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Carrière

Prise de risque chez les managers : Avis de Omar Benaini, Consultant chez LMS & ORH

Certains managers pensent mieux cerner les risques en centralisant au maximum le processus de décision. Dans un contexte d’incertitude, de faible visibilité et d’accélération des changements, décider seul augmente considérablement le risque d’échec. La notion de risque renvoie traditionnellement à  deux dimensions : l’occurrence et l’impact.

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Le risque est partout présent dans notre  vie, privée ou professionnelle, qu’on l’affronte ou pas. Pour gérer une entreprise ou sa carrière, tout individu doit prendre des décisions pour provoquer sa chance parce que le fait de ne pas agir conduit  à l’immobilisme, facteur d’échec. Consultant au cabinet LMS & ORH, Omar Benaini explique le  comportement du manager marocain face à cette  donne et souligne que pour affronter la réalité, «il faut savoir prendre en compte de multiples éclairages et composer avec des appréciations souvent contradictoires».

La prise de risque est-elle courante chez nos managers ?
En réalité,  la prise de risque est inhérente à toute prise de décision. Ne pas prendre de risque revient à accepter de tomber dans l’immobilisme et l’inertie. Le décideur doit apprendre à se prononcer sur des options futures incertaines et opérer des arbitrages avec des informations incomplètes. Il doit s’habituer à l’idée qu’il ne peut rien maîtriser de manière certaine et que la réussite est aussi une question d’opportunités, de hasard, de chance et de compromis.
Dans un mode sans certitude absolue, plutôt que de chercher à domestiquer l’incertain, le décideur gagnerait à affiner les probabilités par plus d’écoute, de connaissances et de compréhension.
Cet état d’esprit est l’une des choses les plus difficiles à acquérir par le manager.

La prise de risque poserait problème aux managers ? Si oui, quel était le contexte ?
Effectivement nous avons pu observer que certains managers pensent mieux cerner les risques en centralisant et en personnalisant au maximum le processus de décision.
Le manager se considère comme celui  «qui sait» plus que comme celui  qui s’adapte à un environnement. Arrogant, centralisateur, opaque, isolé dans sa tour d’ivoire, il se renferme sur lui même et se réfugie dans l’auto – persuasion pour prendre des décisions souvent à haut risque.
Dans un contexte d’incertitude, de faible visibilité et d’accélération des changements, décider seul augmente considérablement le risque d’échec. Or beaucoup de managers restent accrochés au stéréotype du dirigeant qui décide “librement” et qui sait tout faire : visionnaire, stratège, expert, technicien, recruteur… Ce faisant ils cumulent les risques d’erreur.

Comment prendre la mesure d’un ou de plusieurs risques ?
La notion de risque renvoie traditionnellement à deux dimensions :  l’occurrence et l’impact. Un risque qui présente une forte probabilité de se réaliser et dont l’impact sur l’entreprise peut être majeur doit être surveillé, confiné et des solutions anticipées doivent être préparées à l’avance pour en réduire les effets.
En revanche, un risque qui ne peut surgir qu’occasionnellement ou dont l’impact est négligeable sur l’activité de l’entreprise ne devrait pas faire partie de la cartographie des risques  suivis par le manager.

Une mauvaise appréhension de la prise de risque peut avoir des conséquences sur l’environnement interne de l’entreprise, peut-on savoir lesquelles ?
Dans le contexte actuel le décideur se trouve devant un grand dilemme prendre des risques pour plus d’efficacité de pro-activité et de performance mais au risque de sacrifier certaines règles et procédures. On ne fait pas d’omelette sans casser les œufs !!! Ou bien respecter scrupuleusement les règles et les normes au risque de rater les opportunités et tomber dans l’inefficacité et la contre-performance.
Ce jeu d’équilibriste entre la prudence et l’action, entre la conformité et l’efficacité, entre la peur de se tromper et la crainte de laisser échapper les opportunités résume assez bien le paradoxe de la prise de risque dans les organisations qu’elles soient publiques ou privées. Le dirigeant doit apprivoiser et gérer cette dialectique.

Jusqu’où un manager peut prendre des risques en termes de management ?
Le rôle du décideur est particulièrement exposé aussi bien au niveau interne qu’externe. A fortiori depuis que le contexte actuel a remis au cœur de la vie des entreprises les notions de gouvernance, d’éthique, de transparence, d’intégrité, de respect des valeurs,  d’obligation de rendre compte, de responsabilité sociale,  …
Les dirigeants sont plus que jamais interpellés par les «stak holders»  sur leurs décisions, leur prise de risque, la conformité de leurs actes par rapports aux normes et aux procédures…
L’un des défis du manager est de prendre conscience de l’impact de ses décisions ou de l’absence de décision sur son entreprise. Car n’oublions pas que l’inertie c’est aussi une décision et  un choix sont il faux assumer les conséquences.

A votre avis, faut-il privilégier une action individuelle ou collective face à un risque ?
Pour décider, le dirigeant doit prendre en compte de multiples points de vue, souvent contradictoires. Aucun manager ne peut tout prévoir, ni trouver des solutions à tous les problèmes. En acceptant de mutualiser et partager la réflexion, l’information et l’énergie de tous les acteurs de l’entreprise on contribue à réduire le risque et on arrive à mieux le calculer et l’encadrer.
La maturité d’un manager réside moins dans son pouvoir d’autorité que dans sa capacité de faire converger une multitude d’acteurs pour parvenir à une décision acceptable qui a de fortes chances d’être mise en œuvre avec le moins de risque d’erreurs.
Il faut savoir prendre en compte de multiples éclairages et composer avec des appréciations souvent contradictoires.
Un dirigeant doit faire preuve d’exemplarité beaucoup plus en en tant que leader qu’en tant que «patron». Il doit savoir responsabiliser ses collaborateurs pour les encourager à se prémunir, chacun à son niveau de risques, et les aider à anticiper les solutions à mettre en œuvre au cas où le risque se confirme.