Affaires
Anas Sefrioui : Cessons de dire que l’immobilier est en crise
A terme, la part du logement haut standing constituera 50% du chiffre d’affaires du groupe, mais le cÅ“ur de métier reste le logement social et de moyen standing.
150 000 logements dans le pipe, engagement sur 50 000 autres à lancer.
La production de logements à 140 000 DH conditionnée par la péréquation.

A l’heure où le secteur de la promotion immobilière se plaint d’un sérieux ralentissement, le groupe Addoha a réalisé, au titre de son activité semestrielle, un résultat en hausse de 72% !
Je n’ai cessé depuis plusieurs mois d’affirmer que la situation du secteur dans notre pays n’est pas comparable à celle prévalant en Europe ou aux Etats-Unis. La demande demeure très élevée, notamment dans le logement économique, les besoins à couvrir dépassent 1 million de logements, et le gouvernement a pris une série de mesures pour faire face à ce déficit : mobilisation du foncier public, mise en place de fonds de garantie … Les banques continuent par ailleurs à financer le plus normalement les acquéreurs, le taux d’impayés demeurant cantonné dans des limites tout à fait acceptables. Cessons donc de marteler que le secteur de l’immobilier est en crise. Les chiffres du groupe Addoha sont là pour apporter la preuve du contraire.
Cela n’a apparemment pas empêché le cours d’Addoha de baisser…
Objectivement, je n’en comprends pas les raisons. Tous les objectifs communiqués au marché ont été atteints, voire dépassés avec un chiffre d’affaires en progression de 107% et un résultat net consolidé part du groupe en hausse de 72%. Cette baisse est donc d’autant plus incompréhensible que sur le plan macro-économique la situation de notre pays demeure, malgré la crise internationale, tout à fait satisfaisante avec un taux de progression annoncé du PIB proche de 5,8%.
Quel a été le segment le plus rentable pour Addoha ?
Conformément à la réglementation comptable en vigueur au Maroc, seules les ventes relatives aux logements intégralement achevés et livrés aux acquéreurs peuvent faire l’objet d’une comptabilisation en chiffre d’affaires. Or, la totalité des logements livrés au cours de ce 1er semestre relèvent du segment économique et moyen standing. Il est donc prématuré de procéder à des comparaisons en termes de marge. Les ventes réalisées au niveau du haut standing ne sont pas comprises dans le chiffre d’affaires du 1er semestre. Elles le seront à la livraison des logements. Mais d’ores et déjà nos business plans dégagent une marge équivalente (en % s’entend), qu’il s’agisse de logements économiques ou de haut standing.
Vous avez annoncé avoir sécurisé 12,5 milliards de DH de CA pour les 18 prochains mois en commercialisant plus de 25 000 logements. Quelle est la part des logements sociaux, des logements moyen standing et de ceux de haut standing dans ce chiffre ?
Pour nous le chiffre d’affaires sécurisé est défini comme étant celui qui sera généré par les compromis de vente signés avec les clients et au titre desquels nous avons perçu des avances de 15% du prix de vente au minimum. Conformément à nos prévisions initiales, la part du haut standing ira en s’accroissant au fur et à mesure des livraisons pour atteindre, à terme, 50% du chiffre d’affaires. Il ne faut cependant pas en déduire que cette progression se fera au détriment des logements économiques et de moyen standing que le groupe continuera à développer de manière encore plus soutenue.
Après épuisement des conventions signées avec l’Etat, Addoha continuera-t-il à s’engager dans le logement social ?
Stratégiquement, nous ne pouvons abandonner ce qui constitue le cœur d’activité du groupe au moins pour deux raisons. D’une part, nous avons accumulé au fil des années une expertise dans ce domaine et cet avantage comparatif constitue le fondement même de notre développement. D’autre part, Addoha a toujours affirmé sa volonté de contribuer activement aux objectifs de la politique des pouvoirs publics en matière d’habitat. Actuellement, ce sont près de 150 000 logements économiques et de moyen standing qui sont en cours de réalisation et de commercialisation au niveau du groupe.
Contribuer aux objectifs politiques en matière d’habitat c’est bien, mais vous êtes avant tout un opérateur privé, alors ce logement social avec une faible marge…
Le ministère de l’habitat a procédé récemment à la refonte du cahier des charges relatif aux logements sociaux [NDLR voir article en page 18]. Les assouplissements apportés par rapport aux anciennes dispositions sont de nature à donner une nouvelle impulsion à la réalisation de projets d’habitat social. La mise en application de la nouvelle mouture du cahier des charges améliore en effet la rentabilité des projets tout en garantissant l’habitabilité, la sécurité et la qualité du logement. En conséquence de ces nouvelles dispositions, notre groupe lancera à travers les principales villes du Royaume de nouveaux programmes portant sur la production de 50 000 logements sociaux. Ces nouveaux programmes seront réalisés sur le foncier déjà disponible au niveau du groupe et le foncier public qui sera cédé au secteur privé (3 800 ha). Cela sans compter pour notre groupe, les conventions (article 19) (exonération d’IS et de TVA) conclues avec l’Etat et qui continueront à produire leurs effets jusqu’en 2013.
