SUIVEZ-NOUS

Affaires

Journée continue, les scénarios envisagés

Elle entrera en application à  partir de la mi-juin. Les huit heures de travail par jour seront maintenues.
Pour les administrations recevant du public, des permanences seront instaurées au-delà  des horaires normaux.
Des discussions en cours avec les entreprises de restauration collective.

Publié le


Mis à jour le

Une fois de plus, le dossier de l’horaire continu est remis sur la table. Le gouvernement a décidé, une bonne fois pour toute – affirme-t-on de source proche du dossier-, de s’attaquer à  ce dossier sur lequel tous ses prédécesseurs ont calé. La question a suscité, à  plusieurs reprises, des débats passionnés. Le dernier, justement, ne date pas de très longtemps. C’était avant l’été 2004. Mohamed Boussaid venait alors d’être nommé ministre et, répondant à  une question orale au Parlement, il avait affirmé que l’option de l’horaire continu n’était pas encore à  l’ordre du jour. Mais, depuis, il semble que de l’eau ait coulé sous les ponts et que le gouvernement a changé d’avis. Driss Jettou a relancé personnellement le dossier. Cette fois-ci, la question semble faire l’objet d’un large consensus au sein de l’équipe gouvernementale ; contrairement au précédent vécu lors du gouvernement Youssoufi II, lorsque les rivalités entre ministres istiqlaliens et usfpéistes avaient fait capoter le projet.
Pour l’heure, aucune date n’est officiellement annoncée, mais l’objectif recherché est que la décision prenne effet à  partir de la troisième semaine du mois de juin (soit lundi 13 juin), de manière à  coà¯ncider avec l’entrée en vigueur du traditionnel horaire continu estival.
La commission chargée par le premier ministre de travailler sur le dossier ne dispose pas de beaucoup de temps : elle devra rendre sa copie à  la fin de ce mois ou, au plus tard, au début du mois de juin. Elle aura pour principale tâche de réactualiser les nombreuses études réalisées au cours des années passées sur le sujet, notamment pour mesurer les différents impacts de l’horaire continu sur le plan économique et social, ainsi que des questions ponctuelles comme le transport, la restauration collectiveÂ…
La commission, pilotée par le ministre de la Modernisation des secteurs publics, Mohamed Boussaid, devra également recueillir les avis des premiers concernés, en l’occurrence les fonctionnaires. Pour ce faire, il sera procédé en interne à  des sondages d’opinions et des groupes de réflexion.
En attendant que la commission achève sa réflexion et remette son rapport, des sources proches du dossier ont révélé à  La Vie éco, les quelques scénarios qui sont aujourd’hui envisagés. Le premier concerne les plages horaires. A ce niveau, le principe de base est que «l’horaire continu ne doit pas être synonyme de baisse du nombre d’heures de travail», fait-on remarquer à  la primature. Lors de la réunion du 4 mai, Driss Jettou a d’ailleurs beaucoup insisté sur la nécessité de maintenir les huit heures de travail quotidiennes et le minimum de 36,5 heures hebdomadaires appliqué aujourd’hui aux agents de l’administration. Quant aux plages horaires envisagées, elles sont au nombre de trois : 8 h 00 – 16 h 00, 8 h 30 – 16 h 30 ou encore 9 h 00 – 17 h 00. Pour faire passer la pilule, l’instauration de ces horaires se fera de manière progressive. Ainsi, courant juin, le gouvernement annoncera le passage à  la traditionnelle journée continue estivale, qui s’étale généralement de 8 h 30 à  15 h 30. Ensuite, vers la mi-septembre, changement de programme. Au lieu de revenir aux horaires normaux à  deux vacations, la journée continue sera adoptée pour de bon avec un rajout d’une heure.

Rabat économisera 90 MDH d’électricité par an
Pour rester dans le principe de la progressivité, un des scénarios retenu prévoit le lancement de la journée continue en laissant au gouvernement une sortie de secours. On propose donc que la journée continue soit instaurée, dans un premier temps, à  titre d’essai, sur une durée d’une année ou deux. Au terme de cette période d’expérimentation, le gouvernement pourra, avec du recul, décider soit d’adopter définitivement la journée continue, soit de l’abandonner en cas d’échec.
Mais, apparemment, le gouvernement ne voit pas de raisons pour que le projet échoue. D’ailleurs, tous les ministres présents à  la réunion du 4 mai étaient favorables à  l’application des horaires continus. Le ministre des Finances, Fathallalh Oualalou, a pour sa part donné, à  titre d’exemple, l’économie d’énergie que pourrait réaliser le Maroc : pour la seule ville de Rabat, les études ont montré qu’elle serait de 90 MDH par an. Mais ce n’est pas tout. La formule présente de nombreux autres avantages, notamment celui d’alléger la circulation dans les grandes villes.

