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Ce que peuvent rapporter 200 000 DH en Bourse
Avec cette mise initiale, un particulier peut composer un portefeuille équilibré et diversifié. Attijariwafa bank, la BCP, Addoha et Maroc Telecom doivent y figurer, selon les analystes.Malgré la crise, le portefeuille aurait enregistré une performance de 60% depuis 2004.

Nombreux sont les particuliers qui croient que la bourse est un marché de spéculation réservé aux professionnels et aux initiés. Il est vrai que l’on peut y réaliser ponctuellement des gains rapides, à condition d’accepter un certain niveau de risque, mais la bourse est aussi un placement intéressant sur le long terme qui peut rapporter plus que les produits bancaires, obligataires ou d’assurance, avec un risque maîtrisé. Pour preuve, malgré la crise qui dure depuis 2008, le marché actions affiche toujours une forte croissance sur les dix dernières années.
Actuellement, la bourse est en train de sortir progressivement de sa léthargie.
L’indice général de la place se maintient en territoire positif depuis le début de l’année et quoi qu’on en dise à propos de la faible liquidité du marché, il existe toujours une poignée d’investisseurs qui animent les transactions, notamment les institutionnels et les étrangers. Les professionnels rapportent que ces derniers, connus pour être les faiseurs du marché, se renforcent petit à petit grâce à une meilleure visibilité en comparaison avec les dernières années.
Et il semble que les particuliers reprennent également goût à la bourse comme l’atteste l’afflux des personnes physiques sur l’OPV de Lesieur. C’est dans ces conditions que les analystes tablent sur une variation positive du MASI estimée entre 5% et 10% d’ici la fin de l’année. Ils préconisent un retour sur le marché car il recèle plusieurs valeurs qui disposent d’un important potentiel de croissance. Cette recommandation intervient dans un contexte où les rendements des placements obligataires s’amenuisent compte tenu de la baisse des taux des bons du Trésor.
Comment profiter de cette reprise ? Avec quel budget et sur quel horizon de placement ? Il n’existe certes pas de mise minimale exigée pour investir en bourse. Mais il faut un certain budget pour constituer un portefeuille d’actions équilibré et diversifié. Les gestionnaires contactés estiment qu’un investissement initial de 200 000 DH avec un horizon de placement de 5 ans au moins peut constituer un bon départ et rapporter un rendement correct. Prenons un cas concret.
Les grosses capitalisations devraient représenter 70% du portefeuille
Les analystes et gestionnaires contactés sont partagés par rapport aux valeurs qui devraient composer le portefeuille. Au moment où certains privilégient les titres de rendement, d’autres recommandent plutôt les valeurs de croissance. Quoi qu’il en soit, ils sont unanimes à dire que le portefeuille à constituer ne devrait pas répliquer l’indice général du marché mais plutôt viser la réalisation d’une performance supérieure. Il devrait être composé à hauteur de 70%, soit 140 000 DH, de valeurs de grosses capitalisations ; le reste, soit 60000 DH, devrait inclure des valeurs de petite et moyenne taille. Par ailleurs, il faut miser sur les valeurs qui affichent un PER (multiple de bénéfices) inférieur à la moyenne du marché. Aussi, il est recommandé d’opter pour les titres des sociétés qui ont un positionnement fort dans leurs secteurs respectifs sur le marché marocain mais qui disposent également de relais de croissance à l’international.
Ainsi, en tenant compte des avis des uns et des autres, il ressort un portefeuille composé dans une première partie des valeurs du secteur bancaire, cimentier, immobilier, agroalimentaire, sans oublier le secteur des assurances et celui des télécommunications. Ensuite, les analystes recommandent de détenir une dizaine d’actions de petite et moyenne capitalisation, pondérée chacune entre 2% et 4%.
Pour le secteur bancaire, il est conseillé de posséder Attijariwafa bank, la BCP et le CIH. Les deux premières avec une pondération de 8% chacune, en raison de leur potentiel de croissance en Afrique couplé à leur forte présence sur le marché national. Cela sans évoquer leur PER qui est respectivement de 15,4 et 16,8, loin de la moyenne du marché qui est de 18. Le CIH, avec un poids de 4%, est considéré comme une valeur de croissance vu la réorganisation de l’activité du groupe et la fin de sa concentration sur le seul financement de l’immobilier. Notons que depuis le début de l’année, la valeur a réalisé une performance de 13%, soit la plus forte de toutes les autres valeurs du secteur.
Hormis les banques, le portefeuille devrait inclure Maroc Telecom à hauteur de 10%, compte tenu de la régularité de la rémunération des actionnaires ainsi que du niveau élevé du rendement du dividende, situé à 6,2% en 2013 au moment où le taux de rendement moyen du marché s’établit à 4,4%. Par ailleurs, le partenariat avec Etisalat et le potentiel des filiales africaines devraient permettre à l’opérateur de résister à la recrudescence de la concurrence et d’améliorer ses revenus.
