Carrière
Le trac : pourquoi l’a-t-on ? Comment le comprendre, le gérer…
Il prend sa source dans la peur du jugement des autres.
Apprendre à respirer, bien articuler, laisser les mains s’exprimer…, quelques gestes peuvent aider à
se maîtriser.
Il faut relativiser l’enjeu, considérer les interlocuteurs comme des alliés, et ne jamais entrer dans la spirale de l’echec.
Gorge sèche, mains qui tremblent, bouffée de chaleur, bégaiements … On reconnaît là tous les symptômes du trac. Un cauchemar que beaucoup de gens vivent, quand ils sont en passe de s’exprimer en public ou face à un interlocuteur important dans un contexte donné (entretien d’embauche, négociation commerciale, démonstration…).
Dans un monde qui privilégie autant le savoir-être que le savoir, le fait de ne pas pouvoir captiver l’attention d’un interlocuteur ou d’un auditoire peut en effet avoir des effets désastreux sur une carrière : rater un contrat, ne pas savoir se valoriser lors d’un entretien d’évaluation ou d’embauche… Mais le trac n’est pas aussi désastreux qu’on le pense. Les sportifs et les artistes en savent quelque chose puisqu’ils ont souvent besoin d’adrénaline avant d’entrer sur le terrain ou de monter sur scène. Selon Youness Bellatif, DG du cabinet Convergence conseil, «il faut savoir de quoi on a peur. de manière globale, trois facteurs peuvent générer le stress : ne pas se sentir compétent aux yeux des autres, ne pas être aimé et apprécié en tant que personne ou encore ne pas se sentir utile».
Le secret de la réussite est pourtant simple : ne jamais entrer dans la spirale de l’échec. «Elle provoque trop souvent une redoutable perte de confiance en soi», souligne Houriya Cherif Haouat, consultante RH et directrice développement au sein du cabinet BMH Coach. Un échec lors d’une soutenance de thèse peut empêcher, des années plus tard, un excellent manager de s’exposer en public.
A la façon des sportifs, il va falloir compter sur une préparation psychologique, un environnement sous contrôle, un sujet maîtrisé, un état d’esprit positif et une bonne gestion des symptômes.
Lutter contre ses appréhensions
Bien évidemment, la première des choses est de se préparer mentalement à l’épreuve. «Rien de mieux que de s’entraîner. Le travail de répétition est un facteur déterminant de la sérénité», souligne M. Bellatif. Ensuite, il s’agira de relativiser l’enjeu. «La crainte d’être jugé par un public représente en fait la peur du décalage entre l’image que nous pensons donner de nous, et l’autre à laquelle nous aimerions nous conformer», explique Keiko Catala, conceptrice-rédactrice dans une agence de communication. Il ne faut pas seulement se le dire mais l’intérioriser : nul n’est parfait. On va, par notre intervention, répondre à l’attente de nos interlocuteurs. Il est donc plus juste de considérer son interlocuteur comme un allié.
Préparer son discours
Etape à ficeler et non des moindres, celle du discours. Il revient donc simplement à travailler les messages qu’on souhaite transmettre. D’abord en réfléchissant bien à l’objectif réel de son intervention. Ce qui aura aussi pour effet de relativiser l’importance de la prise de parole. Puis en construisant les messages proprement dits. Quelles sont mes intentions ? Quels sont les effets qui vont me faire passer d’une intention à l’autre ? La tâche consiste à travailler à la fois son plan et les mots clés à employer lors de l’intervention. Utile : retenir les mots ou idées que l’on ne doit pas oublier de mentionner.
Traiter les symptômes
Pour éviter des blocages récurrents, il est essentiel de se pencher sur les symptômes du trac qui se manifesteraient. Si c’est la gorge qui bloque, on s’arrête. Même chose pour un trou de mémoire : on ne donne pas d’explication, on s’ancre puis on reprend. Quant à la posture, tenez-vous droit, prenez appui sur vos jambes et ne pliez pas vos bras. Si vos mains tremblent, gardez-en une dans la poche et utilisez l’autre pour étayer vos paroles. Il s’agit aussi de prendre conscience des muscles inutilement contractés (épaules, cou, nuque, abdomen, …) et les décontracter progressivement, détendre le visage (muscles entourant la bouche, sourcils, joues).
La respiration est aussi importante. «Elle est souvent bloquée lorsqu’on prend la parole. En conséquence, la personne perd ses fonctions intellectuelles. Rien de mieux qu’une bonne respiration pour s’apaiser et retrouver ses idées», conseille Mme Haouat.
Refouler les situations antérieures mal vécues
Si l’on considère que le trac est dû aux clichés du type «je vais échouer, je ne vais pas savoir que dire, je suis nul… », la relaxation mentale suggère non pas de se focaliser sur ces images négatives mais de les remplacer. «Il s’agit plutôt d’imaginer ou de se remémorer une situation plaisante où on se sentait physiquement bien, détendu, et mentalement fort et serein», souligne Youness Bellatif.
Garder une attitude positive
Gardez par ailleurs un stylo et du papier à portée de main. Vous serez sans doute emmené à changer d’idées, à en supprimer quelques-unes, en apporter de nouvelles… Donc, il est important de mémoriser les phrases clés. Enfin, il faut toujours regarder celui à qui on parle. Cela permet de gagner en confiance. Et, surtout, ne pas se laisser aller à l’agressivité car cela se retournera contre vous.
Prendre son temps c’est aussi gagner en assurance. Le silence est un bon moyen de reprendre sa respiration et de ménager ses effets. Comme le silence, le trac n’est pas forcément non plus l’ennemi à abattre. Il mobilise l’énergie et permet le passage à l’acte de la prise de parole qui lui-même fait disparaître le trac. La visualisation et la pensée positive sont aussi des méthodes ayant fait leur preuve. Il s’agit aussi d’accepter les regards qui se posent sur vous. «Avant de parler, regardez et laissez-vous regarder» , conseillent en chœur les formateurs de la parole. Il faut enfin essayer de ne pas repousser ses prises de parole. «Dans le cas d’une réunion où chacun s’exprime tour à tour, il ne faut pas attendre d’être le dernier tout comme font généralement les victimes du trac. Une seule règle : se lancer. L’attente ne ferait qu’augmenter l’anxiété, alors qu’il vaut mieux en finir rapidement», ajoute Mme Haouat. Et se convaincre que les échecs ne sont pas des voies sans issue, mais bien des occasions d’apprendre.