La matinée du samedi réhabilitée
A côté de cela, certains problèmes, notamment deux, et de taille, devront être réglés : la restauration et les horaires des écoles pour les couples ayant des enfants.
Pour le premier, des solutions concrètes sont aujourd’hui envisageables. Le ministre des Affaires économiques et générales, Rachid Talbi Alami, a annoncé lors de la réunion que son département est en train de finaliser un projet sur la généralisation d’une formule de tickets-déjeuner. Un dossier qu’il met d’ores et déjà  à  la disposition de la commission (voir encadré).
Quant au second problème, celui des écoles, le ministre de l’Education nationale, Habib El Malki, a assuré à  ses collègues que la journée continue ne pose absolument pas de problèmes majeurs. Dans le monde rural oà¹, très souvent, les écoles sont éloignées, la majorité des petits écoliers déjeunent déjà  et par la force des choses sur place. Pour la campagne, le problème est donc résolu. Le problème restera essentiellement posé pour les villes. Le gouvernement envisage de doter les écoles de cantines, quand cela est possible, ou de faire appel à  des prestataires de services pour livrer des repas moyennant, justement, des tickets.
Dernier problème à  régler : la continuité du service, surtout pour les structures recevant du public, comme les arrondissements urbains, les perceptionsÂ… A ce niveau, la grande nouveauté sera l’instauration d’un système de permanences pour prolonger les heures d’ouverture. Il est même envisagé de faire fonctionner certaines de ces administrations les samedis matin. D’ailleurs, la commission tentera de s’inspirer des horaires adoptés dans certaines grandes entreprises de la place, qu’elles soient publiques ou privées, comme l’OCP, l’ONE, l’ONCF, la Douane ou encore la Lydec à  Casablanca. Objectif : adapter les horaires à  chaque catégorie de fonctionnaires.
Dans le même ordre d’idées, l’une des pistes suggérées par Driss Jettou consiste à  instaurer un système d’horaires flexibles. Le principe est simple : la présence du fonctionnaire est obligatoire sur une plage fixe de quatre ou cinq heures uniquement par jour. En début et en fin de journée, chaque fonctionnaire gère librement ses heures d’arrivée et de départ. Seule condition, il faut qu’il remplisse son quota mensuel à  raison de huit heures par jour. Pour gérer tout cela, le gouvernement envisage entre autres de faire appel aux technologies modernes : système de pointage, badgesÂ…
Mais d’aucuns se demandent si toutes ces mesures pourront être opérationnelles dès le départ. «Si l’on devait attendre que tout soit mis en place avant de lancer la journée continue, on en aura encore pour plusieurs années», explique un des membres de la commission. D’o๠la décision du gouvernement de lancer d’abord la journée continue et de mettre en place le reste des mesures d’accompagnement de manière progressive. De toutes les manières, les Marocains finiront par s’y adapter

Un système de tickets-déjeuner à  l’étude

Leministère des Affaires économiques et générales travaille depuis quelques mois sur une formule de restauration collective aussi bien pour les entreprises privées que pour les administrations. Le principe est le suivant : chaque salarié a droit à  un ticket-déjeuner par jour dont il paiera une partie, l’autre partie étant financée par l’employeur. Mais la nouveauté réside dans l’utilisation du ticket. L’entreprise pourra faire appel à  un spécialiste de la restauration collective, auquel cas, les salariés se feront livrer des repas en échange de leurs tickets. Mais quand l’entreprise ou l’administration n’a pas la possibilité de faire appel à  un restaurateur, les salariés auront la possibilité d’aller se restaurer à  l’extérieur et de payer en remettant leurs tickets qui feront office de vignettes. La restauration pourra se faire soit dans des grandes surfaces soit auprès d’enseignes connues. Ces dernières pourront par la suite présenter les tickets pour se faire rembourser, à  l’instar de ce qui se fait pour les vignettes. La formule fonctionne déjà  dans d’autres pays. Au Brésil, 6 millions de tickets- déjeuner sont consommés quotidiennement.
Les spécialistes de la restauration collective ont flairé l’opportunité et se sont déjà  constitués en association, qui mène aujourd’hui les discussions avec le ministère des Affaires économiques et générales pour définir les modalités de fonctionnement du système et les prix à  appliquer .