Affaires
1,4 milliard de DH de redressements en douane : textile et agroalimentaire passent à la caisse
Les contrôles à priori ont rapporté 1,2 milliard de DH et les contrôles à posteriori 200 millions. Deux sociétés contraintes à payer de lourdes amendes : 11 et 12 MDH.
La lutte contre la sous-facturation et la fraude en douane (espèce et origine des produits importés) des importations bat son plein. En 2010, les services de contrôle de l’administration des douanes et impôts indirects ont intensifié leur lutte aiguillés notamment – et c’est une première – par la collaboration avec la CGEM dont les membres souffrent de concurrence déloyale. Résultat : plusieurs centaines d’opérations qui ont abouti à des redressement de valeur des marchandises importées, générant 1,4 milliard de DH de recettes additionnelles, soit une hausse de 23% par rapport à l’année 2009. Il faut rappeler que c’est à partir de 2005 que cette administration a décidé de faire sérieusement la guerre aux pratiques illicites. En fait, le changement opéré auparavant au niveau de la procédure de dédouanement des marchandises a été à l’origine du développement du phénomène de la sous-facturation. Se conformant aux accords de l’OMC, la douane avait supprimé le système des prix de référence pour adopter celui de la valeur transactionnelle (déclaré). Conséquence : le pays avait connu un accroissement massif des importations de produits de bas de gamme de certains pays asiatiques, la Chine en particulier. Bien évidemment, une partie importante de ces importations était déclarée à une valeur transactionnelle largement inférieure à son prix réel. Parfois, seulement 10 % de la valeur étaient déclarés et certains opérateurs annonçaient même «des prix inférieurs à ceux de la matière première», se souvient un douanier. «Après une analyse fine du commerce extérieur, il a été constaté que le phénomène de sous-facturation affectait le textile et l’agroalimentaire», explique Fathallah Hajar, directeur de la prévention et du contentieux à la douane. Les efforts de contrôle se sont donc focalisés sur ces deux secteurs. Le résultat est sans appel. Depuis 2006, les recettes additionnelles ne cessent d’augmenter. De 727MDH, elles sont passées à 1,13 milliard de DH en 2009 puis à 1,35 milliard de DH en 2010.
Des prix d’alerte pour traquer la fraude
Deux approches ont été retenues pour lutter contre la sous-facturation. D’abord, la douane effectue des contrôles en amont, au niveau des frontières en s’appuyant sur des prix d’alerte mis en place il y a 5 ans établis sur la base d’importations précédentes et permettant d’attirer l’attention sur une éventuelle fraude -la valeur transactionnelle est cependant toujours en vigueur. En cas de difficultés à évaluer certaines marchandises, faute d’importation au préalable, «nous confrontons leur valeur avec celle d’une marchandise identique», explique un responsable de la douane. Si tout cela ne donne pas de résultat, les agents recourent à la coopération internationale, via l’Organisation mondiale de la douane.
En 2010, ces contrôles en amont ou «préventifs» ont permis de «corriger» la valeur transactionnelle de marchandises pour un montant de 3,62 milliards de DH. Le redressement a engendré des recettes de 1,2 milliard de DH, sans compter les dossiers qui font l’objet de poursuites judiciaires.
En parallèle, les services de la douane ont procédé à des contrôles à posteriori qui ont ciblé exclusivement le textile et l’agroalimentaire et ceci grâce à la collaboration avec le patronat. Il s’agit de «descentes simultanées effectuées dans plusieurs sociétés, 5 à 10 sociétés par jour de manière à ce que l’information ne soit pas relayée», souligne M. Hajar. La première étape du contrôle consiste à recourir au droit de communication qui oblige les sociétés faisant l’objet de contrôle à présenter les documents afférents à l’acte d’import et d’export. En cas de doute, la douane peut opter pour des perquisitions dans tous les locaux de la société, et qui peuvent aller jusqu’au domicile du responsable.
164 sociétés épinglées lors des contrôles à posteriori
En 2010, deux campagnes de contrôle à posteriori ont été initiées. La première l’a été conjointement avec l’Office des changes, et ce, du 23 février à fin juin. Elle a concerné 60 sociétés dont 44 opérant dans le textile et 16 dans l’agroalimentaire. 24 sociétés ont été épinglées dont 12 dans le textile et autant dans l’agroalimentaire. Le montant perçu à l’issue du redressement s’est élevé à 47 MDH.
A côté de cela, 10 opérations portant sur de gros volumes de produits de textile ont été réalisées par autant d’importateurs informels. «Nous étions confrontés à des sociétés fantômes ou presque, car elles n’avaient ni adresses, ni documentation et le fisc n’avait aucune traçabilité sur leurs opérations», confie M. Hajar. Ces importateurs étaient domiciliés auprès de transitaires, d’agences de conseil ou de cabinets fiduciaires (voir encadré). Ces dossiers sont toujours en instance.
Une deuxième campagne, qui s’inscrit dans le cadre des opérations de contrôle régulier de la douane, a ciblé plusieurs sociétés dont 140 sanctionnées pour fraude. Ce sont 64 sociétés de textile et 76 de l’agroalimentaire (confiserie, chocolaterie et de biscuiterie) qui ont versé à l’Etat 150 MDH de droits et taxes additionnels. Les entreprises de chocolaterie et de confiserie ont été le plus durement frappées. Un opérateur qui a pignon sur rue a dû débourser, pour une seule opération d’importation, 12 MDH au titre des droits de douane additionnels et des pénalités. Un autre a payé 11 MDH. Dans le textile, la fraude a concerné particulièrement les fils de différentes catégories, les tissus, les couvertures et les vêtements (pantalons, chemises, chaussettes et pyjamas). Pour l’agroalimentaire, elle porte notamment sur la biscuiterie, la chocolaterie, la confiserie, les fruits secs, les conserves de fruits et légumes et les boissons énergisantes.
