Société
Mission française : Questions à Younès El Himdy, Administrateur et coordinateur de la FAPEE
«L’arabe n’est pas valorisé et les élèves ne sont pas motivés»

La Vie éco : Les parents s’inquiètent du niveau de leurs enfants en arabe. Ils tirent la sonnette d’alarme. Pourquoi maintenant ?
Le sujet est débattu depuis une décennie entre les parents d’élèves et les responsables car cette matière n’est pas valorisée et les élèves ne sont pas motivés. Elle est beaucoup plus vécue par les enfants comme une contrainte, voire un cauchemar. Aujourd’hui, on constate un échec mais nous ne pouvons rejeter la responsabilité de cette situation sur une seule partie seulement, donc il faut apporter des améliorations. La problématique est d’une grande actualité en raison de la mondialisation et de ses implications. Nos enfants doivent être outillés pour cela.
Comment expliquer la faiblesse du niveau en langue arabe ?
Nous reconnaissons une volonté de bien faire de la part du système français mais la mise en œuvre a toujours péché et les résultats restent insuffisants. Il est certain qu’un enseignement étranger n’est pas le meilleur système pour apprendre la langue arabe, mais on constate que le minimum n’est toujours pas au rendez-vous. Cela est dû à plusieurs contraintes au niveau de l’accord régissant cet enseignement. Deux points sont principalement à revoir dans cet accord dont nous souhaitons la réforme.
Premièrement, l’organisation des cours d’arabe en fonction des niveaux et des profils des élèves pour une meilleure adaptation à leur niveau. Deuxièmement, il faut revoir le système de recrutement des enseignants. Actuellement, ils viennent des écoles publiques et ne sont pas intégrés dans le système. Il est souhaitable de les recruter directement des écoles de formation pour les établissements du système.
Pourquoi pensez-vous qu’ils ne sont pas intégrés et y a-t-il un profil spécifique pour enseigner dans ce système?
L’expérience sur le terrain prouve que ces enseignants ne sont pas prédestinés à enseigner l’arabe dans ce système. Il ne faut certes pas généraliser, mais ils sont nombreux à ne pas savoir faire aimer l’arabe aux enfants. Ils doivent les intéresser à cette matière, avoir une pédagogie dans ce sens. Maintenant, il faut reconnaître que certains professeurs ont ce profil mais il en faut davantage.
Mais au-delà de ces contraintes, qu’en est-il du côté des enfants et des familles ?
Au-delà des méthodes, des moyens pédagogiques et des contraintes de l’accord de 2003, le manque de motivation des élèves pour cette langue reste le principal frein.
Tout comme il y a aussi une certaine contradiction au niveau des familles qui doivent valoriser la langue auprès de leurs enfants.
Les associations soulèvent aujourd’hui cette problématique, mais encore ?
Les parents n’ont pas un rôle direct dans le système, c’est certain, mais les associations ont organisé un colloque en 2011 sur l’enseignement de l’arabe dans ce système dans les pays du Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. Nous avons retenu 10 recommandations dont la plus importante est la réforme ou la révision de l’accord de 2003 entre le Maroc et la France en vue d’améliorer les choses.
Qu’en est-il des expériences dans les autres pays arabes ?
On peut dire que dans certains pays, dont le Maroc, on peut parler d’échec. En revanche, dans d’autres, comme le Liban par exemple, c’est une réussite. Il faut préciser que dans ce pays, comme dans d’autres, les parents font partie d’un comité de gestion de ce système d’enseignement et sont donc impliqués dans les décisions et les orientations à prendre. Ce qui n’est pas le cas au Maroc.
