Idées
Communitarisation meurtrière
Jeudi 25 juillet, à Tunis, Mohamed Brahmi, opposant politique, est tombé sous les balles de tueurs anonymes ; auparavant, le 6 février, Chokri Belaïd, député du révolutionnaire Sidi Bouzid, avait subi la même fin.

Jeudi 25 juillet, à Tunis, Mohamed Brahmi, opposant politique, est tombé sous les balles de tueurs anonymes ; auparavant, le 6 février, Chokri Belaïd, député du révolutionnaire Sidi Bouzid, avait subi la même fin. Cibles similaires, mode opératoire analogue, réaction identique : les progressistes désignent d’un doigt accusateur Ennahda, le parti au pouvoir. Vraisemblable, mais pas certain, ce qui l’est, en tout cas, c’est que le double meurtre est lié à la communitarisation, cette peste répandue dans la société arabe. L’ennemi est le voisin, le concurrent de tous les jours. L’embrigadement est forcé. Il a des incidences redoutables sur le plan rationnel comme sur le plan éthique. La vérité est communautarisée. Le membre de la communauté qui cherchait la vérité ailleurs était autre fois accusé de se vautrer dans l’erreur ; maintenant, on l’accuse de trahison. Faute de pouvoir couler dans des règles établies l’appartenance obligatoire, on la légitime par une soi-disant tradition culturelle spécifique. On exhume des mœurs obsolètes, on s’oblige à des rites tombés en désuétude… On suit la fameuse recette du penseur Pascal : On s’abêtit en se communautarisant. Dans le passé, on essayait de convaincre l’autre que soi ; de nos jours, au Liban ou en Egypte, il est passible de mort. Le Maroc doit prendre garde aux communautés de tous bords, car elles portent des germes mortifères.
