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Affaires

Agence de développement agricole, le maître d’Å“uvre du Plan Maroc Vert

Sa mission sera celle d’une agence d’exécution au service d’un ministère maîtrisant les orientations générales et la stratégie globale du Plan Maroc Vert.
Trois rôles majeurs : identification des périmètres d’extension des cultures, promotion des investissements et partenariats, développement des projets au profit des agriculteurs.
Elle sera pleinement opérationnelle d’ici à  quelques semaines. Son directeur général apporte les explications.

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Pourquoi une Agence de Développement Agricole (ADA) ?
 Lorsque le gouvernement a adopté la stratégie du Plan Maroc Vert (PMV) il y a un an, en avril 2008, il était alors indispensable de créer une institution en charge de la gestion de ce Plan pour qu’elle puisse aussi rendre compte des réalisations autant que des difficultés rencontrées par cette initiative très ambitieuse.

Quelles sont les missions de l’ADA, au juste ?
Tout d’abord, donner du contenu concret à la stratégie développée au niveau national et déclinée en 16 plans agricoles régionaux. Lesquels vont finalement tourner autour de deux éléments-clés, à savoir la mobilisation de l’investissement et l’organisation des producteurs. L’ADA va par ailleurs animer beaucoup d’opérateurs et partenaires ayant un rôle à jouer dans ces Plans agricoles.
En tout il s’agit de réaliser quelque 1 500 projets, touchant 1 400 0000 agriculteurs, soit 1 000 projets pour le premier pilier, «l’offre investissement», et 500 projets dans le second pilier, «l’offre sociale». La concrétisation des projets passe par trois étapes : celle du montage  financier, organisationnel et technique ; celle de la mise en œuvre des projets au niveau des périmètres des régions ; enfin celle du suivi des projets pour évaluer s’ils ont atteint les objectifs poursuivis.

Aujourd’hui, l’agence existe mais quand sera-t-elle réellement opérationnelle ?

Depuis le lancement du Plan Maroc Vert, nous sommes passés par plusieurs phases. D’abord, il a fallu convaincre les élus des deux Chambres du bien-fondé de ce Plan et de la nécessité de créer une telle Agence. Ce qui a été fait grâce à un consensus général au Parlement, en janvier dernier. Ensuite le projet de loi 42-08 portant création de l’Agence pour le Développement Agricole a été publié au Bulletin Officiel, puis les décrets d’application ont été rendus publics au début mars. Entre-temps, l’initiative a été présentée aux organisations professionnelles, aux Conseils régionaux, puis aujourd’hui aux provinces et aux communes.

Mais l’agence n’a toujours pas de structures, de personnel…
En effet, mais les choses vont s’accélérer. Le premier conseil d’administration de l’ADA se réunira pour la première fois au cours de ce mois d’avril, et il sera présidé par le Premier ministre. Après quoi, le démarrage effectif de l’Agence pourra prendre forme sur la base d’un plan de ressources humaines et d’un plan financier sachant que son budget a déjà été discuté avec le ministère des finances.
L’ADA sera un établissement public sous tutelle de l’Etat. Un véritable bras armé du ministère de l’agriculture. Sa mission sera celle d’une agence d’exécution au service d’un ministère maîtrisant les orientations générales et la stratégie globale du Plan Maroc Vert, dans le cadre de ses prérogatives régaliennes. Les recettes de l’ADA seront couvertes par des revenus d’activité, des emprunts et des subventions. Ses dépenses, elles, seront soit celles d’investissement, de fonctionnement ou encore de remboursement d’emprunts. Un président sera à la tête de l’ADA et un directeur général sera en charge de sa gestion.
Pour ce qui est des mois à venir, nous allons lancer une vaste campagne de communication sur le Plan Maroc Vert à partir de juin prochain qui va toucher toutes les régions et ses agriculteurs. On va notamment expliquer que les 1 500 projets vont bien être réalisés mais pas en même temps. Certains vont démarrer en 2009, d’autres seront réalisés plus tard. Nous travaillons aujourd’hui à identifier les projets prioritaires.

Le ministre de l’agriculture, lors du lancement du Plan Maroc Vert, a annoncé qu’il sera opérationnel dans 12 à 18 mois, c’est-à-dire au maximum à partir de septembre 2009 ?

Nous sommes dans les temps et le délai sera respecté. Nous espérons les meilleurs résultats dans le cadre d’une coordination parfaite entre tous les opérateurs impliqués. Tout le monde est aujourd’hui mobilisé  et les régions ont fait preuve d’un grand engouement. Il faut maintenant transformer cette dynamique en projets concrets.

Mis à part l’aspect politique et institutionnel, qu’est-ce  qui a été réalisé au niveau du Plan Maroc Vert depuis un an ?

