Culture
« Profession mikhali » vous réconciliera avec les chiffonniers ambulants
Ils sont quelque 10 000 travailleurs informels à collecter et à trier les déchets au Maroc. Les « mikhalis », ces petites mains qui recyclent comme elles peuvent, font l’objet d’un petit film de réhabilitation, réalisé par l’entreprise d’emballage Gharb Carton et Papier.

Que savez-vous des mikhalis, ces «chiffonniers» ambulants accusés de renverser les poubelles, salir les quartiers, perturber la circulation, enlaidir le paysage urbain avec leurs carrioles… De tous les maux de la terre, ou presque ?
Un petit documentaire de quinze minutes, mis en ligne le 23 janvier dernier, nous renseigne sur le quotidien méconnu de ces travailleurs informels, et nous invite à les scruter sous un angle inédit. Plutôt que de les déprécier, les combattre, pourquoi ne pas les considérer comme un atout pour nos villes ?
Recyclage à la marocaine
Car ces quelque dix mille petites mains ont le mérite de débarrasser nos rues de toutes sortes de déchets. «Les gens nous prennent pour des clochards, des voyous, déplore Mustapha, 21 ans. Ils nous accusent de débarquer des campagnes pour saccager les villes. Ils ne se rendent pas compte que c’est nous qui nettoyons la moitié de «leurs» villes».
100 à 150 kilos de carton usagé. C’est ce que collecte par exemple un chiffonnier tous les jours, selon les chiffres de l’excellent documentaire de sensibilisation «Profession mikhali», réalisé par la société d’emballage Gharb Papier et Carton, filiale du groupe Ynna Holding. «Nous vendons le carton récupéré à des intermédiaires, à 35 centimes le kilo. Ça nous rapporte entre 250 et 300 dirhams par semaine», confie un travailleur informel. Des camions acheminent ensuite cette marchandise à un centre de collecte et de ramassage à Casablanca, qui la compresse et l’expédie à son tour aux papeteries et autres usines pour être recyclée. Broyé, épuré, réduit en pâte puis transformé en papier d’emballage, le vieux carton ramassé par les soins du chiffonnier recouvre ainsi une nouvelle vie.
Grâce aux mikhalis, le Maroc récupère environ 28% du carton perdu. Un taux certes encore loin des 60% recyclés en Europe, mais que nous pourrions atteindre si seulement nous nous dotions du système de tri sélectif, à l’état de projet depuis dix ans… «Le carton part et revient sans cesse. Sans nous, il se noierait au milieu des ordures et ne servirait plus à rien, explique Mustapha. Il faudrait, à ce moment-là, beaucoup de bois, d’arbres, pour refaire le carton dont auront besoin les usines». Concrètement, nous informe le documentaire, une tonne de papier recyclé épargne 2,5 tonnes de bois coupé.
Le Maroc, qui consomme 180 000 tonnes de carton par an, doit importer 70% de sa matière première pour pallier aux besoins d’un secteur qui génère 11 milliards de dirhams de chiffre d’affaire par an, soit 2,7% du PIB industriel et 1,14% du PIB national.
«Nous importons alors que nous pourrions recycler notre propre carton usagé, se lamente Abdelali, intermédiaire. Et nous dénigrons ceux qui nous aident à recycler, qui nous fournissent une précieuse denrée». A méditer.
«Profession mikhali», documentaire réalisé par Gharb Papier et Carton. Disponible sur Youtube.
