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Affaires

Abdelmajid Tazlaoui : la CGEM n’a pas quitté le dialogue social

Pour la CGEM, la question de l’amélioration des salaires a déjà  été tranchée lors du premier round en avril 2008.
Le Code du travail reste inapplicable en raison de certaines dispositions confuses.
Concernant l’indemnité pour perte d’emploi, le patronat propose de s’en tenir à  la version du projet de 2003.

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Plusieurs rumeurs font état du retrait de la CGEM du dialogue social…
C’est faux. La CGEM n’a pas quitté le dialogue social. Elle est toujours disposée à discuter avec syndicats et gouvernement, mais sur l’ensemble des sujets discutés, nous avons adopté une position de retrait par rapport à deux points : celui de la négociation sur les salaires et celui du Code du travail.
 
Justement, vous vous êtes retirés de deux commissions…
Oui, celle relative à «l’amélioration des salaires» et celle consacrée aux «libertés syndicales et la législation du travail». Concernant la première, il faut rappeler que la question de l’amélioration des salaires, justement, a été traitée lors du premier round du dialogue social en avril dernier et a donné lieu à une augmentation de 10% du Smig. Elle a aussi permis l’augmentation des allocations familiales, en même temps que l’extension de ces dernières au secteur agricole. La CGEM a assumé ses responsabilités pendant cette période tendue en acceptant que ce surplus de salaires et de charges sociales soit exclusivement supporté par les entreprises. Nous avons donc été étonnés qu’une commission dédiée à l’amélioration des salaires soit créée dans le cadre du deuxième round du dialogue social, alors même que ce sujet n’y figurait pas dans l’ordre du jour. D’où notre position de retrait.
 
La deuxième commission, elle, relevait bien d’un sujet à l’ordre du jour !
Effectivement, mais cette commission devait traiter de deux points : aussi bien celui des libertés syndicales que celui de la législation du travail. Or, nous nous sommes heurté au refus du gouvernement d’aborder la question du Code du travail.

Pourquoi ce refus ?
Sans doute sous la pression des centrales syndicales.

Quelles sont les remarques majeures concernant le Code du travail ?
Cinq thèmes méritent clarification : celui de la médecine du travail avec cette obligation d’avoir un médecin pour toute entreprise de plus de 50 salariés ; celui de l’interprétation relative aux indemnités de licenciement et qui génère souvent un cumul entre indemnités de licenciement abusif avec celle relevant d’un licenciement justifié ; celui de l’intérim avec une durée de travail trop courte renouvelable une seule fois seulement ; celui de l’interprétation concernant le contrat de travail et la durée de travail ; et enfin celui des sanctions. Sur ces points, notre demande consiste à rendre applicable le Code du travail. On accuse les entreprises de ne pas respecter l’intégralité du Code, mais d’un autre côté, il y a des confusions qu’il faut lever.
 
Le ministère de l’emploi entend mettre en place, au plus vite, l’Indemnité pour perte d’emploi (IPE), quelle est l’appréciation de la CGEM par rapport à cette mesure ?
La CGEM est favorable à l’instauration d’une indemnité pour perte d’emploi. Cette prestation fait partie des propositions de la CGEM dans le cadre du livre blanc. Il est tout à fait naturel, dans le cadre de la restructuration des entreprises en difficultés économiques, de mettre en place un filet social, pour permettre aux salariés d’avoir un minimum entre deux emplois.
 
Vous semblez la monnayer contre plus de flexibilité…
Nous ne monnayons rien du tout. La CGEM est favorable au principe de l’IPE. La flexibilité, ou plutôt l’amélioration de la flexibilité, est une demande faite dans le cadre des amendements au Code du travail, dont je viens de parler.  Et pour éviter une mauvaise interprétation du mot «flexibilité», je préfère parler de la souplesse dans la gestion du temps de travail ; l’objectif bien entendu c’est l’amélioration de notre compétitivité qui peut se traduire aussi par la création de nouvelles opportunités d’emplois.

Quelles sont vos observations par rapport à la répartition de la cotisation salarié/employeur et par rapport au taux de cotisation lui-même ? Le ministère de l’emploi entend  l’indemnisation à 70% du salaire plafonné à 6 000 DH.
Il faut revenir au projet de texte élaboré en 2003 déjà : 6 mois d’indemnisation pour un salaire plafonné au Smig et un taux de cotisation de 0,75% réparti à parts égales entre employeur et salarié. Ce scénario paraît supportable et équilibré.
 
Donc les 6 000 DH de plafond…
Je pense que c’est excessif dans une phase d’introduction de l’IPE et que ça alourdira les charges des entreprises qui sont déjà en proie à un problème de compétitivité. Expérimentons d’abord le scénario élaboré en 2003 dans un premier temps et faisons-en l’évaluation, avant de discuter d’un effort supplémentaire. Il faut être cohérent.  45% des salaires aujourd’hui déclarés à la CNSS sont inférieurs au Smig. Le scénario de 2003 répond bien à un besoin et relève d’une approche pragmatique.
 
Que représentent aujourd’hui les charges sociales dans la masse salariale d’une entreprise ?

Environ 19% pour les entreprises qui adhèrent juste au régime de base, et plus de 25% pour celles qui ont des régimes complémentaires de maladie et de retraite.

Quel en serait le seuil optimal de charges sociales au regard du tissu économique national ?
Avant de se préoccuper du seuil optimal, il faut commencer à lutter contre l’emploi dans l’informel pour élargir l’assiette des cotisations et en améliorer le rendement.
 
Etes-vous favorable à un Smig libre. Nombre d’organismes internationaux estiment que le salaire minimal est un frein à l’expansion du marché du travail. En même temps, il faut bien éviter les abus…
La CGEM est favorable au développement  des conventions collectives pour que  les spécificités de chaque secteur soient prises en compte y compris le Smig. Certaines activités nécessitent des profils pointus avec des niveaux d’expertises très élevés,  d’autres nécessitent  de la main- d’œuvre à faible valeur ajoutée. Pourquoi le Smig serait-il le même pour tous ?   

In fine, pourquoi le dialogue social piétine ?
Il ne faut pas en blâmer la CGEM. Hormis les deux commissions précitées, nous avons assisté à toutes les réunions et il n’y en a pas eu depuis fin novembre. C’est le gouvernement qui doit réactiver le processus et nous répondrons présent. Je le dis et je le répète, la CGEM n’a pas quitté le dialogue social.