Carrière
La mobilité, un moyen pour développer ses compétences
La morosité du marché de l’emploi n’affecte pas la mobilité des hauts potentiels.
Le cadre marocain est peu enclin à la mobilité géographique.
Un cadre doit penser à franchir un nouveau palier tous les trois ou
quatre ans.

La fidélité à une seule entreprise n’est plus de mise de nos jours. Les cadres sont de plus en plus exigeants. «Si on ne m’offre pas tel poste ou telle rémunération, j’irais voir ailleurs», des propos que l’on entend souvent. Qu’est-ce qui pousse les cadres à bouger ? Comment les retenir? Explications avec Brahim Kerzazi, consultant au cabinet Idoine.
La Vie Eco : En s’appuyant sur les mouvements constatés au niveau de l’encadrement d’un certain nombre d’entreprises ces derniers mois, peut-on dire que les cadres ne sont pas affectés par l’atonie du marché de l’emploi ?
Brahim Kerzazi : Tout à fait ! A vrai dire, le marché des cadres reste peu dépendant de la conjoncture économique. Les hauts potentiels ne subissent aucunement la morosité du marché de l’emploi. Ils sont assez sollicités, surtout pour des postes pointus, et peuvent par conséquent être à l’affût des différentes opportunités qui se présentent. Ils augmentent ainsi leurs chances de rebondir à tout moment.
Qu’est-ce qui pousse les cadres à bouger ?
Il existe deux types de mobilités dans le monde professionnel. La mobilité interne à l’entreprise, laquelle peut être horizontale, verticale ou encore géographique.
Il y a également une mobilité externe, qui s’exprime par un changement d’entreprise.
Le besoin de progresser ou d’être reconnu pousse souvent les cadres à opter pour la mobilité. Un cadre qui s’enferme dans une expertise n’apprend plus rien. Il apporte de moins en moins de valeur ajoutée à l’entreprise. Il est important qu’il soit confronté à un changement. Ceci dit, les cadres ne sont pas ouverts à toutes les formes de mobilité. La mobilité géographique, par exemple, n’arrive pas véritablement à décoller au Maroc, contrairement à ce qui se passe ailleurs. Les freins à son développement sont de plusieurs ordres. Sur le plan social, le désir de stabilité en matière de logement, de quartier, d’entourage familial, fait que peu de gens sont disposés à changer d’environnement.
Pourtant, la mobilité interne est un élément positif dans la mesure où elle permet de développer une compréhension interculturelle des métiers au sein de l’entreprise. Elle est également un outil de fidélisation. Tout cadre ou dirigeant a besoin d’apprendre, de se remettre en question et de se mettre dans des situations de challenge. De ce fait, il a l’impression de vivre réellement et de contribuer à un projet d’entreprise.
A force de bouger, ne risque-t-on pas de donner une mauvaise image aux employeurs ?
Le changement est difficile mais il est aussi souhaitable à la fois pour le développement de l’individu et pour la performance de l’entreprise. Il faut toutefois savoir justifier ses mouvements : envie de nouvelles responsabilités, désir de connaître un nouveau métier ou un nouveau secteur, stagnation dans son ancienne entreprise… Si la mobilité est orientée vers le développement de nouvelles compétences, elle est jugée positivement. En revanche, un cadre doit se poser des questions s’il change d’employeur à plusieurs reprises durant une courte période.
Quand faut-il envisager de partir ?
La durée n’est pas importante dans la mesure où le cadre doit avant tout capitaliser son expérience. On peut très bien faire sa carrière dans une seule entreprise à condition que l’entreprise vous manifeste sa reconnaissance. Dans le cas contraire, vaux mieux aller chercher ailleurs. Cela dit, je pense qu’un cadre doit penser à son évolution tous les trois ou quatre ans. En principe, la première année est synonyme d’essai dans la nouvelle structure. Elle permet de se familiariser avec son environnement de travail. La deuxième année permet de dégager une valeur ajoutée. La troisième année, quant à elle, est nécessaire pour évaluer les résultats. On peut imaginer qu’au bout de la quatrième année on doit consolider tout ce qui a été réalisé pour passer à un autre stade.
En principe, l’entreprise doit penser à faire évoluer ses collaborateurs. Il est même conseillé de procéder à un bilan de compétences au bout de quelques années pour offrir à chacun l’opportunité de porter un regard sur soi de façon à pouvoir se redéployer pour utiliser pleinement son talent, ses compétences et son potentiel.
Comment une entreprise peut-elle gérer cette population de cadres tentés par la mobilité, externe en particulier ?
L’un des objectifs de l’entreprise est justement d’attirer et de fidéliser les hauts potentiels. La fidélisation passe forcément par un système d’appréciation flexible, par un plan de carrière et d’autres mécanismes de reconnaissance.
Parmi les motifs de départ, il y a souvent la rémunération. Quelles peuvent être les autres causes de mobilité externe ?
Toutes les sources de démotivation. Mauvais climat social, absence de perspective de carrière, manque de reconnaissance, grosse pression, mauvaise relation avec la hiérarchie et bien d’autres. Je pense que l’entreprise doit centrer avant tout ses préoccupations sur la responsabilisation et le développement des compétences. Une rémunération motivante vient après.
brahim kerzazi
Consultant au cabinet Idoine
La mobilité interne est positive dans la mesure où elle permet de développer une compréhension interculturelle des métiers au sein de l’entreprise.
