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A peine 90 000 emplois nets créés par an entre 2007 et 2014

Avec 27 000 emplois nets créés, le premier trimestre 2015 enregistre le plus faible résultat sur la dernière décennie, à  l’exception de 2012.
Le taux de chômage, lui, recule de 0,3 point à  9,9%.
Retour sur l’évolution de l’emploi dans les différentes branches et sous-branches de l’activité économique.

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Si l’on excepte l’année 2012 où le résultat, à fin mars, avait été carrément négatif (-109000 emplois), les créations d’emplois au premier trimestre de 2015 sont les plus faibles depuis une dizaine d’années, soit 27 000 postes nets (voir graphe). Selon les données de l’enquête du Haut commissariat au plan (HCP) sur le marché du travail, ces 27000 emplois nets constituent le solde entre la création de 45 000 postes en milieu urbain et la perte de 18 000 autres en milieu rural. Les grands secteurs d’activité économique (agriculture, pêche et forêt, industrie et services) y ont tous participé, de manière différenciée bien sûr, à l’exception du BTP dont la contribution est nulle : celui-ci a créé 7 000 emplois et perdu 7 000 autres.

Cette évolution du marché du travail a permis de réduire de 0,3 point le taux chômage, qui s’établit ainsi à 9,9%, soit le même niveau que celui enregistré au premier trimestre de 2012. Comme souvent en pareille situation, le taux de sous-emploi a, lui, augmenté de 0,4 point, à 9,9%. Et c’est quasiment mécanique : quand le chômage reflue, le sous-emploi augmente.

Le taux d’activité global ne semble pas prêt de retrouver son niveau de la fin de la décennie 90

Sans préjuger des évolutions qui peuvent intervenir au cours des trois prochains trimestres, l’année 2015, au vu des résultats des trois premiers mois, risque de s’achever sur un niveau de création d’emplois aussi faible, sinon plus faible que celui de 2014 avec ses 21 000 postes nets (l’année 2012 pouvant être considérée comme tout à fait exceptionnelle avec seulement 1 000 emplois créés).

A s’en tenir aux chiffres officiels, il n’y en a pas d’autres, le nombre d’emplois qui se créent, depuis 2007, recule année après année. Selon nos calculs, effectués à partir des statistiques du HCP, ce sont à peine 90 000 emplois nets qui sont créés chaque année, en moyenne, entre 2007 et 2014. C’est plus qu’insuffisant pour peser de façon conséquente sur le niveau du chômage, car au stock des chômeurs s’ajoute la demande additionnelle évaluée, en basse hypothèse, à 173 000 personnes par an. Auparavant, sur la période 2000-2010, l’économie marocaine créait une moyenne de 156 000 emplois par an, et c’était cette dynamique, couplée à un faible taux d’activité des femmes, qui avait permis de réduire sensiblement le chômage, en le ramenant de 13,8% en 1999 à 9,2% en 2010.

Si par hypothèse le taux d’activité des femmes venait à augmenter, ce qui serait logique au vu du niveau d’accès de celles-ci à l’éducation et, plus généralement, de l’évolution de la société, la demande additionnelle sur le marché du travail s’accroîtrait de 45% pour atteindre quelque 250000 actifs par an. Nous n’en sommes pas là, et les taux d’activité, féminin et global, ne semblent pas prêts de retrouver leur niveau de la fin de la décennie 90. Mais si la pression sur le marché du travail est moindre en raison de la faiblesse du taux d’activité, les principaux secteurs traditionnellement fournisseurs d’emplois sont en revanche devenus atones; et c’est cette double “dynamique” en quelque sorte qui fait que le chômage est devenu rigide à la baisse, stagnant à une moyenne de 9,3% depuis 2007.

La baisse de l’emploi agricole est compensée par les services

Si l’on prend une branche d’activité comme l’agriculture, forêt et pêche, on constate que son poids dans le volume global de l’emploi a reculé de 42,2% en 2007 à 39,4% en 2014. En valeur absolue, le nombre d’emplois dans cette branche est passé de 4,44 millions à 4,2 millions entre les deux dates. Cette évolution peut s’expliquer tout à la fois par une urbanisation de plus en plus importante et surtout par une modernisation de l’agriculture de moins en moins consommatrice de main-d’œuvre. Cette tendance va sans doute continuer, à l’instar de ce que l’on peut observer ailleurs.

