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«Le marché de la relation client se régule de lui-même»

Pour l’année en cours, le chiffre d’affaires d’Intelcia devrait augmenter de 10% au Maroc et rester stable en France. La société ambitionne d’offrir ses services dans d’autres langues que le français et l’arabe, et de développer la clientèle locale.

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Karim Bernoussi 2015 02 05

Après avoir remporté l’appel d’offres du français Humanis, groupe paritaire de protection sociale, Intelcia vient d’inaugurer officiellement son 5e site français. Situé près d’Orléans, à une heure de Paris, ce site porte à neuf le nombre de plateformes dont dispose le spécialiste marocain de la relation client qui en compte quatre au Maroc. Sur plus de 1600 m2, qui ont nécessité 700000 euros d’investissement en plus des 200 000 euros de subventions du département du Loiret et de la communauté d’agglomération d’Orléans, le centre de relation client compte déjà 90 positions et envisage de les porter à 200 cette année.  

Quelles sont les tendances du secteur de la relation client au Maroc ?

Même si les chiffres définitifs de l’AMRC ne sont pas encore disponibles, je pense que le secteur sera en stagnation comme en 2013. Le premier semestre avait été très faible, mais un regain d’activité est intervenu à partir de septembre. Cette reprise avait été rendue possible par la signature de contrats avec des clients qui, auparavant, n’externalisaient pas leur relation clientèle. En France, nous n’avons pas encore bouclé nos comptes 2014, mais notre chiffre d’affaires sera autour de 64 millions d’euros contre 65 millions l’année précédente. Cependant, nous serons à l’équilibre. En tant qu’Intelcia, nous avons de belles perspectives pour 2015, notamment en termes de développement au Maroc où nous espérons faire une croissance de plus de 10%. Notre activité en France devrait quant à elle rester la même, ou légèrement supérieure dans le meilleur des cas.

Vous êtes toujours confiant dans la reprise du secteur ?

Le marché se régule de lui-même. Je pense qu’il y aura des disparitions. Les prix remonteront quand il y aura une purge.

Quelle est votre stratégie en matière d’ouverture de sites ?

Au Maroc par exemple, notre développement passera par le doublement de la capacité du site d’El Jadida (ndlr: inauguré en juin 2014). En France, nous privilégions la multiplication de petites opérations à plus forte valeur ajoutée. En clair, notre stratégie de développement est d’opérer un switch de peu de gros clients à beaucoup de petits clients pour permettre à notre entreprise d’être moins dépendante de certains donneurs d’ordre.

Pourquoi continuer à investir en France en ces temps de crise ?

Nous continuons à postuler à des appels d’offres en France car, malheureusement, nous perdons des clients. Prenons un exemple : aujourd’hui, vous faites dans ce pays un chiffre d’affaires de 30 millions d’euros sur lesquels vous risquez toujours d’avoir une baisse due à une perte de quelques clients. Par conséquent, vous vous retrouvez avec des positions et une infrastructure disponibles. C’est ce qui fait que notre business requiert de toujours trouver de nouveaux clients pour remplacer ceux qui s’en vont ou qui ne sont pas rentables. Notre force commerciale travaille donc tous les jours pour recruter de nouveaux clients à un meilleur prix et de meilleures conditions pour améliorer nos marges qui, en France, n’existent même pas. Comme nos clients français représentent 95% de notre chiffre d’affaires, il était dangereux de ne rester qu’au Maroc.

Comment gérez-vous la question de l’amenuisement des bassins de l’emploi au Maroc ?

Si le Maroc veut relever les défis liés à l’outsourcing où l’on peut avoir beaucoup d’emplois au vu du potentiel très important du marché francophone, il faut que la langue française soit maîtrisée. Cela ne peut se faire qu’au niveau des écoles et des lycées et non au niveau de la Call Academy ou des outsourcers. Ce que nous pouvons faire, et ce que nous faisons, c’est avoir des ressources humaines dédiées. A Intelcia, nous avons un expert qui élabore des programmes de mise à niveau pour éviter le tutoiement ou travailler sur les expressions.
Pour nos éventuels investissements au Maroc, vous savez qu’il y a déjà suffisamment d’acteurs à Casablanca et Rabat. J’ai déjà évoqué la possibilité de doubler la capacité du site d’El Jadida, si notre DRH estime que nos besoins en ressources humaines seront satisfaits. Nous pouvons également aller dans des villes comme Settat. En résumé, nous avons deux options :
aller dans d’autres villes marocaines, ce que nous essayons de faire, et nous installer en Afrique subsaharienne. Notre stratégie africaine a justement pour objectif de répondre aux besoins exprimés sur le continent et d’avoir accès à des bassins d’emplois que nous pouvons reconnecter à Casablanca pour servir nos clients français.

Vous envisagez aussi de développer de nouvelles capacités linguistiques. Comment ?

Il y a plusieurs façons. Si nous voulons être un acteur global, nous ne pouvons pas nous contenter du français et de l’arabe, voire de l’espagnol. Il nous faut pouvoir gérer 6, 7 ou 8 langues pour répondre aux besoins de groupes globaux. Il faut le faire par croissance externe, c’est-à-dire en faisant l’acquisition d’un acteur. Nous pouvons ainsi envisager d’aller en Turquie, pour desservir aussi bien ce marché en pleine croissance que le marché allemand. Nous pouvons aussi envisager d’aller en Egypte pour avoir accès à des ressources arabophones et anglophones. En 2015, nous souhaitons consolider le francophone pour répondre aux différents défis tels que la pression sur les prix, et en maintenant le développement sur l’Afrique. Ensuite, nous pourrons regarder du côté de nouvelles acquisitions en Amérique du Nord, du Sud.

Comment évolue la clientèle marocaine ?

Pour être honnête, nous venons seulement de nommer un commercial dédié au Maroc. Nous voulons développer ce marché car les perspectives sont intéressantes mais avec une autre structure. Aujourd’hui, nous travaillons avec Inwi, le groupe Banque Populaire, Attijariwafa bank, l’ONDA et le ministère de l’agriculture. Nous travaillons également en outsourcing avec des ressources que nous déléguons chez les donneurs d’ordre, comme Microsoft, Inwi, Viadeo.

Comment préparez-vous la sortie de votre capital du fonds d’investissement Cap Mezzanine ?

Le processus de retrait est enclenché. Nous avons entamé les négociations avec un groupement d’investisseurs franco-marocain. D’ici un mois, les choses devraient se préciser. A un moment donné, nous avions envisagé une introduction en bourse mais le contexte n’est pas propice. Si je ne peux promettre aux investisseurs deux ou trois ans de bons chiffres, ils ne seront pas satisfaits. Alors, nous préférons travailler sereinement. Depuis nos débuts, nous n’avons pas distribué de dividendes mais n’avons cessé d’investir.