Affaires
15 à 20% des topographes exercent dans l’informel
La forte atomisation du secteur l’empêche d’accompagner la taille grandissante des marchés publics et alimente une forte concurrence sur les prix. Un topographe dans le privé est rémunéré 50% de plus qu’un employé du public.
La constitution en ordre a porté ses fruits pour le corps des ingénieurs-géomètres-topographes (IGT). Depuis l’entrée en vigueur en 1995 de la loi 30-93 relative à l’exercice de cette profession, le secteur a pu s’organiser de manière autonome sans l’intervention d’une quelconque autorité de tutelle. D’ailleurs, l’ordre national des IGT (ONIGT) a élu ces dernières semaines un nouveau bureau «lors d’élections ayant enregistré de très forts taux de participation», affirme Aziz Hilali, président sortant, auquel succède Mohammed Chrourou. Cependant, de l’aveu de M. Hilali, les problématiques auxquelles est confrontée la profession restent nombreuses.
D’abord, en dépit des efforts pour développer les mouvements de regroupements au sein de la profession, celle-ci continue d’être caractérisée par une forte atomisation. Sur l’ensemble des cabinets de topographie en exercice au Maroc, au plus 4 entités comptent 150 salariés tandis que la majorité écrasante regroupe moins de 20 salariés, selon le recensement de l’ONIGT. «Le problème dans cette situation est qu’il est difficile de faire face à la concurrence internationale qui bien que limitée actuellement devrait se faire de plus en plus présente les années à venir», assure M. Hilali. Mais dans l’immédiat, cela fait qu’une majorité d’opérateurs n’est pas en situation de répondre aux besoins des marchés publics, de plus en plus exigeants en moyens, selon les professionnels. En outre, la forte atomisation du secteur entretient une forte concurrence sur les prix qui en devient nocive pour la profession. De fait, «depuis 3 ans, les honoraires des IGT ont chuté de 20 à 25%», insiste un professionnel.
La multitude d’opérateurs exerçant sur le marché est aggravée par le poids conséquent de l’informel. Selon les professionnels, 15 à 20% des cabinets exercent dans la clandestinité, avec à leur tête des techniciens ayant acquis de l’expérience mais ne remplissant pas les conditions d’exercice requises.
Près de 1 000 géomètres topographes exercent au Maroc
Aussi, au volet des rapports avec l’Etat, les IGT estiment qu’ils sont peu consultés lors des phases de réflexion autour des lois se rapportant à leur domaine, alors même que la loi constitutive de leur ordre impose cela. Les professionnels citent, à titre d’exemple, le texte sur la conservation foncière voté en novembre dernier, pour lequel aucune concertation officielle n’a été initiée avec les professionnels, assure M. Hilali. En outre, les professionnels adressent des griefs à l’administration concernant les modes d’attribution des appels d’offres relatifs aux prestations topographiques. Actuellement, «ces prestations figurent parmi des ouvrages attribués intégralement à des bureaux d’étude qui sous-traitent à leur tour le volet topographique à un spécialiste», explique un opérateur. Or selon la loi 30-93, l’ingénieur topographe doit s’engager en son nom pour tout ouvrage, ce qui suppose qu’un appel d’offres distinct soit lancé et qu’il soit attribué à un IGT désigné. «C’est effectivement la marche qui a été suivie les derniers mois mais, plus récemment, les appels d’offres groupés sont redevenus la norme», explique un professionnel.
Enfin, les opérateurs adressent des griefs quant au différentiel jugé encore excessif entre les topographes du privé et ceux du public, atteignant en moyenne 50%. Cela explique d’ailleurs, en partie, que deux tiers des 1 000 IGT en exercice actuellement sont employés dans le privé.