Affaires
Budget de mariage plus serré, Ramadan, montée de l’informel…, l’activité des traiteurs au plus mal
La baisse de la demande est estimée à plus de 50% par les opérateurs par rapport à 2012 qui était elle-même une mauvaise année. Le budget moyen par mariage est passé de 150 000 DH, il y a quelques années, à 40 000 DH au plus actuellement.

L’incertitude économique a modifié les habitudes de consommation des ménages. Mais on peut penser qu’il y a toujours des évènements emblématiques pour lesquels les Marocains ne lésinent pas sur les moyens, le mariage en est un. Une idée reçue manifestement, puisque même ces festivités ont été rattrapées par la crise. En témoigne la mauvaise passe que traverse actuellement le marché des traiteurs. En effet, ces opérateurs, des grands noms aux petits professionnels, dont la majorité vit presque exclusivement de mariages, rapportent unanimement un net recul de la demande. La baisse est estimée à plus de 50% par une majorité d’opérateurs en comparaison avec l’année dernière qui, elle-même, est jugée mauvaise. Moins nombreuse, la clientèle des traiteurs est aussi moins dépensière. «Il est sûr que les budgets de mariages sont plus faibles cette année», reconnaît Abdelkrim Rahal Essoulami, patron du groupe éponyme, leader sur le marché national.
Les professionnels estiment que la dépense moyenne par fête, qui pouvait aller jusqu’à 150 000 DH, il y a trois ans, est ramenée aujourd’hui tout au plus à 40 000 DH, étant à préciser que les prix facturés par couvert (à partir de 200 DH) n’ont pas évolué sur les dernières années, s’il ne sont pas revus légèrement à la baisse en 2013. Pour faire des économies, les clients n’épargnent aucune piste. Ainsi, «les menus classiques marocains (pastilla et méchoui) remplacent les formules sophistiquées plus coûteuses. De même, ils organisent la cérémonie pour ne retenir que le strict minimum», constate-t-on auprès du groupe Rahal. Dans ce sens, la liste des invités est plus courte. «On opte pour des cérémonies intimes rassemblant tout au plus une soixantaine de personnes alors qu’auparavant on dépassait systématiquement la centaine de convives», confirme un traiteur renommé à la ville de Fès qui a vu son chiffre d’affaires divisé par trois cette année. En plus de tout cela, les clients semblent particulièrement soucieux de faire jouer la concurrence, de l’avis unanime des traiteurs.
Le marché des MRE s’est tari
Un professionnel témoigne : «Une pratique qui s’est généralisée parmi les clients consiste à récupérer des devis auprès de plusieurs opérateurs pour négocier sur cette base une remise». Aussi minime soit-il, «un petit geste sur le prix» est actuellement l’élément qui décide le client en dernier ressort, constatent les professionnels.
Bien sûr, il n’y a pas que la crise pour expliquer la mauvaise passe du marché des traiteurs. La concordance de la saison estivale avec le mois de Ramadan justifie également en grande partie la méforme du secteur. Et les opérateurs ne misent pas beaucoup sur le mois de septembre pour se refaire une santé parce que les préparatifs pour la rentrée scolaire constituent une autre préoccupation pour les ménages. Au final, il n’y a «plus de saison de mariages à proprement parler», conclut un opérateur présent de longue date sur le marché casablancais.
Pour ne rien arranger, le nombre d’opérateurs a explosé durant les dernières années. A Fès, par exemple, 400 acteurs sont actuellement en activité au niveau de la ville alors qu’on en dénombrait trois, il y a dix ans. Une situation qui inquiète les professionnels installés depuis longtemps du fait que la plupart des nouveaux arrivants exercent dans l’informel. Pratiquant des tarifs cassés dans un marché de prix, ces acteurs “illégitimes” sont en effet en position de capter une partie grandissante de la demande. Mais dans leur grande majorité, ils semblent eux aussi accuser le coup du fait du tarissement de la demande des MRE qui constituait leur clientèle de prédilection.
En attendant des jours meilleurs, certains traiteurs portent leurs efforts sur le marché des entreprises et des administrations pour se maintenir à flot. Mais l’on se doute bien que sur ce segment aussi, la demande n’est pas au mieux de sa forme, d’autant que les offices sont contraints de réduire leurs budgets de fonctionnement -les dépenses somptuaires sont les premières touchées- et les sociétés privées, leurs investissements alloués à l’événementiel.
