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Conformité sociale : Entretien avec Houcine Berbou, DG du cabinet Academus Business & Management

«Certaines entreprises font semblant de ne pas être informées de leurs droits et obligations»

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Houcine-BerbouPour Houcine Berbou, DG du cabinet Academus Business & Management, il existe une prise de conscience des enjeux et des avantages liés à la conformité sociale. Si certaines s’inscrivent dans une démarche volontariste, d’autres par contre le font  pour l’image de marque ou encore parce qu’elles sont sous la contrainte des partenaires sociaux ou des donneurs d’ordre internationaux. Explications.

En matière de conformité sociale, on peut dire que les entreprises ne sont pas logées à la même enseigne. Quel constat tirez-vous ?

Sur le marché, on trouve un peu de tout, Il y a les bons élèves, les moins bons et ceux qui sont à la traîne. Mais, globalement, les choses ont bien évolué ces dernières années et on constate de plus en plus une prise de conscience des enjeux et des avantages de la conformité sociale et également des risques et du coût et des conséquences de la non-conformité.

Grosso modo, on peut parler de 3 cas de figure.

D’une part, il y a la majorité des filiales des multinationales, les grandes entreprises et certaines PME,  qui s’inscrivent dans une démarche volontariste qui prône la conformité, elles veillent au respect des principales dispositions légales en vigueur. Il y en a même certaines parmi ces entreprises qui ont bien investi dans ce domaine de conformité et bonnes pratiques sociales pour obtenir une certification sociale ou un label comme celui de la CGEM.

D’autre part, il y a des entreprises qui sont poussées à cette conformité soit par les syndicats ou les représentants du personnel, soit par les donneurs d’ordre étrangers en cas de sous-traitance, et parfois par les autorités suite à un contrôle ou un incident majeur. Dans ce cas, souvent la démarche n’est pas à l’initiative de l’entreprise mais elle finit par l’adopter.

Enfin, il existe d’autres entreprises qui sont toujours dans leurs veilles habitudes et pour lesquelles la conformité sociale n’est pas une priorité ; elles s’arrangent par tout moyen pour repousser l’échéance.

Il faut signaler également quelques initiatives visant à instaurer et développer cette conformité sociale :

 Le ministère de l’emploi a lancé, en 2010, le plan d’action national de mise en conformité sociale afin de promouvoir la culture de conformité sociale dans les entreprises, mais les résultats restent mitigés jusqu’à présent.

 Des dispositifs de financement des actions de mise à niveau pour une conformité sociale existant aussi via l’ANPME, le BIT ou d’autres organismes ou institutions

 Un cycle de formation d’audit social avec un module réservé à la conformité sociale.

Pourtant, c’est une obligation légale pour les entreprises…

Se conformer aux dispositions légales est justement une obligation légale pour les entreprises ; le code du travail étant un des référentiels auquel il faut se conformer. Ce n’est pas que les entreprises n’arrivent pas à se conformer à certaines dispositions légales, mais qu’elles font souvent semblant de ne pas être informées. Or, nul n’est censé ignorer la loi. Je pense qu’il faudrait sensibiliser les entreprises que plus elles respectent la dimension humaine et sociale, plus elles ont des chances d’améliorer leur productivité et réaliser des profits conséquents. Il faudrait aussi renforcer le contrôle par les délégués de l’emploi et les inspecteurs du travail, notamment par la réalisation d’un diagnostic social portant sur le salaire et les exigences réglementaires y afférentes, la mise en place des IRP que sont le comité d’entreprise (CE) et le comité hygiène et sécurité (CHS), le règlement intérieur, la liberté syndicale, les heures de travail, le repos hebdomadaire…   

Il me semble important de rappeler les 9 axes d’engagement mis en place par  la CGEM ayant trait à la charte de responsabilité sociale et qui sont : le respect des droits humains, l’amélioration en continu des conditions d’emploi et de travail et les relations professionnelles, la protection de l’environnement, la prévention de la corruption, le respect des règles de la saine concurrence, le renforcement de la transparence du gouvernement d’entreprise, le respect des intérêts des clients et des consommateurs, la promotion de la responsabilité sociale des fournisseurs et des sous-traitants ainsi que le développement de l’engagement sociétal.                                                                                                                                        Aussi certaines entreprises n’arrivent pas à se conformer  par manque de volonté des dirigeants, surtout dans certaines entreprises familiales ou PME. D’autres entreprises ne disposent pas de compétences nécessaires pour veiller à cette conformité.

Il y a également  des difficultés dans l’application de certaines dispositions du code de travail dues, soit à un manque de textes d’application non encore publiés, soit parce que  la rédaction de certains articles renvoie à plusieurs interprétations, soit qu’il est impossible des les appliquer en pratique, comme le cas du médecin de travail pour les entreprises d’une certaine taille.

Quels sont les écarts observés ?

Cela va de l’inexistence d’un contrat de travail écrit au licenciement abusif en passant par le non respect du SMIG, la non-déclaration à la CNSS, le non-paiement des heures supplémentaires, l’abus dans l’utilisation des contrats CDD et d’intérim et le non-respect des normes d’hygiène et de sécurité

  Généralement, qui sont les plus réfractaires, les grandes entreprises ou les PME ?

En l’absence de statistiques précises en la matière, tout ce que je peux dire est que nous avons tendance à incriminer les PME, alors que bien de grandes entreprises ne respectent pas toutes les dispositions règlementaires: licenciements abusifs, indemnités de licenciement en-dessous du légal, absence de comité d’entreprise, non remplacement des délégués du personnel après leur départ, conditions de travail pénibles.…