Affaires
Après un an de confusion, le e-gouvernement prend forme
28 services sont d’ores et déjà accessibles
Le ministère des Télécommunications veut installer des bornes interactives dans les lieux publics
La stratégie nationale sera dévoilée d’ici à fin mai.
Le projet d’administration en ligne, e-gouvernement, semble prendre progressivement forme. Le comité interministériel, formé en février 2003 et présidé par Abderrazak El Mossadeq, ministre des Affaires économiques, pour piloter le projet, semble avoir réussi à démêler l’écheveau. Aujourd’hui, près de 28 services sont déjà consultables en ligne, dont deux depuis quelques jours seulement. Il s’agit des rôles d’audiences au niveau des tribunaux de commerce de Casablanca et de Rabat ainsi que des affaires en cours auprès du tribunal de première instance de Casablanca-Anfa. L’autre service concerne le lancement du site www.imobile.justice.gov.ma qui permet la consultation, à partir d’un téléphone portable, des registres de commerce et des avis d’exécution des jugements vis-à-vis des compagnies d’assurances.
Pour y arriver, il a fallu d’abord inverser la démarche. Plutôt que de construire un cadre général à caractère conceptuel, l’équipe du projet a procédé par îlots. Les 28 ser-
vices en ligne (que l’on
peut retrouver sur le site www.egov.ma) sont, à ce titre, le résultat des expériences concluantes réalisées avec certains départements comme la Justice, les Finances, l’Intérieur, les Transports, la Douane, la CNSS, l’Office de la propriété industrielle (OMPIC), la Conservation foncière et, plus récemment, la Santé et le ministère de la Modernisation des secteurs publics.
On a préféré avancer par mini-chantiers concrets plutôt que de faire tout à la fois
Pour les responsables du comité e-gouvernement, ces expériences ont un double avantage. Le premier est qu’elles permettront l’émulation pour les autres administrations non encore impliquées dans le processus. Le second réside dans la mutualisation des applications. Quand l’une d’entre elles est développée pour répondre aux besoins d’un département donné, elle est proposée à titre gratuit aux autres départements susceptibles de l’exploiter. D’ailleurs, le département des télécoms, cheville ouvrière du e-gouvernement, a lancé récemment une série de projets de plate-formes pour certains ministères comme celui de la Santé, de l’Enseignement supérieur ou encore celui de la Modernisation des secteurs publics (MMSP).
Peut-on se passer d’une agence nationale pour l’administration électronique ?
Avec tout cela, on a un peu l’impression que les choses avancent trop lentement. Rachid Talbi Alami, ministre des Télécommunications, insiste sur la nécessité d’une démarche pragmatique : «La stratégie e-gouvernement repose sur le développement du contenu, le transport et l’accès à l’information». Tout comme son collègue des Affaires économiques, le ministre de l’Industrie estime que le e-gouvernement ne peut se construire que de manière progressive. «Il ne sert à rien de s’équiper et de créer des sites si, d’une part, il n’y a rien à mettre dedans et si, d’autre part, l’utilisateur n’y a pas accès» . Ainsi, et parallèlement au développement du contenu, Rachid Talbi Alami ambitionne de doter le pays d’un réseau de bornes interactives qui seront disponibles dans les lieux publics comme les téléboutiques et les petits commerces, et à travers lesquelles les citoyens auront accès aux services en ligne.
Agir d’abord et parler ensuite. Un mot d’ordre partagé par les autres départements impliqués dans le projet. C’est le cas du ministère de la Modernisation des secteurs publics, acteur incontournable. Il faut rappeler que les récentes sorties médiatiques de Najib Zerouali sur son projet d’e-administration, baptisé Idarati, avaient indisposé certains départements. Contacté par La Vie éco, le ministre explique que «le projet Idarati n’est qu’une composante du e-gouvernement, sans plus», faisant taire ainsi ceux qui lui prêtaient l’ambition de s’approprier le projet en entier.
Apparemment, les choses sont rentrées dans l’ordre et chacun, au sein du comité, sait aujourd’hui ce qu’il doit faire. Ce n’était pas le cas il y a peu, et chaque département voulait avoir son propre projet e-gouvernement.
D’autres services en ligne seront bientôt proposés, affirme-t-on. Le comité se réunit au moins une fois par mois pour valider l’état d’avancement des travaux. Son président, Abderrazzak Mossadaq, nous a confié d’ailleurs que «le comité rendra publique la stratégie nationale pour le e-gouvernement, à la fin du mois de mai».
Sommes-nous sur la bonne voie ? Les plus sceptiques qualifient le projet d’irréalisable dans l’état actuel des choses et avec l’architecture actuelle du projet. Comme l’explique un professionnel en technologies de l’information, «tous les pays qui ont réussi leur projet e-gouvernement ont été obligés, à un moment ou à un autre, de créer une agence nationale pour l’administration électronique». C’est le cas des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de la France. D’ailleurs, selon des sources bien informées, une note expliquant l’utilité d’une telle agence aurait été récemment soumise au Premier ministre. Abderrazzak Mossadaq, pour sa part, pense qu’«une telle agence n’est pas vraiment nécessaire pour le moment». Pourtant, il faudra bien en arriver là quand il s’agira de gérer des milliers de connexions et des signatures électroniques
