Argent
Ouvrir un centre de soutien scolaire : une affaire rentable
Avec un centre composé de 4 salles de 8 élèves chacune, l’affaire peut rapporter jusqu’à 180 000 DH nets par an. Les centres de soutien s’adressent surtout aux élèves du collège et du lycée pour les maths, la physique-chimie, les sciences et le français.

Les centres de soutien scolaire ouvrent de plus en plus ces dernières années. Et pour cause, une demande croissante de la part des parents d’élèves qui souhaitent offrir à ces derniers tous les moyens pour renforcer leurs connaissances, dans le but d’affronter les différentes épreuves au cours de la scolarité.
En effet, la dégradation de la qualité de l’enseignement public a poussé nombre d’élèves à s’orienter vers ce type de centres pour améliorer leur niveau scolaire. Mais il y a aussi les élèves du privé qui souhaitent mettre toutes les chances de leur côté pour réussir leur scolarité. Et ce ne sont pas uniquement les enfants de niveau bas ou moyen cherchant à se remettre à niveau qui recourent à ces cours supplémentaires, leurs camarades brillants, en quête d’excellence, le font également. Il faut dire que c’est devenu un phénomène de mode auquel s’intéressent les élèves de tout niveau.
Dans ce contexte, plusieurs personnes ont ouvert ce type de centres, proposant des heures supplémentaires aux élèves du collège et du lycée notamment. D’ailleurs, certains propriétaires y ont vu un business rentable et ne manquent pas de pratiquer des prix défiant la concurrence, jouant ainsi sur le nombre d’élèves par classe. Revers de la médaille : une qualité d’enseignement qui laisse à désirer. D’autres, soucieux de préserver leur image et de maintenir un niveau décent d’enseignement se refusent d’encombrer les classes. Selon plusieurs propriétaires contactés à Casablanca et Rabat, le nombre d’élèves ne devrait pas dépasser dix par salle.
Dans tous les cas, le business reste rentable : une école de soutien scolaire comprenant 4 salles d’une capacité de 8 élèves chacune et dispensant des cours de maths, de physique-chimie, de sciences et de français, peut dégager un bénéfice annuel net d’environ 180 000 DH, pour un chiffre d’affaires dépassant les 800 000 DH.
Commençons d’abord par les pré-requis. Une personne souhaitant ouvrir une école de soutien scolaire doit trouver un local pouvant abriter un minimum de 4 salles de cours à raison de 8 élèves par classe, à réaménager entièrement. En effet, réorganiser l’espace en salles de cours en prévoyant également un bureau pour la secrétaire, peut nécessiter une enveloppe de 150 000 DH. S’ensuit alors l’étape de l’équipement. Il faut compter près de 132 000 DH pour acquérir des tables, chaises, tableaux, imprimante, photocopieuse, datashow, livres scolaires…
Une fois ces éléments mis en place, le propriétaire doit prévoir un budget pour la publicité. Néanmoins, au regard du montant plombé par l’aménagement et l’équipement des lieux, les patrons ne misent pas beaucoup en communication. Mis à part quelques flyers distribués dans les collèges et lycées, la majorité des centres comptent sur le «bouche à oreille». A ce titre, une centaine de milliers de flyers distribués à un 1 DH chacun peut totaliser une somme de 100 000 DH. La création d’un site internet est essentielle certes, mais certains préfèrent ne pas le mettre en place au début de l’investissement. Ceci dit, avec la mise en place d’un site web, le coût global de l’investissement peut totaliser 392 000 DH.
La masse salariale plombe près de 50% du chiffre d’affaires réalisé
A côté de cet investissement, le propriétaire supporte des charges mensuelles liées essentiellement au loyer, à la masse salariale, aux frais de services, aux fournitures et occasionnellement à la communication. Tout d’abord, l’acquisition d’un local s’avère coûteuse pour nombre d’entre eux, surtout en début d’activité. Du coup, la plupart recourent à la location. Ainsi, avec un loyer mensuel de 12 000 DH par mois, le propriétaire peut disposer d’un local convenable pour une charge annuelle de 144 000 DH. Ensuite, une école de soutien scolaire doit recruter au moins 4 enseignants pour les 4 plus importantes matières dont la pondération dans la note finale est élevée, à savoir les mathématiques, la physique-chimie (PC), les sciences et vie de la terre (SVT) et le français. Généralement, les enseignants des maths et de la PC sont mieux rémunérés que les autres. Avec une moyenne de 150 DH de l’heure pour les deux premiers et de 100 DH pour les deux autres, à raison de 2 heures par jour pendant les six jours de la semaine, le salaire total des enseignants atteint 24 000 DH, ce qui équivaut à 288 000 DH annuellement. Il faut dire que sur les quatre écoles de soutien scolaire contactées à Rabat et Casablanca, seulement une fonctionne dans un cadre formel, en assurant à leurs employés une couverture sociale. Cela revient au fait que les enseignants recrutés enseignent déjà dans des lycées ou des collèges où ils sont déjà déclarés.
En plus de la secrétaire et de la femme de ménage, la masse salariale s’élève à près 30 000 DH par mois, soit 354 000 DH annuellement. Par ailleurs, il faut débourser près de 60 000 DH au titre des fournitures et 36 000 DH pour les frais de services en plus d’une assurance pour le local d’un montant moyen de 4 000 DH. Enfin, il faut compter près de 15 000 DH comme charges de publicité. En fait, les propriétaires déboursent des frais de communication en début d’année, à l’approche des examens et en fin d’année pour les cours d’été.
Ainsi, les charges récurrentes nécessitent un montant annuel de 616 000 DH.
Du côté des revenus, il faut différencier entre les cours de soutien qui s’effectuent au courant de l’année et les cours d’été proposés aux élèves pour avoir une longueur d’avance sur le programme attendu l’année suivante et qui sont facturés à un prix légèrement supérieur. Ainsi, avec un tarif normal avoisinant 600 DH par mois pour les maths et la PC et 500 DH pour les SVT et le français pour chaque élève, sachant que l’école prise en exemple peut accueillir 32 élèves, le chiffre d’affaires relatif aux dix mois de scolarité (de septembre à juin) se hisse à 704 000 DH.
En ajoutant à cela les sessions d’été où seulement trois salles sont remplies sur les quatre existantes et avec une facturation de 100 DH de plus pour chaque matière, une école peut rapporter jusqu’à 115 200 DH pendant les deux mois de l’été. En y additionnant les frais d’assurance payés en début d’année par les élèves, soit 6 400 DH par an, les recettes totalisent 825 600 DH par an. Le bénéfice annuel net peut ainsi s’élever à 177 650 DH après déduction de l’impôt sur les sociétés, soit une marge nette de près de 20%.
Cette dernière peut même dépasser 30% dans certains cas. Elle est le plus souvent dopée par des cours intensifs à l’approche des examens régionaux ou nationaux selon les niveaux. Certaines écoles vont plus loin en proposant aux bacheliers des cours de préparation aux concours d’accès aux écoles nationales. Non seulement cela, pour maximiser leurs gains, et vu que le local demeure vacant durant la journée, certains propriétaires mettent ce dernier à la disposition de certains organismes de formation professionnelle, moyennant un loyer mensuel ou hebdomadaire.
Notons enfin qu’aucune réglementation ne régit cette activité, que ce soit en termes de superficie à respecter, de nombre d’élèves par classe ou de compétence des enseignants. Walid Daou, associé du centre de formation professionnelle Edukaty, ne manque pas de lancer un appel aux autorités pour mettre les bases à ce métier, éviter l’anarchie qui caractérise le secteur et améliorer ainsi la qualité de l’enseignement.
