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Carrière

Jean-Marie Courtois : Les meilleurs communicants sont ceux qui acceptent de partager

Autant pour le fond que pour la forme, une bonne communication orale commence par une volonté de faire connaître à  l’auditoire un sujet que l’on maîtrise. Sachez faire des pauses, elles ne seront pas obligatoirement longues, mais nécessaires.

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jean marie courtois 2012 12 27

Les troubles de la communication orale sont un repli sur soi, voire une impossibilité de communiquer. C’est une maladie grave : l’autisme. Elle touche certaines personnes dès la petite enfance. Il est pourtant impossible de vivre sans communiquer. On rencontre certaines formes d’autisme partiel chez les adultes. C’est un acte volontaire : je ne partagerai pas mon savoir, pour ne pas me faire voler ma place ! Communiquer oralement, c’est d’abord accepter de partager.
On nous apprend à ne pas partager notre savoir dès l’école. On donne une meilleure note à ceux qui connaissent mieux que les autres le savoir acquis. ça fabrique des premiers de la classe ! Imaginez une classe où les meilleurs partageraient leur savoir avec les moins bons ! ça serait le monde à l’envers ! Et pourtant… Une bonne communication orale commence par une volonté de faire connaître à l’auditoire, restreint ou nombreux, un projet, un exposé ou une intervention sur un sujet précis, que l’on connaît parfaitement. Et ce projet sur lequel on a travaillé, on ne le connaîtrait pas aussi bien, si d’autres n’y avaient pas travaillé auparavant. De nouveau arrive la notion de partage, de travail en équipe. Maintenant plus que jamais. Il n’y a plus de Pasteur, seul dans son laboratoire, en train de découvrir le premier vaccin. Un prix Nobel de médecine se donne maintenant rarement à une seule personne. C’est presque toujours un travail de plusieurs chercheurs, parfois de plusieurs pays. Vous avez du mal à communiquer oralement en public ? Commencez par vouloir partager.

Parlons du sentiment

Vous devez vous investir personnellement. Vous devez être totalement engagé. Parlez d’abord avec votre tête, avec votre cœur. Même si je suis en train de présenter un projet abstrait, un bilan à venir par exemple, je dois être habité par celui-ci. Ce sera plus facile, si je présente le projet d’un pont à construire, reliant deux vallées. J’aurai avec moi des images, je vais planter le décor, la vie des villages alentour, de leurs habitants, avec la situation exacte du lieu, sa géographie, avec les couleurs, même les bruits. L’auditoire sera plus facilement avec vous.
Voilà pour le fond ! Passons maintenant à la forme. D’abord le langage. Vous avez remarqué que les politiciens, surtout étrangers, parlent lentement. C’est pour être compris par tous. Sans aller jusqu’à cet excès, pourtant efficace, parler plus lentement. Faites des phrases courtes. Ne réfléchissez pas en parlant, votre phrasé serait alors ponctué de …euh…donc… Réfléchissez avant de parler. Les notes doivent être simples, succinctes, faciles à lire. Elles ne sont que le fil conducteur de votre texte, que vous allez retrouver quand vous aurez fini un chapitre ou un paragraphe. Vous pouvez d’ailleurs prendre le temps de les lire, sans vous affoler, l’auditoire attendra. Il est avec vous.

Sachez faire des pauses

Elles ne seront pas obligatoirement longues, mais elles sont nécessaires, pour vous, pour votre respiration, pour reprendre vos notes, mais aussi pour l’auditoire. Il a besoin de pauses pour comprendre parfaitement ce que venez de dire, pour l’intégrer, y réfléchir, même si les pauses sont très courtes. Votre regard va les accompagner, comme si vous disiez je suis avec vous.
Parlons de l’auditoire, justement. L’auditoire doit être pris en compte. Comment ? Devant 4 ou 5 personnes, en réunion, ou devant un public nombreux, prenez une ou deux secondes de silence avant de parler, en les regardant. Soyez avec eux. Soyez vous-même. Laissez-les vous accepter physiquement. En réunion, c’est facile. Mais devant 200 personnes, parlez d’abord à 3 ou 4 personnes, aux premiers rangs, avec qui vous sentez que ça passe bien. La salle va s’identifier à ces personnes là.
Qui représente l’auditoire ? Qu’attend-il de vous ? Y aura-t-il un débat après votre intervention ? Quelles sont les questions que vous pressentez ? Préparez les réponses. Que voulez-vous que l’auditoire retienne en premier lieu de votre intervention ? Quels sont vos messages les plus importants ? Vous pouvez vous poser toutes ces questions par écrit et elles feront partie de vos notes.

Vos notes sont indispensables

Elles vous accompagneront, vous permettront de reprendre le fil de votre pensée, si vous avez un trou. Mais elles ne sont qu’un guide, sans plus. N’hésitez pas à les consulter, prenez votre temps. Elles composent le plan de votre intervention, avec d’une manière classique : une introduction, un développement et une conclusion. Choisissez pour l’introduction un chiffre fort, une image choc, une phrase accrocheuse et percutante, pour accrocher l’auditoire. Utilisez la présentation des animateurs et journalistes à la télévision. Plutôt qu’une intro banale et classique : «Je vais vous parler des nouvelles mesures en prévention routière…», utilisez une image forte, un phrasé-clé, un chiffre, un évènement ou un exemple frappant : «4 000 morts cette année sur les routes. Une petite ville comme X rayée de la carte», puis après un silence, vous pourrez saluer la salle et développer votre introduction. De même, pendant un paragraphe, n’hésitez pas à apporter un silence avant une phrase ou un autre chiffre importants. C’est les mettre en exergue.

Restez naturel

La gestuelle ? N’y attachez pas trop d’importance. Si vous êtes sûr de vous, elle va suivre votre phrasé. Certaines personnes sont plus vivantes que d’autres. C’est dans leur caractère. Si vous vous obligez à être «vivant» lors d’un exposé ou d’une conférence, vous deviendrez artificiel. Edith Piaf ne bougeait presque pas en scène, et pourtant, elle était sûre d’elle, sa voix était mille fois convaincante. En réunion, si vous n’êtes pas sûr de vous, vous serez en position négative, calé dans le fond de votre fauteuil. Au contraire, si vous êtes convaincant, vous serez en avant de votre fauteuil, vers l’auditoire. Et ça se fera naturellement. Votre gestuelle traduit votre sentiment. Bien communiquer oralement, c’est être d’abord vrai, spontané, direct, motivé, savoir rester simple et aller à l’essentiel. Je vous souhaite bon vent !