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Carrière

Recadrage au travail : Entretien avec Abdelilah Sefrioui, DG du cabinet Axe RH

«Trop de concessions peuvent donner l’impression d’un laisser-aller»

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abdelilah sefrioui axe rh

Ce n’est pas toujours facile de gérer une équipe. Surtout si l’on manque de confiance. Ne pas recadrer une personne suppose l’anarchie. Trop d’autorité suppose également des conflits. Comment trouver le juste milieu ? Explications avec Abdelilah Sefrioui, consultant et DG du cabinet Axe RH.

Comment expliquez-vous le manque de leadership de certains managers ?

Un manque ou un mauvais leadership pourrait s’expliquer d’abord par un manque de motivation du manager lui-même. Combien de fois, en effet, avons-nous rencontré des cas où le chef a purement et simplement abdiqué de son rôle de meneur d’hommes. Lorsque nous leur posons des questions sur les raisons de cette situation, nous avons des réponses du genre: «Je préfère responsabiliser mes collaborateurs». Ce qu’ils ne comprennent pas c’est que l’autonomie des personnes sans direction peut créer des situations managériales catastrophiques. Une autre raison tout aussi fréquente a trait au fait que les personnes qui ont en charge la responsabilité des autres n’ont pas été suffisamment formées pour assumer ces responsabilités. Et même lorsque cette formation a eu lieu, elle ne concerne que ceux qui exercent une fonction hiérarchique ou sont appelées à le faire. N’oublions pas que la formation de collaborateurs sur le leadership est tout aussi utile. Dans beaucoup d’entreprises, on considère que le management d’équipe est quasiment inné ou qu’un niveau académique élevé prédispose les personnes à bien exercer leur rôle de leader et de chef d’équipe. Dans d’autres situations, on constate que c’est le manque de confiance qui explique le manque de leadership, même si la personne a été préparée à exercer ce rôle.

Le leadership signifie une ascendance sur le groupe, mais il arrive qu’on ait du mal à agir notamment pour recadrer un collaborateur sans créer de conflit. Que faire ?

 

Recadrer quelqu’un comme vous dites peut être nécessaire dans des cas très différents, donc la réponse en termes de recadrage et la manière de faire dépendront de la cause qui justifie ce besoin. On peut avoir besoin de «recadrer» quelqu’un lorsqu’il ne fait pas bien son boulot, il est particulièrement susceptible, colérique, négatif, etc. Ce qui, inévitablement, envenime l’ambiance au sein d’un service ou d’une équipe. Autant de situations qui exigent des façons de «recadrage» appropriées. Mais la consigne générale est d’en discuter en tête-à-tête, de faire prendre conscience des conséquences de ce type de comportements sur le climat de l’équipe et de se focaliser sur les solutions à trouver à de tels comportements.

De nos jours, les managers n’ont-ils pas du mal à mobiliser et à souder leur équipe compte tenu des différents défis (conjoncture difficile, objectifs de plus en plus irréalisables, changement permanent des méthodes de travail…) ?

Ce que vous relatez constitue de véritables défis au maintien de la cohésion et de la dynamique d’équipe. Nous assistons, en effet, à une véritable crise de sens qui sape les fondements même d’une équipe ou, du moins, crée un vrai malaise du fait de l’accélération des événements, du manque de visibilité, de la montée de l’incertitude, du volume croissant des informations à traiter, de la montée de nouvelles formes de collaboration, etc. Nous rencontrons souvent des collaborateurs et des managers qui sont véritablement en manque de repères. Pour éviter le relâchement, les managers ont à créer du sens pour leurs collaborateurs au quotidien.

Comment ?

Je pense que le premier élément à prendre en considération est de ne pas oublier que la cohérence est une clé du maintien d’une dynamique positive. Dans ce nouveau contexte, il est plus nécessaire que jamais d’apporter autant que possible de la cohérence aux missions de vos collaborateurs. La seconde est l’écoute. Plus que par le passé, prendre le temps de connaître les aspirations des collaborateurs et de faire en sorte de mieux les écouter permettent à ces derniers de s’investir de manière évidente.

Faut-il aller à la confrontation pour s’imposer ?

Je pense qu’une relation hiérarchique ne doit pas donner lieu à une confrontation. Elle doit être basée sur la fermeté quand on a affaire à des obstinés ou à des personnes de mauvaise foi. C’est justement quand on fait trop de concessions qu’on arrive à se faire déborder. C’est pourquoi il ne faut pas hésiter à hausser la voix quand la coupe est pleine.

Comment alors composer avec les fortes personnalités?

Je crois qu’une forte personnalité peut être un atout et non pas une contrainte, si on arrive à canaliser son énergie car elle peut donner de l’envergure à un projet, apporter de nouvelles solutions…
Le souci majeur pour un manager est d’avoir une équipe performante, quels que soient les personnalités et les modes de fonctionnement individuel en son sein, la diversité étant génératrice de richesse. Le reste n’est que question de psychologie. Cela veut dire que le manager doit essayer un ensemble de moyens, de savoir-faire et de savoir-être pour amener chaque collaborateur à rechercher l’excellence, que ce soit sur le plan personnel ou collectivement.