La Fédération de l’immobilier milite pour une augmentation de la valeur du social à 300 000 DH…
J’y suis favorable et j’espère que la demande de la FNPI connaîtra une suite positive.
Etes-vous de ceux qui pensent qu’il y a encore du potentiel de croissance dans le logement social ou de ceux qui estiment qu’il comble seulement une demande qui n’a pas trouvé de logements adaptés ?
Les récentes dispositionprises par le gouvernement (extension de la garantie de Damane Sakane à 800 000 DH, mobilisation du foncier public, adoption d’un nouveau cahier des charges …) constituent un début de réponse à la problématique du logement social. La révision à la hausse de la valeur, si elle venait à être décidée, viendra renforcer et compléter ces dispositions. Le potentiel demeure énorme à en juger par les difficultés d’éradiquer les bidonvilles, notamment au niveau des grandes agglomérations.
Qu’en est-il?des?logements?de moyenne gamme qui manquent cruellement ?
Pour le logement de moyen standing, notre groupe a été précurseur en la matière. Ce sont plusieurs milliers de logements que nous commercialisons dans toutes les principales villes du Royaume à l’attention de la classe moyenne, sous la forme d’appartements et de villas économiques.
Il y a six mois, vous annonciez votre adhésion au programme?des?logements?à 140 000 DH. On ne voit rien venir…
Nous attendons le lancement effectif des appels d’offres pour y prendre part. Il est à rappeler à ce propos que les logements de 140 000 DH seront mis sur le marché dans le cadre d’une péréquation comprenant également des logements à 200 000 DH et des logements de moyen standing.
Quid de vos logements haut standing, commercialisés sous la marque Prestigia. N’y a–t-il pas de problème d’allongement du délai d’écoulement des unités ?
Bien que la commercialisation de ces projets n’ait été lancée que depuis seulement quelques mois, les ventes au titre de nos projets haut standing ont porté à ce jour sur 2 500 unités et nous comptons atteindre 3 500 unités au terme de cette année, conformément aux objectifs que nous nous étions fixés.
Il faudra compter avec la baisse de la demande internationale…
Incontestablement la demande émanant de l’étranger pour les résidences secondaires a régressé par rapport aux années précédentes. Notre groupe est cependant très faiblement impacté puisque le segment de la résidence secondaire représente à peine 7% à 8% de notre offre globale. De plus, les ventes réalisées au niveau de Plage des Nations [NDLR : 330 unités vendues en quelques semaines] et de Marrakech Golf City [NDLR : 250 unités vendues en 3 mois]… sont la preuve qu’il existe également une demande nationale pour cette catégorie de logements.
Vous faites-vous accompagner pour développer les ventes à l’international ?
Oui, mais nous venons en plus de signer un contrat avec CB Richard Ellis (CBRE) couvrant plusieurs domaines de collaboration dont la promotion des ventes du groupe à l’international. CBRE s’appuiera à cet effet sur ses affiliés en France, Angleterre, Allemagne, Scandinavie … Prestigia doit asseoir sa notoriété pour que l’on soit prêt dès que la reprise aura été confirmée au niveau de ces pays.
Comptez-vous livrer des logements haut standing cette année ?
Les chantiers des projets haut standing de «Marrakech Golf City», «Ryad Andalous», «Plage des Nations» «Bouskoura Golf City» … connaissent un rythme de travail très soutenu pour nous permettre de respecter l’agenda des livraisons. Au cours du dernier trimestre de cette année, par exemple, nous livrerons déjà des logements dans le cadre du programme Ryad Andalous à Rabat.
La question que se pose tout le monde : y aura-t-il une baisse des prix du m2 construit ? Dans quels segments, dans quelles villes s’exprimerait-elle ?
La baisse des prix annoncée par les uns et les autres depuis plusieurs mois n’a finalement pas eu lieu. Au niveau de notre groupe, nous avons même procédé courant 2009 à une augmentation de nos tarifs à Casablanca, Marrakech, Rabat …
La question du foncier reste posée. L’on sait qu’Addoha dispose d’une réserve non négligeable, mais quid du futur ? Quels sont les villes où le problème se pose avec le plus d’acuité ?
C’est à Casablanca et Rabat que la rareté du foncier se fait le plus sentir. La solution passe par l’accélération de l’extension des périmètres ouverts à l’urbanisation. Les projets de création de villes satellites à proximité des grandes agglomérations de même que la mobilisation du foncier public au profit du secteur privé figurent parmi la série de mesures possibles.
Addoha est en train de construire deux cimenteries à l’heure où le secteur souffre d’une surcapacité… Un commentaire sur cette situation ?
Pourquoi affirmer que le secteur souffre d’une surcapacité alors que la consommation continue à augmenter, certes à un rythme inférieur à celui des années passées. A fin septembre 2009, la consommation est en hausse de 1% mais par rapport à une année 2008 véritablement exceptionnelle au cours de laquelle la progression a été de +10%. En tout état de cause, et plus que jamais, nous continuons à croire dans le potentiel de développement de notre pays. Un investissement de cette taille et dans ce secteur s’inscrit dans la durée et ne peut être remis en cause sur la base de considérations conjoncturelles à court terme, et donc par définition passagères.
