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Affaires

ADSL : l’ANRT joue les arbitres

Les providers accusent toujours Maroc Telecom de profiter de son monopole
Le régulateur leur a donné six mois pour se mettre d’accord
sur une solution.

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L’ANRT s’est enfin prononcée sur le conflit qui oppose Maroc Telecom aux fournisseurs d’accès à l’internet (FAI) concernant la vente du service ADSL (internet à haut débit) aux particuliers. En fin de semaine dernière, le régulateur a donné six mois aux parties en conflit pour aplanir les difficultés techniques et baliser la commercialisation, dans le respect des règles de saine concurrence. Est-ce à dire qu’enfin le consommateur aura accès à l’ADSL ?
A dire vrai, les packs ADSL se vendent depuis quelque temps «sous le manteau», pour rependre l’expression d’un responsable chez Maroc Telecom. Mais aucune publicité n’est faite là-dessus. L’explication de cette ambiguïté réside dans le problème qui oppose l’opérateur historique aux FAI. Flash-back.
Début 2003, Maroc Telecom proposait aux FAI, le service téléphonique du fixe étant encore sous monopole, une offre de prix relative à l’ADSL. De discussions en arguments, les deux parties en sont arrivées à une situation de blocage : la structure des prix proposée par l’opérateur historique, conjuguée à l’impossibilité de constituer un stock de modems, a découragé les fournisseurs. Pour tenter de trouver une issue, le régulateur a d’abord autorisé tout le monde à entamer des tests de commercialisation pour les clients potentiels. D’où la commercialisation, parfaitement légale, de packs «sous le manteau». D’où, aussi, l’impossibilité de communiquer là-dessus.
Mais il semble qu’après quelques mois de tests, les choses ne se soient pas arrangées. A ce jour, seul Maroc Telecom (à travers Menara) et Maroc connect (filiale Wanadoo) ont vendu des packs ADSL, les autres fournisseurs internet étant rebutés par la complexité des démarches à entreprendre. Une complexité que Karim Zaz, patron de Maroc Connect, résume ainsi : «Pour concevoir une offre en ADSL ou en autre chose, il faut maîtriser les coûts de prestation des services de l’opérateur, et c’est là un maillon manquant, aujourd’hui encore. L’autre difficulté est que, quand bien même nous aurions cette possibilité, tant que nous ne pourrons pas commercialiser nous-mêmes les modems permettant le raccordement, nous ne pourrons pas proposer une offre clé en main. En effet, comment dire aux clients : «venez prendre un forfait chez nous, mais allez chercher votre modem chez Maroc Telecom»? Ce que nous voulons, c’est le strict respect des règles d’une concurrence loyale. Pour cela, il faut que nous ayons les moyens de nous défendre. Sinon, le risque de voir Maroc Telecom prendre 95 % du marché est évident. Du reste, une grande partie des providers a jeté l’éponge.»

Commercialiser les modems pour pouvoir faire des offres clé en main

On comprend l’amertume des providers, d’autant que ces derniers affirment aussi que le coût d’achat du service, qui leur est facturé par l’opérateur historique puisque passant par le fixe, ne leur permet pas d’être compétitifs par rapport aux prix pratiqués par ce dernier en direction des particuliers. «La marge est insuffisante, il faudrait que Maroc Telecom réduise la facture des providers ou encore qu’il augmente ses prix finaux», explique un provider qui avoue avoir baissé les bras. Un consommateur qui s’adresserait à un provider autre que Maroc Telecom recevrait les frais mensuels de sa liaison ADSL sur sa facture téléphonique. Le reste, notamment les frais du service internet revenant au provider, lui sera facturé directement par ce dernier.
En revanche, en s’adressant à Maroc Telecom, on se voit proposer trois formules selon les débits choisis, avec des seuils de volume et contre un droit d’accès de 1199 DH (voir encadré). Mais à l’intérieur de chaque forfait proposé, le tarif comprend le service ADSL (250 DH par mois), le reste couvrant la consommation du service internet. Comme il n’y a pas de facturation plafonnée, chaque Mo consommé en sus est facturé à 1,50 DH.
Mais pour les particuliers et entreprises, on se retrouve dans la situation paradoxale où une technologie moins chère existe sur le marché mais où on ne peut pas la démocratiser faute d’accord entre ceux qui peuvent la commercialiser.
«Pour l’ANRT, la situation est débloquée», estime Mohamed Khouja, responsable du département de la concurrence. Le délai de 6 mois donné aux parties concernées est suffisant pour qu’elles établissent une charte leur permettant de travailler en bonne intelligence.
En fait, les FAI contactés semblaient moins alarmés que lors du lancement des tests de commercialisation. Maroc Telecom, à l’heure où nous mettions sous presse, n’avait pas donné suite à nos questions sur ce sujet. Affaire à suivre.