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57 milliards de DH décaissés pour les grands projets de développement depuis 2000
A la base, l’enveloppe allouée dépasse les 140 milliards de DH dont 77% sous forme de prêts. Le gros des projets concerne les infrastructures de transport et de logistique, l’énergie, l’éducation et l’agriculture. Avec moins de 8% de l’enveloppe totale, la santé et l’industrie, véritables vecteurs de développement, sont à la traîne.

Q uelque140 milliards de DH. C’est le montant consacré aux grands projets de développement du Maroc depuis 2000. D’après les données de la direction du Budget, 77% de cette enveloppe est sous forme de prêts des différentes institutions de financement internationales qui ont décaissé plus de 57 milliards de DH à date d’aujourd’hui, soit 40% du montant global alloué. On y trouve de tout : de la construction de barrages et l’extension des capacités des voies ferrées et des autoroutes, au tramway de Rabat et de Casa et le terminal de Tanger Med, en passant par les programmes d’amélioration de la bonne gouvernance, d’aide à la scolarité, et de l’insertion des jeunes et des femmes en milieu rural. Néanmoins, sur la liste détaillée des projets, l’on relève une prédominance des chantiers touchant les infrastructures et services de base en plus de l’éducation et de l’agriculture.
Ainsi, 36% des montants alloués concernent des infrastructures de transport et de logistique. Il s’agit de plusieurs projets, dont principalement les tramways de Casablanca et de Rabat, la construction du deuxième terminal du port de Tanger Med, la ligne de TGV, les autoroutes dont celle achevée de Marrakech-Agadir, en plus du financement des travaux du programme national des routes rurales. A cela s’ajoute la mise en place d’un système de téléguidage pour le réseau ferroviaire électrifié de l’ONCF, le développement des infrastructures aéroportuaires, et des projets d’augmentation des capacités ferroviaires.
Juste après les infrastructures de transport, 11% des financements vont aux projets de distribution de l’eau potable et de l’assainissement. Ceux-ci concernent essentiellement la construction du barrage de Martil, l’assainissement du bassin de Sebou, la reconstruction des infrastructures affectées par le séisme d’Al Hoceima, l’alimentation de plusieurs zones rurales en eau potable, la réforme de la gestion des déchets ménagers au niveau de plusieurs provinces, notamment Essaouira, et l’amélioration de l’assainissement liquide à Zagora et Tinghir.
En troisième lieu, il y a la production et la distribution de l’énergie qui accapare 10,7% des financements. Ces derniers concernent les projets retenus dans le cadre du PERG, la mise en place des réseaux de transport et de distribution de l’électricité, la construction de la centrale thermique de Aïn Beni-Mathar et du parc éolien du Sud-est de Tanger, en plus des projets hydroélectriques de l’ONEE, ainsi que l’approvisionnement et l’installation des systèmes photovoltaïques à Errachidia et Benguérir.
Six pays et institutions financières internationales octroient 90% des prêts et dons
Les infrastructures et services sociaux ne sont pas en reste. Une trentaine de projets structurants ont été engagés. Ce poste concentre 9,7% de l’enveloppe de financement des grands projets d’investissement du pays. L’on y retrouve la construction du barrage de Dar Khroufa, de Moulay Bouchta, de Timkit, la construction de la rocade méditerranéenne II et l’aménagement de plusieurs routes rurales.
D’autres projets sont relatifs au social, notamment à travers le financement des différents projets de l’Initiative nationale du développement humain (INDH), qui ciblent particulièrement les personnes en situation vulnérable, les enfants, les mineurs et la femme rurale. Les projets financés dans ce cadre sont axés pour leur majorité sur la formation, l’insertion et l’amélioration de la situation socio-économique des populations.
Quant à l’éducation proprement dite, elle bénéficie de 7,5% des financements alloués tandis que l’agriculture en absorbe 6,7%.
Six grands pays et institutions pourvoient 91% des financements. Naturellement, la France, partenaire historique du Royaume, est en tête des bailleurs de fonds avec plus de 25,1 milliards de DH entre prêts et dons, suivie de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD), émanation de la Banque mondiale, qui contribue à hauteur de 24,8 milliards de DH dans le financement des grands projets d’investissement au Maroc.
Très active dans le Royaume, la Banque africaine de développement (BAD) apporte quelque 23,2 milliards de DH. Autant que l’Union européenne (22,8 milliards) et un peu moins que la Banque européenne d’investissement (BEI) qui contribue à hauteur de 21,9 milliards de DH. Le Japon vient en sixième position avec 6,7 milliards de DH sous forme de dons.
Par ailleurs, la répartition géographique de ces grands investissements montre, d’une part, qu’environ 60% de l’enveloppe allouée aux projets de développement concerne les services centraux, c’est-à-dire des projets qui ne peuvent pas être attribuées à une région proprement dite, mais qui bénéficient à tout le pays. D’autre part, elle indique que les investissements sont de moins en moins l’apanage des grandes agglomérations. Ainsi, selon les données de la direction du budget, Casablanca vient en cinquième position des régions qui concentrent ce flux de grands projets d’investissement. A peine 3,7% de l’enveloppe bénéficie à la capitale économique. Idem pour Rabat-Salé (moins de 3%) et Agadir (2,4%). A l’opposé, 11% des financements de projets structurants réalisés depuis 2000 bénéficient à la région de Tanger-Tétouan.
Elle est suivie de l’Oriental, destination vers laquelle 5,2% des investissements sont orientés. Et enfin Marrakech, avec 4% des financements.
Toutefois, plusieurs secteurs ont été laissés à la traîne en matière de financement. Il en est ainsi de la Santé qui franchit à peine la barre de 6 milliards de DH. En dehors de la construction des centres hospitaliers universitaires de Fès et Marrakech, l’ensemble des financements se sont limités à des actions de prévention de maladies, de sensibilisation ou d’appui aux réformes du secteur de la santé et à l’amélioration de la qualité de la couverture sociale sans impacter structurellement les équipements sanitaires. Pour répondre à la montée de la demande de soins, suite à la mise en place de l’AMO et du Ramed, un vaste plan de rénovation et d’équipement des structures publiques de santé avait pourtant été engagé.
Le Nord et l’Oriental ont été bien servis
Avec 4,7 milliards de DH, les investissements industriels ont été également modiques, tant pour les industries extractives que pour les activités manufacturières. Hormis le financement intermédiaire octroyé pour l’usine de Renault Tanger par la BEI, aucun investissement structurant n’a été enregistré parmi toute l’enveloppe allouée. Ces derniers ont été confinés aux programmes d’appui pour les centres techniques industriels, d’appui aux associations professionnelles et de promotion des exportations industrielles.
Par ailleurs, en dehors des régions du Nord, de l’Oriental et de Marrakech, qui ont pu attirer plus de 20% des grands projets de développement en valeur, les autres régions se sont vu attribuer une enveloppe dérisoire qui dépasse à peine les 6 milliards de DH, soit moins de 5% de l’ensemble des financements.
Il faut cependant admettre que les chiffres doivent être relativisés. L’orientation des investissements dépend en effet des opportunités, des choix économiques ou politiques de l’Etat et des besoins réels de chaque région. La finalité est toujours de rechercher un équilibre entre les différentes régions et de favoriser un développement harmonieux.
Notons au final que, de par leur caractère stratégique, la majorité des grands projets d’investissement est gérée par le public. Selon la Direction du budget, 84% des investissements en volume sont du ressort de départements ministériels, de collectivités locales ou d’établissements publics. La gestion des autres projets étant assurée par les ONG et le privé.
