Affaires
Baisse inquiétante des captures de poisson
Dans certains ports, les débarquements ont chuté de 90 % par rapport à 2005.
Pélagiques, crustacés et céphalopodes sont les plus concernés.
Pour les scientifiques de l’INRH, il n’y a pas de quoi s’alarmer.

Les dernières statistiques de l’Office national des pêches (ONP) arrêtées au mois d’août 2006 sont inquiétantes. Elles montrent une chute drastique des débarquements de poisson dans les différents ports du pays. En moyenne, les prises ont régressé de 14,2 % en tonnage, par rapport à la même période de l’année dernière, contre une timide progression de 2 % en valeur. Cependant, ces données cachent de grandes disparités. Ainsi, la chute a été plus prononcée pour la catégorie du pélagique (- 18 %) dont les débarquements représentent plus de 80 % du total national. Les espèces les plus touchées ont été sans nul doute la sardine (- 26 %) et le maquereau (- 20 %). Les céphalopodes sont aussi concernés et enregistraient à fin août une baisse de 15% en moyenne par rapport à 2005 et jusqu’à – 65 % pour le calamar. Idem pour les crustacés qui ont montré des signes d’essoufflement avec – 13 % pour les crevettes roses et – 69 % pour la langoustine.
Dans ce tableau, seul le poisson blanc sauve la mise avec une reprise des captures de 13 %, même si certaines espèces comme le merlu (-40 %) et l’ombrine (- 28%) sont en perte de vitesse.
L’analyse par port montre une incidence fortement négative sur les villes de l’Atlantique (-16,7 %). Les ports de la Méditerranée, par contre, ont connu une excellente campagne avec une reprise des captures de 29,7%.
Mais d’ores et déjà, la crise semble s’être installée dans plusieurs villes où la pêche constitue la principale activité économique. C’est le cas de Tarfaya, dont le port a enregistré une forte baisse des débarquements, atteignant 87 %, de Tan Tan où l’activité portuaire n’est plus que l’ombre d’elle-même avec des prises réduites de moitié (-50,4 %). Plus au nord, c’est Rabat qui détient la palme avec – 90,1 %, suivie d’Agadir (-37,5 %). D’autres ports comme Larache, Asilah ou encore Imessouane ne sont pas mieux lotis et enregistrent une chute des prises respectivement de 19,1 %, 9,6 % et 28,6 %.
L’effet de cette situation s’est fait sentir à deux niveaux. D’abord, un marasme économique qui s’est installé dans les villes vivant essentiellement de la pêche, ensuite, l’envolée des prix du poisson.
Une solution : l’aquaculture
Y a-t-il lieu de tirer la sonnette d’alarme au sujet de l’état de la ressource ? A l’INRH, l’on se veut rassurant même en l’absence de données scientifiques définitivement arrêtées. Le ministre, pour sa part, tout en reconnaissant l’évolution en dents-de-scie du stock halieutique, estime que le Maroc ne fait pas exception quant à la situation de la ressource. «Le dernier rapport de la FAO indique que la chute au niveau mondial est de plus de 25 %», souligne Mohand Laenser.
Que faire alors pour permettre la reconstitution des stocks ? «D’abord préserver la ressource en essayant d’éviter sa surexploitation», souligne le ministre qui rappelle l’adoption prochaine du plan d’aménagement pélagique. «Nous disposons aussi d’une alternative, mais qui a pris du retard dans sa mise en place. Il s’agit de l’aquaculture. Aujourd’hui, le stock sauvage va s’effondrer à l’horizon 2025 si l’effort de pêche n’est pas contrôlé, d’où la nécessité de développer cette activité», ajoute M. Laenser.
Outre l’état de la ressource, les professionnels avancent aussi, pour expliquer la chute des débarquements, le retard enregistré dans la mise à niveau de la flotte côtière. Plusieurs professionnels assurent par exemple que sur les 800 sardiniers de la flotte, seulement une vingtaine sont équipés de sonars qui permettent une meilleure localisation des bans de poisson. A cela s’ajoute la flambée des prix du carburant qui a compliqué la situation financière de plusieurs sociétés de pêche. «Pour rentrer dans leurs frais, les armateurs limitent de plus en plus leurs sorties en mer», explique un armateur de Casablanca.
