Au Royaume
Gouvernement d’opposition…
La dernière sortie médiatique du chef du gouvernement est très symptomatique de l’état d’esprit que peut engendrer la découverte brutale de l’exercice du pouvoir.

La dernière sortie médiatique du chef du gouvernement est très symptomatique de l’état d’esprit que peut engendrer la découverte brutale de l’exercice du pouvoir. Depuis ses débuts, une quinzaine d’années de cela, et par la force des choses, le parti de la lampe n’a pas connu un autre mode que l’opposition au gouvernement en place. On pourrait même affirmer sans avoir peur de se tromper que l’ADN même du PJD c’est l’opposition.
Mais voilà, depuis un peu plus d’un an qu’il est aux affaires, le parti de Benkirane a eu tout le loisir et le plaisir de découvrir et de confronter ses arguments d’antan à la réalité de la gestion de la chose publique. Il découvre ainsi toutes les difficultés qu’un gouvernement peut avoir à concilier entre les impératifs sociaux de l’emploi, de la santé et de l’éducation ou de l’habitat et les contraintes budgétaires et financières dictées par la nécessité de maintenir les équilibres macroéconomiques.
Malheureusement pour notre jeune démocratie et pour cette expérience inédite du Maroc, le chef du gouvernement ne semble pas toujours prêt à assumer pleinement ses responsabilités ou à admettre ses échecs ou incapacités à mener des chantiers. Et ses discours sont là pour le prouver. Victimisation, théorie du complot, c’est en tout cas toujours la faute des autres mais jamais celle du gouvernement. Mais les autres, c’est qui, au fait ? Notre chef du gouvernement ne nous le dira jamais mais se contentera, comme il l’a fait dimanche dernier, d’utiliser le «ILS» ou encore des termes comme «rbaâ». Ces «ILS», selon le chef du gouvernement, sont apparemment très puissants car ils contrôlent les médias, les journaux, les chaînes de télévision, les syndicats et même des partis prestigieux et importants.
Mais, incontestablement, le summum de la créativité de notre chef du gouvernement a été cette expression qu’il devrait absolument faire breveter à l’international quand il s’est décrit comme étant un «gouvernement d’opposition».
Evidemment, en tant que média, nous n’avons pas de conseils ni de leçons à donner au chef du gouvernement ni à quiconque parmi ses ministres. En revanche, si réellement, comme il le dit, il est «saboté» et empêché de remplir sa mission par ces «ILS», l’opinion publique, et les médias en particulier puisqu’ils sont visés, sont presque en droit de savoir de qui il s’agit exactement. Car à la longue, et tant que ces «ILS» ne sont pas nommément désignés, ce genre de discours peut s’apparenter à de la politique politicienne ou à une démarche purement électoraliste et populiste.
Auquel cas, et pour qu’il soit comme il le dit lui-même un «élément de stabilité» du Maroc, le chef du gouvernement devrait peut-être se pencher plus sérieusement sur les vrais problèmes du pays. Tout le monde y gagnerait.
