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« S’expatrier en Afrique » : Entretien avec Mehdi El Yousfi DG du cabinet Diorh

Mehdi El Yousfi : «Les leviers d’attraction doivent être diversifiés»

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El Yousfi Mehdi

En raison des spécificités économiques, politiques et sociales des pays de l’Afrique subsaharienne et concrètement pour attirer les cadres et managers marocains à travailler dans ces pays, il faut proposer des packages motivants sur tous les plans : rémunération, assurance, santé, fiscalité, logement, transport & déplacement, sécurité et accompagnement familial. Mehdi El Yousfi, DG du cabinet Diorh, dresse les principaux points à surveiller.

L’Afrique est le sujet du moment. Etes-vous sur des missions de recrutement ?
Tout à fait ! La cadence s’est nettement intensifiée depuis ces 2 à 3 dernières années. Nous sommes sur des missions pour des donneurs d’ordre type multinationales installées au Maroc ou des groupes marocains.
Ces opérations interviennent dans le cadre d’une expansion à partir du Maroc, soit pour des filiales implantées en Afrique, soit pour des projets d’implantation.
Nous faisons également partie d’un réseau international de chasse de têtes «Intersearch Worlwide» et nous sommes notamment amenés à faire du sourcing «crossborder». De ce fait, nous pouvons recruter différents profils de différentes nationalités pour de différents pays.
Il faut dire aussi que l’intérêt pour l’Afrique s’explique par deux principales raisons. Premièrement, l’Afrique est devenue le premier gisement de croissance économique mondiale et les grandes entreprises marocaines ont été la première locomotive d’expatriation des cadres et managers marocains. Deuxièmement, les relations privilégiées qu’entretient le Maroc avec certains pays ont permis à plusieurs opérateurs économiques (y compris les PME/PMI), tous secteurs confondus, d’explorer de nouvelles niches de croissance et des opportunités de développement et de s’installer dans ces pays, voire de s’étendre aussi aux pays voisins. Donc pour s’installer et suivre de près le R.O.I de leur investissement, ces opérateurs font appel en premier lieu à des cadres et managers marocains en mobilité ou nouvellement recrutés.

Pour quels types de postes?
Généralement pour des postes de direction, principalement les directeurs généraux, les directeurs financiers ou encore les directeurs commerciaux.
On peut dire que l’offre de cadre executive s’est beaucoup développée ces dernières années en Afrique.

Il est vrai qu’il est difficile pour les entreprises d’attirer des cadres dans ces régions. Comment procèdent-elles ?
Le sujet de l’expatriation doit répondre à plusieurs enjeux mais j’en retiens deux principalement.
Tout d’abord, il s’agit d’un enjeu stratégique pour l’entreprise, c’est-à-dire comment assurer un transfert de compétences ou tout simplement comment faire circuler un cercle de compétences sur les sites d’implantation.
Ensuite, il existe un enjeu tactique, c’est-à-dire comment faire vendre le projet d’expatriation au cadre.
Sur ce volet, je pense que c’est d’abord une stratégie claire et bien expliquée aux candidats à l’expatriation, qui englobe à la fois les objectifs de l’entreprise, la politique d’accompagnement et d’assistance sur place, l’information sur le pays d’accueil.
L’accompagnement concerne aussi le conjoint et la famille. A l’instar des multinationales, des guides spécifiques doivent être élaborés et remis aux expatriés. Une formation préalable à la gestion des risques interculturels est recommandée.
En raison des spécificités économiques, politiques et sociales des pays de l’Afrique subsaharienne et concrètement pour attirer les cadres et managers marocains à travailler dans ces pays, il faut proposer des packages motivants sur tous les plans: rémunération, assurance, santé, fiscalité, logement, transport & déplacement, sécurité et accompagnement familial (scolarité des enfants). La finalité de cette politique est de réaliser les objectifs de l’entreprise (chiffres et parts de marché) et permettre au cadre ou manager de mieux vivre son expatriation.
Et donc, les leviers d’attraction doivent être diversifiés. La perspective de carrière et de rémunération n’est pas suffisante. C’est une perspective nécessaire, la condition même de considération de l’expatriation.
Cependant, l’entreprise doit répondre aux objections, aux craintes le plus souvent exprimées ou ressenties par les cadres et leur famille. L’attraction ne se fera qu’au prix d’un plan global comprenant des solutions sur les conditions de sécurité, de confort et de vie familiale.
Au-delà du poste et de son package, les entreprises qui se démarqueront dans l’attraction et la fidélisation des talents savent mettre en place ce genre de dispositif global et d’accompagnement individuel des expatriés et de leur famille.

 Quels sont les écueils à éviter quand on s’expatrie ?
Pour l’entreprise, l’expatriation est une opportunité de développement des compétences et de changement pour ces managers et ces cadres. C’est aussi un moyen pour alimenter le vivier de ses hauts potentiels. L’expatriation doit être inscrite dans le projet d’entreprise en termes de stratégie, de communication, d’organisation, d’accompagnement et d’évaluation.
Pour les expatriés, une intégration dans le pays et les entreprises d’accueil dépend de leur capacité d’adaptation et d’assimilation de la culture locale, ainsi que de leur expertise et compétences pour fédérer leurs équipes opérationnelles.
Je retiens quatre aspects dans cette démarche pour mieux vivre son expatriation :

• former ses collaborateurs locaux à la culture de la maison mère et assurer un transfert de compétences;
• garder une écoute permanente et un lien étroit avec ce qui se passe dans la société mère pour mieux préparer le retour;
• participer aux activités culturelles, sociales et économiques du pays d’accueil. S’isoler de l’environnement de l’entreprise est synonyme de stagnation et d’incapacité à changer de milieu de travail;
• créer des liens et des relations avec les compétences locales.