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Carrière

Cadre et enseignant : entretien Houcine Berbou DG du cabinet Academus Training

Les dirigeants et cadres sont là pour réduire les écarts entre les besoins du marché et les enseignements académiques. Toutefois, la capacité à entreprendre n’est pas toujours synonyme d’excellence académique.

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La motivation des cadres et managers d’aller enseigner n’est pas uniquement d’ordre pécuniaire. Il y a ce côté philanthrope qui les y poussent.  Leur but est aussi de chercher de l’épanouissement et de faire de la recherche intellectuelle. Et pour beaucoup, il s’agit de garder le contact permanent avec le monde des jeunes. Il y a ceux qui sont à la recherche d’échanges, d’acquisition de connaissances et de compétences comme ceux qui sont à la recherche d’une légitimité ou d’une notoriété académique et sociale. Houcine Berbou, DG du cabinet Academus Training, détaille les motivations des managers enseignants..

De plus en plus de managers s’adonnent à l’enseignement; est-ce une tendance lourde ?

L’accès des professionnels au domaine de l’enseignement est facilité par le développement des enseignements des disciplines de management dans les établissements publics et privés au Maroc. Ainsi, il y a vingt ans, les établissements d’enseignement privé avaient commencé à faire appel à ces professionnels formateurs pour repositionner différemment leurs offres et attitrer le maximum de candidats. Le challenge était relevé de sorte qu’étudiants et parents percevaient les enseignements dispensés dans ces établissements comme étant pragmatiques, versés dans les problématiques réelles des entreprises et facilitant par là même l’accès au marché de l’emploi. Les recruteurs préféraient d’ailleurs ces profils à ceux qui sortaient directement des facultés, jugés trop versés dans les enseignements théoriques. Les professionnels trouvaient en cela aussi une manière de se recycler, mais aussi de partager leur connaissance avec le monde universitaire 

 Les entrepreneurs sont-ils  devenus des modèles de réussite pour le monde de l’enseignement ?

De toute évidence! L’entreprenariat suppose un état d’esprit tourné vers la prise d’initiative. Plusieurs managers brillantissimes de l’entreprise ont décidé de se mettre à leur compte. D’autres ont pris le risque, depuis leur sortie de l’école, de s’aventurer dans l’entreprenariat et ça réussit dans la majorité des cas. En revanche, notre système d’enseignement ne fournit pas aux lauréats des compétences permettant d’adopter la posture d’entrepreneurs chez nos jeunes. Les activités parascolaires sont insuffisantes, voire pas du tout encouragées dans nos établissements universitaires. Nous sommes restés dans le modèle classique de la formation académique universitaire.

 Que peut apporter la collaboration entre l’école et l’entreprise ?

Les deux mondes se nourrissent mutuellement l’un de l’autre. L’enseignement apporte la méthode, la rigueur scientifique, le mode de raisonnement, l’abstraction, la modélisation… Le monde de l’entreprise, quant à lui, nourrit les managers en termes de savoir-faire pratique, de prise d’initiative, de capacité d’argumentation et de pragmatisme.

Mais, au-delà, la capacité à entreprendre n’est pas toujours synonyme d’excellence académique. Beaucoup de bons pédagogues ne réussissent pas dans le monde de l’entreprise et vice versa.

L’avènement des générations Y et Z change les rapports au travail et à l’autorité. Ces générations sont fondamentalement «entrepreneurs» et beaucoup de business schools et d’établissements de renom innovent en matière pédagogique en adoptant les techniques de mise en situation, de jeux de rôles, de business game… qui réduisent la distance entre les référentiels des deux mondes.

Vous avez une double casquette de consultant et d’enseignant. Quelles sont vos motivations ?

Ma prédisposition à relever à chaque fois de nouveaux challenges: je n’aime pas refaire les mêmes choses car je m’ennuie très vite. De plus, j’apprécie le partage, les débats d’idées et le sens critique. Je suis fondamentalement chercheur dans ma construction mentale et très pragmatique dans ma démarche au quotidien. En cela, je ne fais qu’appliquer la définition même des sciences du management qui sont avant tout des sciences de l’action.

Je suis aussi convaincu que les deux mondes ont beaucoup à apprendre l’un de l’autre. La construction du savoir ne peut pas être l’apanage des universitaires, mais la réussite des projets et des entreprises a aussi besoin de la rigueur, de la hauteur intellectuelle et de la vision systémique des académiques.

 Depuis quand enseignez-vous ? Dans quelle spécialité?

J’ai toujours mené deux carrières en parallèle. Celle de l’universitaire et celle de l’expert consultant. Cela fait 25 ans aujourd’hui que je surfe entre les deux mondes. J’ai commencé par des enseignements en économie, en économétrie pour passer ensuite à la finance quantitative. Ma carrière de consultant m’a fait ensuite découvrir le monde du marketing, des RH, de l’organisation et de la stratégie. J’ai eu la chance d’être associé à plusieurs projets structurants dans notre pays et à l’international touchant aux domaines des RH, de la stratégie et de  la transformation. J’ai par ailleurs été initiateur de plusieurs structures de recherche et j’ai contribué au développement de plusieurs projets de recherche nationaux et internationaux où sont impliqués des groupes de recherche et des universités de renom.

Comment arrivez-vous à concilier votre vie professionnelle et l’enseignement ?

Le secret est la motivation d’exceller dans ce qu’on fait. Et comme je le disais plus haut, pour moi, les univers se complémentent parfaitement et je ne sens pas que je suis dans deux métiers différents, même s’ils le sont par la nature des cibles et des enjeux qu’ils gèrent. Mes étudiants trouvent du plaisir à écouter le retour d’expérience du consultant que je suis et à profiter des qualités pédagogiques de l’enseignant que je suis aussi.