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Affaires

La percée de Bim inquiète les enseignes de la grande distribution

Intriguées par le développement du discounter turc, elles le soupçonnent de bénéficier de subventions.
Bim Stores nie l’existence d’une quelconque aide de l’Etat turc. Le succès du concept est expliqué par la maîtrise des charges qui permet de fixer des prix plus compétitifs. La marge est maintenue coûte que coûte entre 2,5 et 3%.

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bim 2014 03 24

Bim Stores inquiète les autres enseignes de la distribution moderne. Le discounter turc, implanté depuis 2009 au Maroc, semble sérieusement secouer le secteur : prix très accessibles, promotions spécifiques, fidélisation des ménagères grâce aux fameux «Vendredis de Bim» et surtout grâce à la proximité des points de vente. Il compte actuellement 180 magasins sur l’axe Kénitra-El Jadida, en passant bien sûr par Rabat et Casablanca. Tout cela permet de ratisser large et de grignoter des parts de marché. Ce qui fait grincer des dents les concurrents qui avouent être gênés et surtout intrigués par le «fonctionnement de ce modèle».
Que reprochent les opérateurs de la distribution moderne au concurrent turc ? Essentiellement, l’agressivité au niveau des prix. «Comment cette enseigne arrive-t-elle à s’en sortiravec des prix aussi bas ? Et cette pratique agressive entache l’image des autres enseignes qui sont, du coup, taxées de très chères et sélectives!», déclare un opérateur de la distribution moderne, se faisant l’écho de ses pairs. De plus, il avance que Bim Stores a enregistré, depuis 2010, un déficit régulier qui va en s’aggravant au rythme des ouvertures. Les informations déposées au registre de commerce confirment l’existence d’un déficit de l’ordre de 40 MDH en 2009 et qui est passé à 56 millions en 2010, 68 millions l’année suivante et 86 millions en 2012. Le chiffre d’affaires, quant à lui, est en hausse soutenue: de 50 MDH en 2009, il est monté à 580 millions en 2012 contre 189 millions et 360 millions, respectivement en 2010 et 2011. Dès lors, ses concurrents, tout en restant très prudents dans leurs propos, ne s’empêchent pas d’invoquer l’existence de subventions de l’Etat turc. «Si c’est bien le cas, il s’agit d’une concurrence déloyale qu’il nous faut dénoncer», disent-ils. Ils seraient même prêts, s’ils disposaient de preuves tangibles, à porter l’affaire devant le Conseil de la concurrence. Aura-t-on droit à une nouvelle version du feuilleton Lesieur-Savola ?

70 nouveaux magasins programmés d’ici la fin de l’année

Aucune chance, si l’on s’en tient à la version de Bim Stores. «Il n’est pas question de créer des tensions sur le marché. L’objectif est de développer le concept du hard discount au profit de nos clients», répondent les responsables de Bim Stores. Ils reconnaissent en effet, sans pourtant avancer de données chiffrées, ne pas encore gagner de l’argent. «Ce n’est pas une surprise puisqu’il est prévu dans notre business plan de ne pas réaliser de bénéfices au cours de la phase de croissance. Et c’est à l’image du modèle turc où les premiers gains ont été réalisés sept années après le démarrage de l’enseigne», explique un dirigeant. L’enseigne a réalisé durant ses quatre premières années d’activité un investissement global de 800 MDH pour ouvrir à

Casablanca, El Jadida, Rabat, Settat et Kénitra. Elle compte ouvrir 70 points de vente au cours de cette année.
Selon la même source, l’entreprise ne bénéficie d’aucune subvention publique. «Nous reproduisons simplement le modèle de la maison mère qui a fait ses preuves en Turquie. Il s’agit du concept de hard discount qui nous permet de maîtriser nos charges pour offrir un prix accessible à notre clientèle cible», plaide-t-on chez Bim Stores. Le modèle économique est basé sur une réduction maximale des charges et une petite marge. Pour cela, le discounter choisit ses fournisseurs locaux et étrangers et négocie ses prix car «nous sommes contraints de respecter la marge de profit net qui se situe entre 2,5 et 3%. S’il y a dépassement, nous révisons notre politique de prix mais jamais au détriment de la qualité», souligne notre interlocuteur.
L’entreprise présente des cahiers des charges précis que les fournisseurs doivent respecter à la lettre et des tests de qualité de tous les produits, importés ou fabriqués localement, sont effectués en laboratoire avant leur achat. Et pour une optimisation des achats gérés dans les deux centrales d’Ain Sebaâ et Bouskoura, Bim Stores dit procéder à un dosage judicieux entre la production locale et les importations. Elle ne recourt à ces dernières que lorsque les contacts avec des fabricants locaux n’aboutissent pas (pour des raisons de volume parfois) ou que la fabrication ne peut se faire au Maroc.

Les marges arrière sont bannies

Toujours dans le même souci d’accessibilité du prix, le discounter a développé des marques propres de divers produits (huile, détergents, couches pour bébé, sauces, thé, café, produits d’hygiène corporelle, boissons gazeuses, fromage, yaourts, biscuits, confiserie…) en partenariat avec des groupes industriels locaux et des fournisseurs de la maison mère implantés en Belgique, Espagne, Allemagne, Pologne et aux Pays-Bas. N’étant pas tenus par un taux de référencement des produits importés, Bim Stores privilégie de plus en plus l’approvisionnement court recommandé par la maison mère afin de toujours afficher des prix inférieurs à ceux de la concurrence.

En dehors de cette technique d’approvisionnement très rodée, les charges sont bien surveillées. Le personnel est limité à 3 ou quatre caissiers par magasin, les locaux sont loués, l’agencement est simplifié au maximum et certains produits présentés directement dans des cartons rangés sur des palettes. Aucune animation sur le lieu de vente n’est non plus organisée.

Et pour rompre avec des pratiques en vigueur dans le secteur, l’enseigne turque dit travailler loyalement avec ses fournisseurs. De fait, elle écarte le ticket d’entrée, les frais de référencement, les gratuités accordées par les fournisseurs, ainsi que leur contribution à l’impression des flyers ou encore à l’entretien et à la rénovation des points de vente.