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Culture

Mawazine 2025 : L’Morphine prescrit du vrai, pas du cliché

Figure emblématique du rap marocain, L’Morphine se produit ce soir sur la scène de Salé, à l’occasion du Festival Mawazine 2025. Derrière ce pseudonyme, Mehdi déploie un style brut et sincère, profondément ancré dans la réalité marocaine. Un concert placé sous le signe de l’authenticité, à rebours des clichés qui collent encore trop souvent au genre.

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De son vrai nom Mehdi, L’Morphine s’est imposé comme une voix singulière dans le paysage musical marocain. Lors d’une conférence de presse, il a tenu à distinguer l’homme de l’artiste. Cette dichotomie, formulée avec une verve typiquement marocaine, témoigne de son refus de se conformer à l’image stéréotypée du rappeur. Hors de question pour lui de se cantonner aux sempiternels récits de rue ou de prison, souvent relayés et amplifiés par les médias. «Le rap, c’est pas juste des clashs à la télé ou des histoires de ‘’zanqa’’. C’est plus profond, il faut que les gens comprennent», martèle-t-il.

Dans une tirade aussi poétique que chaotique, L’Morphine a dénoncé la perception parfois erronée du rap marocain, notamment à l’étranger. «Si un Tunisien qui n’a jamais mis les pieds au Maroc écoute un rappeur qui ne représente pas l’essence du genre, il va se faire une fausse idée», regrette-t-il. À ses yeux, le rap doit être une expression authentique, loin des caricatures ou des imitations superficielles inspirées par le style vestimentaire ou les postures des stars internationales.

Avec l’humour et l’imagerie qui le caractérisent, L’Morphine compare le rap à une pâtisserie où chacun ajoute sa «touche de chocolat». Mais gare à ceux qui se contentent de copier sans comprendre : «Si t’es pâtissier, tu ne fais pas juste une recette pour impressionner. Faut que ça ait du sens, que ça vienne de toi». Une métaphore qui résume sa démarche : un rap ancré dans une vérité personnelle, qui puise dans la culture marocaine tout en s’adressant au grand public. Il n’hésite pas à critiquer ceux qui, selon lui, galvaudent le genre en se focalisant sur des apparences ou des thèmes passe-partout, sans saisir l’histoire ou le contexte du rap marocain.

Cette authenticité, L’Morphine la porte depuis ses débuts. Actif depuis plusieurs années, il revendique un rap «intellectuel», qui ne se contente pas de divertir mais pousse à la réflexion. «Les gens qui savent ce qu’est le rap, même en France, ils comprennent qu’il faut du fond, pas juste des effets de style», explique-t-il, tout en regrettant que certains auditeurs se laissent séduire par l’esthétique sans creuser le message.

Au-delà de sa performance de ce soir, où il devrait déployer son flow percutant et ses textes ciselés, souvent teintés d’ironie et de références à la société marocaine, L’Morphine semble porter une mission : redéfinir l’image du rap marocain et lui donner ses lettres de noblesse. «J’ai galéré, j’ai vécu des choses, j’ai des histoires à raconter. Le rap, c’est pas juste un look ou des billets à agiter», confie-t-il, dans une allusion à peine voilée aux dérives commerciales du genre. Sa verve, parfois brouillonne mais toujours sincère, a captivé l’audience de la conférence de presse, entre éclats de rire et hochements de tête approbateurs.

Ce soir, sur la scène de Salé, L’Morphine aura l’occasion de transformer ses mots en actes. Dans un festival où les stars internationales côtoient les talents locaux, son concert est une invitation à redécouvrir le rap marocain dans ce qu’il a de plus vrai.