Depuis avril 2008, les équipes du ministère de l’agriculture ont arpenté toutes les régions du pays pour mettre en évidence les spécificités agricoles de chaque région et évaluer de quelle manière elles sont en adéquation avec la stratégie globale du Plan Maroc Vert. Cela a permis de rédiger les 16 plans agricoles régionaux (PAR) et les Contrat-programmes Agricoles Régionaux (CAR), permettant d’identifier des projets dans les deux piliers, ainsi que des projets et actions transverses.  Ces contrats-programmes ont été signés le 14 avril.

Outre les projets des deux piliers, relevant de l’offre investissement et de l’offre sociale, dans les différentes filières agricoles de la production animale et végétale, il y a des projets dits transverses. A quoi servent-ils ?

Les actions et projets transverses sont en fait des projets horizontaux qui incluent tout projet susceptible de créer un meilleur environnement afin que les autres projets des deux piliers se réalisent dans les meilleures conditions. On peut citer la formation professionnelle des techniciens, des agriculteurs, des femmes et des jeunes. L’Etat va accompagner les agriculteurs dans des programmes d’incitation à l’investissement, d’amélioration des circuits de commercialisation, de promotion de nos exportations, d’aide à la production, de réforme hydro-agricole. En matière d’irrigation, par exemple, le Plan Maroc Vert prévoit l’introduction de systèmes à économie d’eau sur 670 000 ha contre à peine 150 000 ha aujourd’hui.

Si vous aviez à parler brièvement des enjeux du plan…

Ce Plan répond à un enjeu de taille pour notre pays, il s’agit de l’éradication de la pauvreté. Comme celle-ci caractérise le milieu rural, le développement du pays passe obligatoirement par un équilibre entre le milieu rural et urbain. Cet équilibre ne peut venir que du secteur agricole qui va permettre d’améliorer, à terme, les revenus de 40% de la population marocaine. Ensuite, l’agriculture doit assurer la nourriture de 30 millions d’habitants dans les meilleures conditions. Il faut savoir qu’au niveau économique, l’agriculture représente 19% du PIB et, lorsque l’année est bonne, elle apporte deux points à deux points et demi de croissance. Il faut désormais utiliser l’agriculture comme un levier de développement économique du pays. Le Plan Maroc Vert n’est pas un choix parmi d’autres, c’est plutôt un défi qui s’impose à nous si on veut vraiment s’occuper d’un secteur avec de grands enjeux.

Il y a un maître-mot revenant comme un leitmotiv, c’est bien celui d’agrégation. Pourriez-vous, à votre façon, nous expliquer de quoi il s’agit ?
En fait, c’est tout simplement l’association entre les producteurs, ceux qui transforment les produits, et ceux qui assurent leur commercialisation et distribution. D’où part notre réflexion qui sous-tend le Plan Maroc Vert ? Justement du fait qu’aujourd’hui le producteur est quasiment isolé du transformateur comme du distributeur. Pire, le producteur est victime d’un système profitant avant tout aux intermédiaires. Prenez n’importe quel produit agricole, son passage du champ au consommateur fait multiplier son prix par cinq. 1/5e seulement du prix d’achat du consommateur va au producteur, alors que 4/5e vont ailleurs, en général aux intermédiaires.
L’avantage de l’agrégation justement est de faire en sorte que les agrégateurs (ou investisseurs nationaux et internationaux) ouvrent les portes du financement aux agrégés (ou producteurs). Car il faut dire qu’au Maroc, à l’heure actuelle, seuls 19% des agriculteurs accèdent aux financements bancaires. En plus, l’agrégation permet aux producteurs agrégés d’être encadrés par des agrégateurs disposant d’une ouverture vers le financement et de profiter également d’un savoir-faire technique. L’Agence de développement agricole intervient en tant qu’arbitre dans le contrat signé entre agrégés et agrégateurs.

Selon votre logique, le système d’agrégation devrait pouvoir garantir à terme de meilleurs revenus aux agriculteurs et la quasi-disparition des intermédiaires devrait également avoir pour conséquence la baisse des prix des produits agricoles achetés par les consommateurs…
L’objectif du Plan Maroc Vert est bien de doubler le PIB agricole en dix ans, en produisant une richesse supplémentaire de 100 milliards de DH en 2020. Il y aura de ce fait plus de production, et les producteurs vont empocher de meilleurs revenus (de 1/5e du prix d’achat du produit, ils pourront prétendre à un revenu équivalent à 2/5e, soit un peu moins de la moitié du prix d’achat). Concernant les consommateurs, les prix des produits agricoles vont aussi connaître une révision à la baisse. La philosophie du plan n’est-elle pas, en fin de compte, d’adapter le management industriel à une agriculture régionalisée, de la production à la consommation, de sorte que tout le monde y soit gagnant.