Le ciment n’est pas à exclure. En dépit de la méforme du secteur caractérisée par une baisse continue de la consommation nationale, les analystes estiment que Lafarge et Holcim, notamment, demeurent des valeurs intéressantes, surtout qu’il est attendu que le marché reprenne son dynamisme. Selon ces professionnels, les deux titres doivent composer 9% de l’investissement initial.
L’on ne peut concevoir une reprise de l’activité des cimenteries sans qu’il y ait derrière une relance du secteur immobilier. Dans ce cadre, Addoha et Alliances sont retenues dans le portefeuille à raison de 9% conjointement. Les analystes estiment que les deux groupes affichent de bonnes perspectives, tant au Maroc avec la relance du logement social et le dynamisme attendu dans le segment du moyen standing, qu’à l’international suite aux différents chantiers lancés dernièrement en Afrique.
Wafa Assurance, Saham Assurance et Lesieur devraient également être retenus.
Il devrait leur être consacré un poids respectivement de 7%, 6% et 5%. D’un côté, le secteur des assurances dispose d’un potentiel de croissance important, surtout au vu du faible taux de pénétration du marché national (3,1%). Cela, conjugué à l’augmentation du parc automobile, à la volonté croissante des citoyens d’assurer leurs biens ou leur vie et à la recherche de relais de croissance à l’international, devrait assurer une progression régulière des revenus des compagnies d’assurance sur les prochaines années. D’un autre côté, Lesieur est, aux yeux des analystes, une valeur intéressante malgré son PER élevé de 22. En fait, la société bénéficie d’un bon positionnement sur son domaine de prédilection, à savoir les huiles de table et d’olive et continue de se développer sur d’autres segments (savons et condiments). En outre, «la société dispose d’un excédent de trésorerie important qu’elle ne peut conserver pour longtemps. L’on s’attend donc à une distribution de dividendes plus intéressante que celle des exercices précédents», argumente un analyste.
Avis mitigés sur le secteur minier
Si les avis des professionnels convergent plus ou moins par rapport aux grosses capitalisations composant les 70% du portefeuille, ils restent largement partagés par rapport au 30% restants. Mais, dans tous les cas, ils préconisent la diversification aussi bien en termes de taille que de secteur d’activité. Il ressort des recommandations de certains analystes que 12% du budget devraient être consacrés de manière égale à Delta Holding, HPS, Jlec et Label’Vie. Le portefeuille devrait aussi comprendre S2M, Lydec et Unimer à raison d’une pondération de 4% chacune. Le reste devrait être réparti entre Stroc, M2M et Dari. En fait, ces valeurs offrent, en plus d’un rendement de dividende intéressant, un taux de croissance annuel moyen des bénéfices stable sur les cinq dernières années. Même s’il est impacté par la mauvaise conjoncture, il demeure plus intéressant que les autres sociétés de même taille.
Cela dit, les secteurs des mines, des transports et de l’industrie pharmaceutique ne font pas l’unanimité. «Le secteur minier est à considérer comme un investissement spéculatif. Il évolue à contre-courant de l’économie. Autrement dit, les investisseurs se dirigent vers les actifs refuge quand l’économie se porte mal et vice versa. Maintenant que les signes de reprise sont visibles, ces valeurs sont à éviter», met en garde un professionnel. Par contre, un autre estime qu’aussi bien la rentabilité que les cours des sociétés minières cotées pourraient s’améliorer au fur et à mesure du développement de leur activité sur le plan national et international.
Pour leur part, les secteurs pharmaceutique et des transports sont considérés comme étant stables avec une activité régulière. Du coup, les cours des sociétés ne seraient pas amenés à augmenter. «Cela dit, ces valeurs peuvent être retenues afin de contrer la volatilité d’autres valeurs et d’équilibrer ainsi la valorisation du portefeuille», propose notre source.
Quoi qu’il en soit, les analystes estiment qu’avec cette structure le portefeuille devrait surperformer l’indice général du marché. En supposant qu’un investisseur détienne ce portefeuille depuis trois ans, c’est-à-dire depuis la mi-juin 2011, et en considérant les dividendes versés sur la période, il aurait accusé une perte de seulement 8,5% au moment où le MASI a chuté de 21,7%. Sur les cinq dernières années, soit en remontant à juin 2009, la perte aurait été limitée à 4% contre 18% pour le MASI. En revanche, sur les dix dernières années, le portefeuille constitué aurait affiché un bond de près de 60%.
Le MASI, lui, a enregistré une progression d’environ 140%. Cela ne veut pas dire que le marché a fait mieux que le portefeuille, mais tout simplement que l’indice a fait l’objet de nouvelles pondérations suite aux introductions en bourse. En somme, cet exemple vient confirmer l’intérêt d’un placement en bourse et sa rentabilité sur une durée moyenne à longue.
