Affaires
Frais et commissions bancaires : les révisions à la baisse compensées par des augmentations
Les banques ont dû réduire ou supprimer les frais prélevés sur plusieurs opérations par obligation réglementaire et suite à un accord avec Bank Al-Maghrib. En parallèle, elles ont augmenté les tarifs de plusieurs opérations parmi les plus courantes, autant pour les particuliers que pour les entreprises.

Cure de minceur forcée pour les commissions bancaires. Depuis le début de l’année, les banques ont été amenées à supprimer ou à réduire les frais prélevés sur plusieurs opérations. Le 1er avril, toutes les banques de la place se sont en effet engagées à rendre gratuites six opérations portant sur l’accès à la banque digitale, le recalcul du code PIN de la carte bancaire, l’opposition sur perte ou vol de la carte bancaire ou du chèque, le remplacement de la carte bancaire non encore utilisée par le détenteur et enfin le rejet de chèque pour motif de vice de forme. S’ajoutent à cela des arrêtés conjoints des ministères de l’industrie et des finances qui complètent la loi sur la protection des consommateurs et qui ont introduit de nouveaux plafonds pour les indemnités de remboursement anticipé du crédit immobilier. Idem pour les frais de dossier pour ce même financement, et ce, depuis avril. Les premiers sont désormais fixés à un mois d’intérêts, sans pouvoir dépasser 2% du capital restant dû. Les seconds sont limités à 0,1% du montant du crédit.
Les dates de valeur préservées
Même si on retrouve encore des frais non encore revus selon les nouvelles conditions, les banques ont bien mis en application les nouvelles règles. Il y en a qui ont décidé de la gratuité d’opérations telles que le virement vers les autres banques, la délivrance de carte… La clientèle en ressort gagnante, sachant que certaines opérations maintenant gratuites étaient facturées à plusieurs centaines de dirhams. De même, les nouveaux plafonds introduits pour les frais d’un crédit immobilier représentent dans l’ensemble le tiers des prix précédemment pratiqués.
Naturellement, les banques, elles, s’y retrouvent moins, mais elles ne sont pas aussi pénalisées qu’on pourrait le croire. A y voir de plus près, «l’effort ne concerne que des opérations peu courantes qui, de toutes les manières, pèsent très peu dans le total des revenus tirés des commissions», avoue un directeur de banque de détail. Preuve que la facturation de ces opérations était loin d’être vitale pour les banques, «beaucoup d’établissements les avaient rendues gratuites avant qu’ils n’y soient poussés par Bank Al-Maghrib», observe un autre directeur d’agence. «S’il s’agit de faire un vrai effort sur les commissions, il faudrait plutôt réviser la tarification des opérations les plus courantes et les plus rémunératrices portant par exemple sur la tenue de compte et les moyens de paiement ou même la pratique des dates de valeur qui dans beaucoup de cas ne se justifie pas», explique-t-il. Sur ces opérations stratégiques justement, la tendance est plutôt à l’augmentation des tarifs. La plupart des banques ont discrètement augmenté les frais sur plusieurs opérations parmi les plus courantes.
Attijariwafa bank qui a revu sa grille à deux reprises ces derniers mois a porté son tarif pour les virements de 15 à 20 DH. Les comptes en DH convertibles qui ne donnaient lieu à aucun frais de tenue de compte peuvent être désormais facturés jusqu’à 45 DH par trimestre. Depuis le début de l’année, BMCE Bank of Africa a aussi fait monter ses frais de tenue de compte, tous types confondus, à 60 DH par trimestre au lieu de 45 DH. Dans la foulée, la banque a augmenté les tarifs de ses offres packagées de 10%.
Les banques à capitaux français ont, elles, opté depuis le début de l’année pour des augmentations moins importantes mais sur davantage d’opérations. Crédit du Maroc facture le retrait d’espèces par chèque guichet à 15 DH au lieu de 10 DH. Le retrait de chèque déplacé passe de 25 à 30 DH et le rejet de chèque pour insuffisance de solde coûte 110 DH au lieu de 100 DH. Cette banque a aussi porté de 727 à 863 DH par an le prix de son pack Ribate Dirassa+ destiné aux étudiants à l’étranger.
Les marges sur commissions sont préservées
A la BMCI, les frais de tenue de compte courant passent de 65 à 75 DH par trimestre. Les retraits auprès d’une autre agence que celle où le client détient un compte sont facturés 15 DH au lieu de 10 DH. Pour sa carte la plus basique, la banque prélève aussi 115 DH par an au lieu de 108 DH. Enfin les frais engagés sur un virement émis à l’étranger (swift) passent de 95 à 115 DH. La Société Générale, pour sa part, s’est contentée d’augmenter les frais de sa carte premium internationale pour les porter de 350 à 400 DH par an.
Les particuliers ne sont pas les seuls à devoir payer davantage de commissions bancaires, la facture s’alourdit aussi pour les entreprises. Notons à ce titre que si Bank Al-Maghrib passe régulièrement en revue les grilles tarifaires des établissements afin de s’assurer que l’on ne facture aux particuliers que les commissions justifiées, les entreprises en revanche sont livrées à elles-mêmes, l’idée étant qu’elles sont suffisamment averties pour se défendre. A elle seule, Attijariwafa bank a revu à la hausse les frais de certification de chèque pour les faire monter de 15 à 20 DH, le télépaiement de la CNSS, jusqu’alors gratuit, est facturé 10 DH et son règlement manuel est passé de 25 à 30 DH. S’ajoute à cela l’escompte de chèque qui passe de 8 DH à 15 DH ou encore l’encaissement de lettre de change porté à 15 DH contre 10 DH auparavant. La banque a augmenté jusqu’au tarif de délivrance des carnets de lettre de change.
Pour sa part, BMCE Bank of Africa a fait monter les frais de tenue de compte des entreprises de 66 à 75 DH par trimestre. A son tour, Crédit du Maroc réclame désormais 25 DH pour l’annulation de chèque certifié au lieu de 15 DH, de même que l’encaissement d’effet monte de 15 à 20 DH et le retour d’effets impayés coûte 30 DH au lieu de 20 DH auparavant.
Avec toutes ces hausses, les banques sont bien parties pour pérenniser la croissance de leurs marges sur commissions, lesquelles ont déjà évolué confortablement sur les dernières années. La marge sur commissions de tout le secteur bancaire s’est en effet établie à 5,6 milliards de DH en 2014 (près de 13% du Produit net bancaire), affichant une hausse de 3,5% après une progression de 1,2% une année plus tôt.
