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La Bourse de Casablanca devrait finir l’année sur une baisse d’au moins 10%
Le reclassement du Maroc dans l’indice MSCI impacterait négativement le marché. Le désengagement des investisseurs des valeurs à rendement après la distribution des dividendes pourrait accélérer la baisse. La reprise est attendue au premier trimestre de 2014.

L’éclaircie qu’a connue le marché boursier il y a quelques semaines n’était finalement que passagère. En effet, le Masi a repris sa tendance baissière dans laquelle il s’est inscrit depuis 2008. L’indice général affichait à la date du 20 mai une baisse de 3,4% depuis le début de l’année. Parallèlement, les transactions sur le marché central ont atteint en moyenne quotidienne 85 MDH, en contraction de près de 8% par rapport à la même période en 2012. De fait, les investisseurs continuent de fuir le marché et s’orientent vers les placements plus liquides, moins risqués et qui offrent un rendement appréciable à court terme.
Il faut dire que le contexte économique demeure le même. Aucun indicateur macroéconomique ne s’améliore pour favoriser un regain de confiance. Le déficit budgétaire ne cesse de se creuser en raison de l’envolée des charges de compensation, le manque de liquidité continue de peser sur le système monétaire et les réserves en devises ne représentent que 4 mois d’importations, en dépit des rentrées de devises suite à la cession des filiales de SNI (Centrale Laitière et Bimo). Le contexte politique n’arrange pas les choses et le possible retrait de l’Istiqlal du gouvernement altère la visibilité des investisseurs.
Ce flou qui règne sur la place casablancaise divise les professionnels quant aux prévisions d’évolution du marché. Si certains estiment qu’il est en train d’entamer sa dernière phase baissière, d’autres évoquent la cherté du marché par rapport aux bourses voisines pour tabler sur un repli durable. En tout cas, ils sont unanimes sur le prolongement de la baisse jusqu’à la fin de cette année.
Ainsi, les fondamentalistes considèrent que le marché est toujours surévalué. «Avec un PER de 14, la Bourse de Casablanca arrive en deuxième position (derrière la Tunisie) dans le classement des marchés les plus chers de la région MENA. Ce classement empêche les investisseurs étrangers de se repositionner sur la place marocaine vu les opportunités qui s’offrent ailleurs», explique un analyste. Un autre élément vient assombrir le tableau. Il s’agit du probable reclassement du pays dans l’indice MSCI, particulièrement suivi par les investisseurs étrangers. En effet, la Bourse de Casablanca devrait passer de la catégorie «Emerging markets» à celle de «Frontier markets». «Ce repositionnement devrait affaiblir les espoirs des investisseurs quant au redressement de la situation du marché», se désole notre source. Plutôt optimiste, un autre professionnel souligne que «la nouvelle pondération de la Bourse de Casablanca dans la nouvelle catégorie donnerait plus de visibilité à ces investisseurs, car, d’une part, son poids sera plus élevé que dans l’autre catégorie, et, d’autre part, elle sera désormais comparée à des bourses telles que celles d’Abu Dhabi ou de Dubaï, ce qui devrait constituer une base de comparaison plutôt crédible».
Par ailleurs, il est vrai que les sociétés cotées ont maintenu leurs efforts de distribution de dividendes au titre de l’exercice 2012 dans le but de garder la confiance de leurs actionnaires, mais l’effet escompté était momentané. «Les investisseurs ont certes montré une grande satisfaction à l’égard du taux de distribution des dividendes qui a avoisiné 70%. Toutefois, ils ont adopté une politique opportuniste dans le sens où ils se sont positionnés sur les valeurs à haut rendement et n’hésiteront donc pas à liquider leurs positions une fois le dividende empoché». Le cas le plus illustratif est celui de CMT qui a offert un dividende de 505 DH par action, soit un taux de distribution de 186%. La valeur a perdu près de 33% du 10 au 17 mai courant, soit juste après le détachement du dividende. Notre source ajoute : «Mis à part l’effet dividende qui fait baisser mécaniquement le cours, les investisseurs ont eu tendance à se désengager de la valeur en raison de la volatilité des matières premières sur les marchés internationaux.
Avec cette stratégie opportuniste des investisseurs, cela risque d’être le cas pour bon nombre de valeurs. Du coup, le marché continuerait à s’effondrer», chose qui ne saurait déplaire à notre analyste, puisque ce dernier espère une baisse additionnelle de 20% pour que le marché retrouve un PER de 12,8. En tout cas, il table sur une contre-performance annuelle à fin 2013 de l’ordre de 10%. En revanche, un techniciste de la place estime que le marché est entré dans une phase de congestion qui risque de se prolonger. «C’est la dernière phase de baisse du marché qui pourrait ramener l’indice vers les 8 200 points d’ici au 3e trimestre de cette année, ce qui représenterait une baisse de 25%» précise-t-il. «Une fois cette baisse réalisée, le marché pourrait renouer avec la hausse et s’établir au 1er trimestre de l’année prochaine à 9 700 points, et ce, même sans redressement du paysage économique», conclut cet analyste technique.