Cette baisse de l’emploi agricole est toutefois compensée par la hausse de l’emploi dans les services. Désormais, cette branche (qui regroupe en fait toutes les activités tertiaires, selon la nomenclature du HCP) pèse 40,15% de l’emploi total, au lieu de 36,7% en 2007. Ainsi, avec près de 4,3 millions d’actifs occupés, le secteur tertiaire dépasse légèrement le secteur primaire (agriculture, forêt et pêche). Toutes les sous-branches des activités tertiaires ont enregistré des hausses du volume de l’emploi entre les deux dates considérées, à l’exception de l’administration générale (c’est-à-dire la fonction publique) où on note une légère baisse à environ 500 000 personnes.

Comme chacun sait (ou devine), le commerce est la première activité, en termes d’emploi, dans le tertiaire. Il occupe plus de 1,4 million d’actifs à fin 2014, au lieu de 1,26 million en 2007. L’importance de l’emploi dans l’agriculture (bien que tendanciellement en baisse) et dans le commerce explique que près de 8 actifs sur 10 ne bénéficient pas de la couverture médicale et que deux tiers pratiquement (62,6%) exercent sans contrat de travail.

La deuxième sous-branche dans le tertiaire qui emploie le plus d’actifs c’est celle des services sociaux fournis à la collectivité, c’est-à-dire tout simplement l’éducation, la santé, la sécurité, la culture, etc. (voir la nomenclature officielle des activités économiques du HCP). A fin 2014, elle compte environ 600 000 travailleurs contre 522240 en 2007, soit une hausse annuelle moyenne de près de 10 000 emplois. Immédiatement après, viennent les services personnels et domestiques (blanchisserie, teinturerie, coiffure et soins de beauté, activités thermales et de thalassothérapie, jardinage, chauffeurs privés, femmes de ménage, etc.). Près de 520 000 personnes exercent dans cette sous-branche à fin 2014, contre 454 289 en 2007, soit une augmentation annuelle moyenne de l’ordre de 9 000 emplois. Et enfin, dans l’ordre, on trouve les activités de transports, entrepôts et communications avec moins de 500 000 emplois, la restauration et l’hôtellerie avec près de 300000 emplois, les banques, assurance et affaires immobilières avec quelque 250000 emplois. Ces trois sous-branches ont, elles aussi, enregistré des hausses d’emplois assez significatives entre 2007 et 2014.

Destruction d’emplois dans le textile, bonneterie, habillement et cuir

Cette concentration de l’emploi dans les services (le tertiaire en réalité) est un peu à l’image de ce que l’on observe en Europe, et en France singulièrement, où la désindustrialisation a induit une réallocation de la main-d’œuvre vers les activités tertiaires. Et à propos de l’industrie précisément, elle emploie, avec l’artisanat, plus de 1,1 million de personnes à fin 2014 (soit près de 11% de l’emploi total), contre 1,26 million en 2007. Il faut dire que cette branche a connu une baisse de l’emploi de 25000 postes par an entre 2009 et 2012. Et pour l’année 2014, l’enquête du HCP indique une perte de 37 000 emplois dans l’industrie.

Cela dit, certaines sous-branches restent dynamiques en termes d’emplois (et de valeur ajoutée aussi), comme l’industrie alimentaire, boissons et tabacs qui emploie 152 618 personnes à fin 2012 (la statistique n’est pas disponible pour les années suivantes), contre 135 847 actifs en 2007. En fait, dans cette branche, c’est surtout l’industrie du textile, bonneterie, habillement et cuir qui a perdu le plus d’emplois : -110 457 emplois entre 2007 et 2012. Pour 2014, on signale une perte de 32000 emplois dans cette sous-branche industrielle, c’est pourquoi la baisse de l’emploi industriel équivaut, grosso modo, à  la baisse de l’emploi dans le textile. Mais attention, les chiffres de l’emploi industriel comprennent ceux de l’artisanat. A s’en tenir aux statistiques du ministère de l’industrie et du commerce, l’emploi global dans les industries manufacturières s’établit à 577983 postes à fin 2012…

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