Carrière
Comment parler de ses défauts lors d’un entretien d’embauche
Les recruteurs se renseignent souvent sur les défauts d’un candidat, pour tester ses aptitudes comportementales et son ouverture d’esprit. Il est important de rester naturel et modeste parce que rien ne peut être dissimulé éternellement.
«Citez-moi trois de vos défauts». Combien de candidats se sont vus poser une telle question lors d’un entretien d’embauche. Et si elle revient souvent dans les entretiens c’est parce qu’elle permet au recruteur d’aller directement à l’essentiel, aux points forts et faibles du candidat et à la perception qu’il a de sa propre personnalité. En fait, la compétence technique mentionnée sur un CV ne suffit pas. Il faut un ensemble d’autres qualités humaines pour convaincre l’interlocuteur qui, dans bien des cas, cherchera à pousser le candidat dans ses derniers retranchements pour jauger ses motivations et sa prédisposition à donner le meilleur de lui-même. Dans un tel contexte, il arrive que les meilleurs se montrent très timorés lors d’un entretien par excès de confiance ou souvent par peur de décevoir.
Aptitude à assumer des responsabilités, capacité à mener un projet et une équipe, genre de patron ou de collaborateur avec lesquels il désire travailler, capacité à accepter des valeurs ou des centres d’intérêt autres que les siens… Pour bien mesurer le niveau d’ouverture d’esprit du candidat, nombre de recruteurs prennent plaisir à élargir les horizons. Ce qui les intéresse, ce n’est pas tant le fond que la façon dont les candidats vont se décrire eux-mêmes. L’erreur serait donc de répliquer, par exemple, les termes «exigeant» ou «perfectionniste».
Selon Chantal Aounil, responsable recrutement chez Bil Consulting, «se renseigner sur les défauts d’un candidat, c’est d’abord tester sa clairvoyance, sa capacité à réfléchir et à présenter ses défauts avec honnêteté. Un défaut en soi n’est pas fatal. Au contraire, il peut s’avérer un atout à condition d’y mettre la forme». Elle ajoute également qu’«un défaut est apprécié selon la nature du poste et de son environnement».
A l’image de ce candidat à un poste de responsable financier qui n’a pas hésité à répondre qu’il avait tendance à être «grande gueule» et à exprimer ses opinions, parfois maladroitement, en présence de ses supérieurs. Un trait de caractère rare à ce type de poste, où les fortes têtes ne sont pas légion. Décelant là plus un atout qu’un défaut, l’employeur a embauché ce candidat atypique.
Mais on n’évoque pas ses défauts n’importe comment. Mieux vaut choisir des termes valorisants pour rassurer l’interlocuteur. Et donc, il est inutile de se préparer à réciter par cœur des réponses préétablies. D’ailleurs, il existe des recruteurs qui préfèrent, dans certains cas, des discussions moins formalisées pour mettre le candidat à l’aise. C’est ce qu’explique Jamal Krim, Dg du cabinet Reco Act. L’essentiel, c’est de répondre avec franchise et de s’y tenir.
Ainsi, une personne qui s’emporte vite et vocifère contre ses collègues ou ses collaborateurs n’est pas forcément mal vue. Ses montées d’adrénaline peuvent signifier qu’elle est exigeante sur la qualité de service, le respect, les délais ou l’engagement des uns et des autres. De plus, un défaut n’est pas une fatalité. On peut le gommer et, quand on le combat, il finit par devenir un atout puisque la personne en a pris conscience. Comme ce manager des opérations dans un grand groupe, dirigiste de nature mais qui compense son autorité naturelle en discutant régulièrement avec ses collègues avant de prendre une décision.
Attention à l’excès de confiance
Pour mettre tous les atouts de son côté, il ne faut surtout pas mentir lors d’un entretien. Certaines informations peuvent être facilement vérifiées. Mouna Sebbahi, présidente de l’Association internationale des experts RH et Dg du centre marocain d’aide à l’orientation académique et professionnel (CAAP), souligne à cet effet que «les références mentionnées dans les CV amènent souvent les recruteurs à vérifier certaines informations sur les candidats, notamment les attitudes comportementales et leur savoir-être auprès de leur ancien employeur».
Il existe aussi les mises en situation où souvent les candidats sont amenés à gérer une situation en direct devant le recruteur. «C’est révélateur de points tout aussi positifs que négatifs», souligne Mme Sebbahi.
Si peu de défauts sont acceptables dans l’absolu, il existe, en revanche, des travers incompatibles avec la nature de certains postes. En toute évidence, il serait risqué qu’un financier ou un comptable se décrive comme mal organisé ou qu’il éprouve un manque d’intérêt pour l’apprentissage de nouvelles solutions informatiques tout comme un commercial qui se dit réservé et timide devant les autres et qui doit gérer un portefeuille client.
De même que parfois il faut tenir compte de la culture d’entreprise. «Quelqu’un qui a l’habitude de s’habiller décontracté ou qui déteste porter la cravate aura du mal à se soumettre dans une organisation traditionnelle ou conventionnelle comme les banques», souligne Karim El Ibrahimi, Dg du cabinet RMS Conseil.
Bref, parler de ses défauts, c’est aussi les présenter en atout. A condition d’y apporter une solution. «Par exemple, si un candidat éprouve beaucoup de trac ou de timidité lorsqu’il prend la parole en public mais qu’en revanche il prend des cours de théâtre, c’est un bon signe pour lui» , explique Mme Sebbahi. Idem pour la personne qui arrive souvent en retard, mais qui en a pris conscience et fait de gros efforts pour y remédier ou celui qui se dit inculte en matière de technologie informatique, mais qui possède un ordinateur personnel sur lequel il s’entraîne régulièrement. «Il s’agit de montrer, preuve à l’appui, que l’on est conscient de ses défauts et que l’on travaille pour les améliorer», souligne Chantal Aounil. A l’instar de cette directrice des ressources humaines qui avait confessé à son futur recruteur qu’elle avait souvent manqué de confiance en elle et qu’elle avait suivi plusieurs formations en coaching pour progresser. Façon idoine d’évoquer un défaut tout en le corrigeant.
Ce qui est sûr, c’est que cacher ses défauts est contre-productif. Donc mieux vaut en prendre conscience, les accepter et les corriger surtout s’ils peuvent nuire au bon fonctionnement d’une organisation. Dans une entreprise, les relations humaines, eu égard à la diversité des caractères et des cultures -ou de l’éducation reçue-, sont plus difficiles à gérer que les problèmes techniques.
Un excès de confiance peut produire le même résultat que la cachotterie. Il signifie souvent de la suffisance, une attitude néfaste dans une vie en groupe. En somme, pour se tirer d’affaires, l’idéal c’est de rester modeste et naturel.