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Rush sur le marché de la dette privée : 186 milliards de DH levés depuis 2009
Les certificats de dépôts émis par les banques représentent plus de la moitié des montants levés. Le resserrement des conditions d’octroi du crédit bancaire poussent les entreprises à émettre plus d’obligations et de billets de Trésorerie.

Le marché de la dette privée a connu un dynamisme sans précédent durant ces trois dernières années. En effet, les émetteurs, qu’ils soient des entreprises industrielles, commerciales ou des établissements financiers, ont massivement levé des fonds sur ce compartiment pour faire face à leur besoin de financement et au resserrement des conditions d’octroi du crédit bancaire classique. Selon les données fournies par BMCE Capital Markets, de 2009 au premier trimestre de cette année, les émissions ont totalisé 186,3 milliards de DH.
Les certificats de dépôt émis par les banques de la place accaparent, à eux seuls, une part de près de 59% de l’ensemble des émissions, avec un total de 109 milliards de DH sur la période. L’encours de ces titres a ainsi enregistré une hausse de 107,5% à fin avril 2012 par rapport au même mois de 2009, pour s’établir à 60,2 milliards de DH. Cette performance s’explique par le besoin persistant des banques en liquidités, comme l’atteste le recours massif de celles-ci aux avances hebdomadaires de Bank Al-Maghrib. Notons que le manque des liquidités des banques a atteint à fin avril près de 55,3 milliards de DH. On retrouve essentiellement sur ce marché Attijariwafa bank, BMCI, Crédit Agricole et le CIH comme principaux émetteurs.
Suivent sur le podium, les émissions obligataires qui ont généré le deuxième plus gros volume avec un montant global de 39 milliards de DH, soit une part de 21% des émissions totales sur la période. Elles ont concerné notamment des entreprises et établissements publics comme l’OCP et l’ONCF, mais également des sociétés privées comme Alliances, Addoha, Risma…
Pour leur part, les bons des sociétés de financement ont représenté 11,8% du volume global émis sur le marché avec un montant de 22 milliards de DH. Cet instrument a été plébiscité par les sociétés de crédit particulièrement en 2011 où il a totalisé 9,5 milliards de DH, soit presque le double de ce qui a été enregistré deux années auparavant. L’encours a ainsi été porté à 4 milliards de DH en avril 2012, en progression de 77% comparativement à avril 2009. Les signatures marquantes sur ce marché sont représentées surtout par Eqdom, Wafasalaf et Sogelease.
Quant aux billets de trésorerie, ces derniers se situent en bas de liste avec un volume total enregistré sur la période de 15,4 milliards de DH et une part de 8,27%. Ceci dit, ce marché est en progression continue grâce à des levées plus conséquentes de la part d’émetteurs d’envergure à l’instar d’Afriquia Gaz, de Maghreb Oxygène, d’Addoha ou de Maghreb Steel. Par ailleurs, l’encours des billets de trésorerie a affiché une augmentation notable depuis le début de cette année, de plus de 400% pour atteindre 17,5 milliards de DH.
Il faut dire que ces instruments du marché de la dette privée suscitent l’engouement non seulement des émetteurs mais aussi des investisseurs qui sont encouragés par des taux des bons du Trésor intéressants (taux de référence pour ce marché) mais aussi par une léthargie du marché actions. D’ailleurs, les taux moyens pondérés mensuels des émissions du Trésor, tels que publiés par Bank Al-Maghrib, montrent que depuis 2009 ils se sont caractérisés par une faible volatilité et une tendance baissière, que ce soit sur les maturités courte, moyenne ou longue. Cette tendance a prévalu jusqu’au début de l’année 2011. Et avec la décision de Bank Al-Maghrib, intervenue en mars dernier, de réduire de 50 points de base son taux directeur et le fixer ainsi à 3%, l’engouement s’est poursuivi et a encouragé davantage les sociétés à émettre de nouveaux titres de créances négociables.
Au regard des conditions de financement des entreprises de moins en moins favorables sur le marché actions, d’une part, et au niveau du secteur bancaire, d’autre part, les professionnels du marché prévoient des perspectives favorables pour le marché de la dette privée. Selon l’un d’entre eux, «l’engouement envers les TCN devrait se poursuivre sur le reste de l’année surtout dans un contexte d’aggravation des liquidités bancaires». Les analystes de CFG Group partagent le même avis. Ces derniers s’attendent à de nouvelles émissions sur les différents compartiments du marché, accentuées par l’importance des remboursements prévus pour les prochains trimestres dont le montant s’élève à 37 milliards de DH.
Sur un autre volet, la prime de risque sur l’ensemble des segments du marché de la dette privée resterait stable, favorisée, entre autres, par l’absence de dégradation des fondamentaux des principaux acteurs sur le marché.
