre ses conclusions d’ici le 31 décembre.
Un seul poste source visité sur les 13 que compte l’ONEE
Sa mission porte sur cinq volets. D’abord, elle doit établir un inventaire des actifs de l’ONEE. Ensuite, elle procédera à la fixation des valeurs des immobilisations et biens financés sur fonds propres de l’ONEE et leur mode de transfert à l’autorité délégante. Le troisième volet consiste en la mise en place des modalités de transfert éventuel du personnel de l’ONEE vers le délégataire retenu (!). En quatrième lieu, la CTE établira un calendrier de règlement de la valeur des actifs à céder à l’autorité délégante et un calendrier de transfert définitif des services. Elle réalisera, enfin, un programme d’apurement des créances nettes détenues par l’ONEE et notamment celles relatives à l’ex-RAD.
A deux semaines de la date fixée, la commission est toujours bloquée au niveau des trois premières missions. Sur le compte rendu de la commission que la Vie éco a consulté, on lit que «le blocage social autour du projet entrave la progression des missions 1et2». La CTE a enchaîné du 5 novembre au 5 décembre une série de réunions. Elle a ainsi achevé les travaux relatifs à la collecte des données sur les postes sources électricité, le traitement du reste des installations étant en cours. La collecte des données pour la partie eau et assainissement a, elle, été achevée. Concernant l’analyse des documents associés, justifiant la valeur d’acquisition des installations, «les documents sont actuellement en cours de préparation», révèle le compte rendu, qui souligne également que «le management de l’ONEE a promis de les envoyer au moment du transfert». Or, selon les observations de la commission, «la livraison de ces documents reste indispensable en vue de l’achèvement de la mission». Le document révèle également que les visites terrain nécessaires pour l’évaluation de l’état de fonctionnement et la vétusté des installations ont été interrompues. Sur les 13 postes sources dont dispose l’ONEE dans les arrondissements relevant de la Commune urbaine de Casablanca ainsi que de l’ensemble des communes relevant de la région du Grand Casablanca, la commission n’a pu visiter que celui de Sidi Maârouf, sachant que l’évaluation des grands ouvrages (13 PS et 1 Step) doit être exhaustive. Enfin, concernant la troisième mission relative aux modalités de transfert des salariés, la commission souligne un manque d’informations à ce niveau.
En effet, «en dehors des effectifs signalés dans les canevas d’inventaire, aucune autre information n’a été transmise à la CTE».
«Le personnel de la direction distribution de l’ONEE (techniciens, agents et cadres opérationnels) boycotte les réunions de la commission et refuse de collaborer avec elle dans ses travaux de recensement et d’évaluation», explique Mohamed Zeroual, secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs de l’énergie, affiliée à l’Union marocaine du travail (UMT). Le représentant du personnel motive ce boycott par deux éléments principaux. «D’abord, le Conseil de la ville de Casablanca a fait appel aux experts de la Lydec pour la réalisation des travaux de recensement et d’évaluation», déclare-t-il. Et d’ajouter que «nous ne pouvons l’accepter car Lydec ne peut être juge et partie dans cette affaire». Le directeur communication de la Lydec se refuse à se prononcer sur ces accusations et tient à préciser que «la Lydec n’est pas concernée par ce projet puisque la ville n’a pas encore désigné une société de gestion déléguée et que son nom ne figure pas dans la convention».
L’ONEE devrait prendre en charge le coût du transfert du personnel
Le représentant de l’entité chargée du suivi du dossier au sein du Conseil de la ville de Casablanca confirme pourtant que «les experts de la Lydec» sont sollicités. Et de renchérir : «Au Maroc, il n’y a pas d’experts en la matière à même de mener cette mission. Le coût de la prestation sera trop élevé si nous faisons appel aux services des experts étrangers». Selon lui, l’intervention des experts de la Lydec ne peut pas influencer la valeur de la transaction puisque la commission est constituée également de représentants de l’office et des ministères concernés. «Le prix final fera l’objet de négociations avec l’ONEE. Si nous n’arrivons pas à trouver un terrain d’entente, nous allons faire appel aux services des experts étrangers. Cette prestation sera prise en charge à parts égales par l’ONEE et la Lydec», explique le représentant du Conseil de la ville. Il rappelle également que, selon les termes de la convention, «le délégataire retenu», qui n’est autre que la Lydec, financera cette opération de transfert de la propriété des installations de l’ONEE à l’autorité délégante qui, elle-même, en confiera la gestion à Lydec jusqu’en 2027.
Le deuxième facteur qui justifie le mouvement social au sien de l’ONEE réside dans l’ambiguïté qui entoure l’opération de transfert du personnel. Dans ce sens, il est important de noter que la direction distribution de la région du Grand Casablanca emploie 350 fonctionnaires. «Ces derniers ignorent leur sort après l’opération du transfert», confirme Mohamed Zeroual, qui annonce que les réunions de la commission continueront d’être boycottées jusqu’à ce que la direction générale accepte de se mettre avec eux autour d’une table.
Sur ce registre, le représentant de la ville a confié que d’après les recommandations de la dernière réunion du comité de pilotage du projet, tenue le 5 décembre à Rabat, «c’est l’ONEE qui devra prendre en charge le règlement de la situation des 350 salariés de Casablanca. Car son coût sera très lourd à supporter par la Lydec». Nous avons tenté à plusieurs reprises de recueillir les explications de l’office mais toutes nos demandes sont restées sans suite.
Affaire à suivre…